Un danseur du Bolchoï avoue avoir attaqué à l'acide son directeur artistique
Le responsable du théâtre de Moscou avait été agressé au vitriol, en janvier. L'attaque a mis au jour l'ambiance délétère régnant dans ce lieu prestigieux.
L'enquête sur l'agression à l'acide du directeur artistique du ballet moscovite du Bolchoï a franchi un cap important, mercredi 6 mars. Le commanditaire présumé de l'attaque, le soliste Pavel Dmitritchenko, s'est reconnu coupable. Cette affaire digne d'un roman policier en dit long sur le climat qui règne au sein du Bolchoï.
Un danseur réputé reconnaît avoir organisé l'attaque
"La police de Moscou a arrêté le commanditaire présumé Pavel Dmitritchenko", a annoncé la police dans un communiqué, mercredi. La veille, la police a indiqué avoir fait une perquisition chez le soliste. Pavel Dmitritchenko est l'un des danseurs les plus réputés du Bolchoï. Il a notamment tenu le premier rôle dans Ivan le Terrible de Sergueï Prokofiev et appartient au ballet depuis 2002.
L'exécutant présumé arrêté
La police affirme également avoir arrêté "l'agresseur Iouri Zaroutski ainsi que le chauffeur qui a amené ce dernier sur les lieux du crime". L'agresseur présumé a été arrêté dans la région de Tver, à 160 km au nord-ouest de Moscou, a indiqué mardi le ministère. Iouri Zaroutski ne ferait pas partie de la troupe du Bolchoï. Il est soupçonné d'avoir jeté du vitriol sur le directeur artistique Sergueï Filine, soigné en Allemagne pour des brûlures au troisième degré au visage et à la cornée.
Le règlement de comptes professionnel privilégié
"Il ne s'agit pas juste de soupçons envers quelqu'un, je suis absolument certain de savoir qui a fait cela." Dans une longue interview à la BBC (en anglais), publiée début février, Sergueï Filine s'est dit convaincu que son attaque était liée à son activité professionnelle. "Mais je ne parlerai que lorsque les enquêteurs seront prêts à l'annoncer", a-t-il poursuivi. Cette piste est également privilégiée par la police et par le directeur du théâtre, Anatoli Iksanov. De nombreux témoins, notamment des danseurs de la troupe, ont été entendus depuis l'agression de l'ex-danseur de 42 ans. Les forces de l'ordre ont voulu recourir au détecteur de mensonge, mais tous les témoins ont refusé de s'y soumettre.
Scandales, corruption et rivalités assassines révélés
Cette affaire a mis au jour des rivalités acerbes dans les coulisses et autour du théâtre le plus prestigieux de Russie. Peu après l'agression, le directeur du Bolchoï a révélé que son directeur artistique avait déjà fait l'objet de menaces, notamment via Facebook. Dans une interview au Telegraph (en anglais), il va même plus loin et assure que "le Diable est entré au Bolchoï".
Pour Le Monde.fr, "on est loin ici des avanies ordinaires rapportées jusque-là par les artistes : sabotage des élastiques des chaussons, lacération de costumes à la veille d'une première, lâcher de chat sur scène... Les règlements de comptes ont pris un caractère criminel." Citant un danseur de la troupe, le magazine allemand Der Spiegel (en anglais) évoque les scandales financiers, de corruption ou sexuels en cours dans le théâtre, devenu "un repaire de bandits". Dans le journal russe Jivoï Journal (traduit par Courrier international), une ancienne danseuse du ballet pointe "les méthodes répugnantes" de la direction et dessine en filigrane le portrait d'un monde devenu particulièrement cruel.
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