Les prix de l'essence flambent à la pompe : on répond à cinq questions pas si bêtes avant que vous alliez faire le plein
Vendredi dernier, le gazole s'affichait en moyenne à 1,5225 euro le litre, soit une augmentation de près de 23% depuis octobre dernier.
"Courage", selon la majorité parlementaire, "arnaque" destinée à "compenser" les "cadeaux fiscaux" du gouvernement, d'après l'opposition. Mardi 23 octobre, le débat a fait rage autour de l'augmentation des prix du diesel lors de la séance de questions au gouvernement organisée à l'Assemblée nationale.
C'est que la hausse est de taille. Vendredi dernier, le gazole s'affichait en moyenne à 1,5225 euro le litre à la pompe, soit une augmentation de près de 23% depuis octobre dernier. Le litre d'essence sans-plomb 95 s'établissait à 1,5555 euro (soit une hausse de près de 15% en un an), quasiment autant que celui de super contenant jusqu'à 10% d'éthanol (SP95-E10) sur la même période, qu'on trouve à un prix moyen de 1,5304 euro en France. L'essence sans-plomb 98 (SP98) était pour sa part vendue en moyenne 1,6231 euro le litre vendredi, soit une hausse de près de 14% par rapport au prix relevé un an plus tôt.
Franceinfo répond à cinq questions pas si bêtes sur l'augmentation de ces prix.
1Pourquoi les prix ont-ils autant augmenté ?
Essentiellement pour deux raisons. La première est le coût du baril de pétrole, qui a atteint début octobre un niveau inédit depuis quatre ans. Cette hausse du prix des matières premières s'explique en partie par la crainte des investisseurs de voir les Etats-Unis appliquer de nouvelles sanctions à l'Iran, cinquième producteur mondial en 2016 selon la CIA, le 4 novembre dans le cadre du retrait de Washington de l'accord sur le nucléaire iranien de 2015. LCI fait également état d'une "forte demande de fioul domestique (quasiment identique au gazole routier) en prévision des baisses de température à venir", qui entraînerait la hausse des prix.
La seconde raison tient à la fiscalité appliquée aux carburants. Celle-ci a augmenté de deux manières : le rattrapage progressif de la fiscalité du gazole sur celle de l'essence et la hausse de la taxe carbone, un prélèvement qui pèse sur les produits énergétiques en fonction de leur émission de dioxyde de carbone.
2Pourquoi tous les carburants augmentent
(et pas seulement le gazole) ?
Un temps favorisé par une taxe inférieure à celle de l'essence, notamment en raison de sa consommation moindre, le diesel a vu sa fiscalité progressivement augmenter à partir de 2015. Une décision prise au nom de la lutte contre la pollution atmosphérique, car "la combustion du carburant produit davantage de particules à l’échappement dans les moteurs diesel que dans les moteurs à essence", rappelle The Conversation. La poursuite de cette politique, qui explique la hausse plus forte des prix du diesel que celle de l'essence, figurait dans le programme du candidat Emmanuel Macron.
Pour autant, l'augmentation de la taxe carbone (appelée officiellement contribution climat énergie) concerne aussi bien l'essence que le gazole. Mise en place en 2014, elle vise à inciter les ménages et les entreprises à modifier leurs comportements pour opter pour des solutions plus écologiques. "Son augmentation est passée relativement inaperçue les premières années, car elle a été compensée par la chute du baril. A la pompe, les automobilistes ne se rendaient pas compte que leur carburant aurait pu être encore moins cher sans taxe carbone", écrivaient Les Echos (article abonnés) en juillet.
Cette contribution est programmée pour augmenter jusqu'en 2022. De 44,60 euros la tonne de CO2, elle passera à 55 euros au 1er janvier 2019. Résultat, l'an prochain, les taxes sur le gazole augmenteront de 6,5 centimes par litre, dont 2,6 centimes de rattrapage par rapport à la fiscalité de l'essence, et celles sur l'essence de 2,9 centimes.
3Que faire de ma vieille voiture diesel ?
"Je ne nie pas le fait que ce soit difficile pour certains Français qu'on augmente la fiscalité sur le gazole. Mais nous avons 3,8 milliards d'euros de dispositifs d'aide pour accompagner ces Français dans la transition écologique", a défendu la secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, Brune Poirson, au micro de Sud Radio.
"Regardez la fiscalité dans sa globalité. Je ne nie pas que la hausse du gazole soit difficile pour certains Français, mais nous avons 3,8 milliards d'euros de dispositifs d'aides !" @brunepoirson invitée de #SudRadioMatin Son interview ➡ https://t.co/kx998Bsexl pic.twitter.com/ieuGqV5exR
— Sud Radio (@SudRadio) 25 octobre 2018
De fait, le gouvernement a mis en place une prime à la conversion, créée pour aider les ménages à acquérir un véhicule moins polluant. Pour être éligible à cette prime, vous devez mettre au rebut votre véhicule diesel immatriculé avant 2001 (ou 2006 si votre ménage n'est pas imposable) ou votre voiture à essence immatriculée avant 1997.
Si vous achetez parallèlement une voiture électrique d'occasion ou un véhicule non polluant de seconde main, l'Etat vous rembourse 1 000 euros, ou 2 000 euros si vous n'êtes pas imposable. Cette prime peut même grimper à 2 500 euros, quels que soient vos revenus, si vous achetez une voiture électrique neuve.
Ce dispositif rencontre un franc succès : prévu pour 500 000 véhicules maximum sur toute la durée du quinquennat, il devrait faire l'objet de près de 300 000 demandes cette année, rapporte Le Parisien. Près de trois-quarts des demandes concernent des ménages non imposables, et une majorité habite en zone rurale. Face à la grogne concernant la hausse des taxes, un conseiller de Bruno Le Maire a d'ailleurs indiqué à franceinfo que Bercy envisageait de prolonger ce dispositif. "Mais il faudra trouver de quoi financer parce qu’on n'est pas des magiciens, ni des pères Noël !", a-t-il ajouté.
4Comment s'organise la protestation ?
Impossible de prédire l'efficacité de ces méthodes, mais plusieurs appels à la mobilisation ont émergé ces derniers jours. Priscilla Ludosky, une automobiliste en colère originaire de Seine-et-Marne, a lancé en mai une pétition en ligne pour réclamer "une baisse des prix du carburant à la pompe". Quasi confidentiel jusqu'en septembre, son texte connaît un franc succès depuis la parution d'un article du Parisien à son sujet lundi. La pétition recueille désormais près de 200 000 signatures.
Plus radical, des appels à bloquer les routes et les autoroutes le 17 novembre prochain se multiplient sur les réseaux sociaux. Une vidéo d'un certain Frank Buhler, qui se présente comme un délégué de circonscription du parti Debout la France dans le Tarn-et-Garonne où il appelle au blocage national "pour exiger une baisse des tarifs de l'essence", a été vue 2,7 millions de fois sur Facebook et était encore largement partagée jeudi.
5Où trouver des prix à la pompe moins élevés ?
Afin de vous aider à trouver où faire votre plein pour dépenser moins, franceinfo a réalisé quatre cartes en utilisant les données recensées par le site officiel prix-carburants.gouv.fr, qui répertorie le prix des différents carburants dans toutes les stations de France métropolitaine depuis le début de l'année.
Ces quatre cartes – une par type de carburant parmi les plus utilisés – présentent les différentes stations en fonction de la moyenne du prix constaté dans votre département au cours de l'année. Dans chaque département, la station la moins chère est ainsi symbolisée par un gros point vert, la plus chère par un gros point rouge. De quoi vous permettre de faire des économies et de vous diriger vers les stations où les tarifs à la pompe ont été durablement constatés comme bas par rapport à la moyenne.
Voici un exemple, avec la carte pour le gazole. Cliquez ici ou sur l'image pour consulter notre article.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.