Coupe du monde 2022 : duel de Ballons d'or, guerre des nerfs et machines croates… Les clés d’Argentine-Croatie
Nous y voilà, il ne reste plus que quatre matchs dans ce Mondial 2022. La dernière semaine de compétition débute mardi 13 décembre, avec la première demi-finale entre l’Argentine et la Croatie (20 heures) au stade Lusail. L’Albiceleste, qui dispute sa sixième demi-finale, ne s’est jamais arrêtée à ce stade de la compétition dans son histoire (deux titres, trois finales) et part favorite derrière un Lionel Messi plus déterminant que jamais pour son équipe.
En face, les Vatreni, vice-champions du monde il y a quatre ans, ont passé tous les obstacles pour se qualifier pour une troisième demi-finale dans leur courte histoire, après 1998 et 2018. Avec une équipe dévouée et bagarreuse derrière Luka Modric, la Croatie est l’épouvantail que personne ne veut affronter, forte de ses quatre succès aux tirs au but en autant de tentatives depuis le début de la Coupe du monde 2018. Qui rejoindra la finale dimanche ? Voici les quatre clés du match.
Messi-Modric, duel de lutins géants
Voir deux Ballons d’or s’affronter en demi-finale d’une Coupe du monde indique forcément la valeur de l’affrontement. Dans le coin gauche du ring, la "Pulga", septuple lauréat du trophée, est à deux matchs de combler la dernière ligne qui manque à son palmarès cousu d’or. Dans le coin droit, Luka Modric, Ballon d’or en 2018 après sa colossale Coupe du monde, a ramené une nouvelle fois en demi-finale des Vatreni un peu déconsidérés. Un affrontement au sommet, dans l’entrejeu, entre deux gabarits frêles mais étourdissants de technique.
Lionel Messi, décisif dans six des neuf buts de l’Albiceleste dans ce Mondial, est plus que jamais le déterminant de son équipe. Depuis la déroute humiliante du premier match face à l’Arabie saoudite, il a toujours réussi à sortir de l’ornière une Argentine parfois peu séduisante, libérant même ses émotions et son costume de génie modeste face aux Pays-Bas. L'Albiceleste "a montré match après match qu'elle savait jouer avec la même intensité, la même envie de se battre", a prévenu la star du PSG.
Quant à Luka Modric, impossible également de voir un quelconque poids des années sur son niveau de jeu. "C'est incroyable ce niveau de performance à 37 ans", explique, admiratif, son sélectionneur Zlatko Dalic. "La leçon de son succès, c'est son sérieux, il est impeccable à l'entraînement, il s'entraîne aussi seul, sa vie c'est le football." Maître à jouer d’une équipe que personne, sauf la France en finale, n’a réussi à manœuvrer depuis le début de la Coupe du monde 2018 (une seule défaite en onze matchs), Luka Modric pourra se rappeler de l'affrontement lors de la précédente édition, où il avait rayonné et marqué pour balayer les Argentins en une période (3-0). Qui aura le dernier mot cette fois-ci ?
Fièvre argentine contre ténacité croate, qui va gagner la guerre des nerfs ?
Cet affrontement entre l’Argentine et la Croatie aura absolument tout d’une opposition de style. Les Argentins, portés par un contingent de supporters nombreux et bruyants, ont laissé beaucoup d’influx nerveux lors du quart contre les Pays-Bas. Le geste aussi inutile que dangereux de Leandro Paredes, les provocations aux joueurs des Pays-Bas lors de la séance de tirs au but ainsi que les invectives de Messi après le coup de sifflet final ont fini de consacrer l’Albiceleste comme l’équipe la plus sanguine de cette édition. Mais elle aura tout intérêt à conserver son calme, surtout si le match dure.
Car en face, la Croatie lui opposera son implacable rigueur. Résilients à souhait, les Vatreni ne sont jamais aussi forts que quand le match devient usant. Sur ses neuf derniers matches à élimination directe, Mondial et Euro confondus, la Croatie a disputé huit fois la prolongation. "Quand arrivent les tirs au but, nous devenons favoris, comme si l'adversaire avait déjà perdu", savoure le sélectionneur. Résultat : un 4/4 dans l'exercice des tirs au but. Après les larmes de Neymar, la Croatie y ajoutera-t-elle celles de Messi, pour la dernière tentative de l'Argentin ?
"Je pense qu’il y a beaucoup de gens, même des non-professionnels du football, qui peuvent tirer un pénalty. La différence se situe dans la capacité à être fort mentalement, car c’est une pression énorme, que tu n’as parfois jamais connue", souligne Bruno Petkovic, auteur du but de l’égalisation face au Brésil à la 117e minute. "Tout le monde nous croyait fichus, nous avons montré encore une fois que nous ne nous rendons jamais", enchaîne Luka Modric. Méfiance extrême donc pour l’Argentine : si l’arbitre siffle la prolongation, le sort en est souvent jeté avec la Croatie en face.
Quelle attaque pour l’Albiceleste face au bloc croate ?
Sur le terrain, c’est sans doute l’Argentine qui aura le plus de doutes au coup d’envoi. Face à un onze croate presque inchangé durant la compétition, Lionel Scaloni devra lui faire des ajustements : Marcos Acuna, auteur d’une belle Coupe du monde, et Gonzalo Montiel sont suspendus, alors que Papu Gomez est toujours incertain. Angel Di Maria, discret depuis le début, pourrait revenir comme titulaire dans une attaque qui ronronne en dehors de Messi.
Lautaro Martinez, Julian Alvarez ou Angel Di Maria : l’Argentine cherche toujours qui faire jouer autour du numéro 10 argentin, et aucun n’a assuré suffisamment pour enlever des maux de tête à Lionel Scaloni. D’autant qu’il faudra affronter le rugueux Dejan Lovren et l’épatant Josko Gvardiol, avec derrière une des révélations de cette Coupe du monde, le gardien Dominik Livakovic, qui a dégoûté Neymar, Vinicius Jr et Richarlison lors du tour précédent.
Le milieu croate turbine à plein régime
"Quand Brozovic, Modric et Kovacic sont dans le coup, nous contrôlons 90% du jeu" : c’est le latéral croate Josip Juranovic qui le dit, et il est difficile de lui donner tort. A eux trois, les membres du trio croate ont étouffé tous leurs adversaires jusqu’ici, et lorsque la salle des machines croate tourne à plein régime, c’est toute l'animation adverse qui s’enraye. Devant la défense, Marcelo Brozovic impose son gabarit et agit comme premier relanceur. Joueur qui facilite les transmissions entre Brozovic et son capitaine, Mateo Kovacic anticipe les décalages adverses. Enfin, Luka Modric se projette, et comme Antoine Griezmann chez les Bleus, endosse le costume de rampe de lancement en attaque.
Les trois auront un rôle clé pour bloquer l’Argentine : couper Lionel Messi de ses coéquipiers. "Nous n’avons pas de plan spécifique pour stopper Messi. En général, on ne se concentre pas sur le fait de stopper un seul joueur, mais l’équipe entière", explique Bruno Petkovic. C’est la première étape du plan, avant sans doute de se projeter en contre avec Ivan Perisic ou Andrej Kramaric. Mais tout cela passera par un abattage essentiel des trois milieux. Leur "passer le ballon, c'est plus sûr que de mettre son argent à la banque", résume en souriant Josip Juranovic.
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