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Académie du Jazz : la saxophoniste Sophie Alour reine du palmarès 2020 avec le prestigieux prix Django Reinhardt

Parmi les autres lauréats au titre de l'année 2020 : l'orchestre de Maria Schneider, le duo formé par le contrebassiste Diego Imbert et le pianiste Alain Jean-Marie, le chanteur David Linx et la saxophoniste néerlandaise Tineke Postma. Le palmarès a été dévoilé mercredi soir, 10 mars, sur la radio Fip.

Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
La saxophoniste Sophie Alour (Sophie Le Roux)

Du fait des restrictions imposées pour lutter contre la pandémie de coronavirus, l'Académie du Jazz, institution créée en 1954, n'a pas pu organiser sa traditionnelle cérémonie cette année. Son président François Lacharme s'est replié sur l'émission Club Jazzafip, mercredi 10 mars sur l'antenne de la radio publique Fip, pour y dévoiler en exclusivité les dix lauréats de 2020. Certains étaient présents afin de jouer des morceaux en live, tandis que des extraits des disques primés ont été diffusés.

Sophie Alour, lauréate "fière et émue" du Prix Django Reinhardt

La saxophoniste et compositrice Sophie Alour a reçu le trophée le plus prestigieux de l'Académie : le Prix Django Reinhardt qui distingue un - ou une - artiste pour l'ensemble de son activité et de sa contribution artistique au jazz durant l'année écoulée. Depuis la première cérémonie en 1955, Sophie Alour est la cinquième femme à décrocher ce prix après Sophia Domancich (1999), Géraldine Laurent (2008), Airelle Besson (2014) et Cécile McLorin Salvant (2017). Elle succède au guitariste Hugo Lippi au palmarès.

Depuis le printemps 2019, la quadragénaire native de Quimper s'est illustrée, sur scène puis au disque, avec son beau projet transméditerranéen Joy - créé sur scène sous le titre Exil(s) - qui réunit artistes de jazz et musiciens d'Orient, notamment l'oudiste et chanteur égyptien Mohamed Abozekry. Saxophoniste, flûtiste, clarinettiste, Sophie Alour collabore par ailleurs au fameux Lady Quartet de l'organiste Rhoda Scott et au Dal Sasso Big Band de Christophe Dal Sasso, distingué par une Victoire du jazz en 2020 (groupe de l'année).

Sophie Alour a célébré son trophée sur l'antenne de Fip en jouant La Chanson d'Hélène (Philippe Sarde, Jean-Loup Dabadie) en duo avec Diego Imbert, puis I Loves You, Porgy (Gershwin) en trio avec Diego Imbert et Alain Jean-Marie. Après sa performance, la musicienne s'est déclarée "fière et surtout très émue" de recevoir le Prix Django Reinhardt, avec "une pensée émue pour la jeune saxophoniste de 19 ans qui commençait le saxophone et qui écoutait les lauréats" de cette illustre distinction. Elle s'est réjouie d'être associée aux musiciennes qui l'ont précédée au palmarès, sans en faire un objet de revendication : "Enfant, je m'identifiais à Coltrane. Je n'ai jamais eu de problème à m'identifier à un homme, noir, américain, qui n'avait pas la même culture, le même chemin", a-t-elle souligné.

D'autres musiciennes ont été distinguées mercredi par l'Académie du jazz. D'une part, la compositrice et directrice d'orchestre américaine Maria Schneider pour le captivant album Data Lords - dénonciation d'un monde numérique avide de nos données personnelles - qu'elle a enregistré à la tête de son big band, le Maria Schneider Orchestra. Ce disque a remporté le Grand Prix de l'Académie qui récompense généralement un artiste ou un groupe international. D'autre part, la saxophoniste néerlandaise Tineke Postma a été sacrée musicienne européenne de l'année 2020.

David Linx, Prix du Jazz vocal

Le Prix du Jazz vocal est revenu au chanteur belge David Linx pour son excellent album Skin in the Game. Un vocaliste aussi brillant qu'attachant, "qui prend tous les risques et ne lâche jamais la main du public et de l'auditeur", s'est réjoui François Lacharme. David Linx a récité un poème de son ancien mentor James Baldwin a cappella, "une décision prise à la dernière minute", a-t-il expliqué, juste avant d'interpréter le standard Body and Soul avec Alain Jean-Marie et Diego Imbert.

Après sa très belle performance, David Linx s'est dit "très heureux et très fier" d'être distingué pour la troisième fois par l'Académie du Jazz. En 2005, il avait reçu le Prix du Musicien européen, puis, en 2010, le Grand Prix pour un projet dirigé par Laurent Cugny, La Tectonique des Nuages. Plus récemment, il a été sacré aux Victoires du Jazz 2019. À l'instar de Sophie Alour un peu plus tôt, il s'est souvenu de ses rêves de jeunesse : "Je revois le petit garçon qui voulait devenir chanteur de jazz."

 

Le bel hommage à Bill Evans de Diego Imbert et Alain Jean-Marie, Prix du Disque français

Le Prix du Disque français a été décerné à un duo formé par deux piliers de la scène jazz française (et de ce Club Jazzafip exceptionnel), Diego Imbert et Alain Jean-Marie, réunis dans Interplay autour d'un hommage intimiste et inspiré au pianiste Bill Evans. Un titre en clin d'œil à l'album d'Evans et au morceau du même nom, datant de 1962. Les deux musiciens en ont joué deux extraits en live, Turn Out The Stars et Very Early.

Interplay est un projet sur lequel ils ont commencé à travailler, à l'initiative d'Imbert, il y a 5 ou 6 ans. L'enregistrement du disque a été retardé par le premier confinement de mars 2020, mais l'album a finalement pu sortir au cours du dernier trimestre de l'année passée. En attendant de pouvoir remonter sur scène, les deux musiciens patientent comme il le peuvent : "Je travaille mon Bill Evans à la maison", a confié Alain Jean-Marie.

Enfin, un hommage à été rendu à Claude Carrière, ancien président de l'Académie du Jazz, homme de presse et de radio qui a transmis sa passion à des générations de futurs musiciens et simples mélomanes, disparu le 20 février à l'âge de 81 ans. Un morceau de Django Reinhardt qu'il affectionnait a été joué au début de l'émission.

Les dix lauréats de l'année 2020

Prix Django Reinhardt (musicien français de l’année)
Sophie Alour
Finalistes : Benjamin Moussay, Grégory Privat
(doté de 3000 euros, avec le soutien de la Fondation Paribas)

Grand Prix de l’Académie du Jazz (meilleur disque de l’année)
Maria Schneider Orchestra, Data Lords (ArtistShare)
Finalistes : Joshua Redman, Brad Mehldau, Christian McBride et Brian Blade pour Round Again (Nonesuch / Warner Music), Fred Hersch pour Songs from Home (Palmetto / L’autre distribution)

Prix du Disque Français (meilleur disque enregistré par un musicien français)
Diego Imbert, Alain Jean-Marie : Interplay (Trebim Music / L’autre distribution) Finalistes : Pierre de Bethmann pour Essais / Volume 4 (Aléa / Socadisc), Multiquarium Big Band (Charlier / Sourisse) pour Remembering Jaco (Naïve / Believe)

Prix du Jazz Vocal
David Linx : Skin in the Game (Cristal / Sony Music)
Finalistes : Kandace Springs pour The Woman who Raised Me (Blue Note / Universal), Anne Ducros pour Something (Sunset Records / L’autre distribution)

Prix du Musicien Européen
Tineke Postma
Finalistes : Matthieu Michel, Andreas Schaerer

Prix du Meilleur Inédit
Charles Mingus : Bremen 1964 & 1975 (Sunnyside / Socadisc)
Finalistes : Paul Desmond pour The Complete 1975 Toronto Recordings (Mosaïc), Art Blakey & The Jazz Messengers pour Just Coolin’ (Blue Note / Universal)

Prix du Jazz Classique
Guillaume Nouaux & The Stride Piano Kings (Autoproduction)
Finalistes : Hot Sugar Band & Nicolle Rochelle pour Eleanora, The Early Years of Billie Holiday (CQFD / L’autre distribution), Dave Blenkhorn et Harry Allen pour Under a Blanket of Blue (GAC Records)

Prix Soul
Don Bryant : You Make Me Feel (Fat Possum)
Finalistes : Robert Cray pour That’s What I Heard (Thirty Tigers), Izo FiztRoy pour How The Mighty Fall (Jalapeno)

Prix Blues
Andrew Alli : Hard Workin’ Man (EllerSoul)
Finalistes : Shemekia Copeland pour Uncivil War (Alligator / Socadisc), Jimmy Johnson pour Every Day Of Your Life (Delmark / Socadisc)

Prix du Livre de Jazz
Maxime Gordon : Dexter Gordon Sophisticated Giant (Éditions Lenka Lente)
Finalistes : David Koperhant, Bruno Guermonprez et Rebecca Zissmann pour 59 rue des Archives (Éditions ActuSF), Robert Palmer pour Deep Blues (Éditions Allia)

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