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Accentuer le contrôle des chômeurs ? "Scandaleux et dérisoire !"

François Rebsamen veut renforcer le contrôle à Pôle Emploi "pour être sûr que les gens cherchent bien" un travail. Pour les associations de défense des chômeurs, la proposition n'est pas à la hauteur des enjeux.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Dans une agence de Pôle emploi à Armentières (Nord), le 27 août 2014. (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

Casser le thermomètre pour faire baisser la fièvre ? Le ministre du Travail François Rebsamen a demandé mardi 2 septembre à Pôle emploi de "renforcer les contrôles pour être sûr que les gens cherchent bien un emploi". Et Rebsamen de mettre en avant ce paradoxe : "En France, 350 000 emplois ne trouvent pas preneurs", alors que le pays compte désormais 3,4 millions de chômeurs de catégorie A

Francetv info a interrogé des associations œuvrant aux côtés des chômeurs sur ces propositions. Pour Vincent Godebout, délégué général de Solidarités nouvelles face au chômage, la fraude "existe, on ne peut le nier", mais c'est un "phénomène à la marge""S'il faut renforcer les contrôles, c'est sur cette marge, mais ce n'est pas le cœur du sujet."

Une proposition insultante

Pierre-Edouard Magnan, délégué fédéral du Mouvement national des chômeurs et des précaires, lui, ne décolère pas. Il juge la proposition insultante et hors sujet. "Si on pouvait encore faire de l’humour sur ce sujet, s'emporte-t-il, on soulignerait que François Rebsamen aura beaucoup de mal à contrôler davantage les chômeurs qu’ils ne le sont déjà. Cette mesure est scandaleuse et dérisoire."

"La vie d’un chômeur à Pôle Emploi est déjà très compliquée, ça va empirer, ajoute-t-il. On voit vers quelle direction le ministre va s’orienter : vers la généralisation d'une expérience menée par Pôle Emploi dans plusieurs régions, avec des équipes dédiées au contrôle de la recherche d'emploi des chômeurs. On en revient au fameux 'classes laborieuses, classes dangereuses' : les chômeurs sont au mieux des fainéants, au pire des coupables."

350 0000 emplois non pourvus ? "On est loin du compte"

Le représentant du Mouvement national des chômeurs et des précaires estime en outre qu'invoquer le chiffre de "350 000 emplois non pourvus" relève de la malhonnêteté intellectuelle. "Dans ces emplois, il y a tout et n’importe quoi, explique-t-il. Si vous proposez deux heures de ménage par semaine, c’est une offre d’emploi, mais ça ne suffit pas à faire vivre quelqu'un."

Le chiffre, dit-il, est "dérisoire" par rapport à l'ampleur du problème. "Même s'il s'agissait réellement d'emplois à temps complet, qu’est-ce que ça représente par rapport aux 3,4 millions de chômeurs de catégorie A ? Par rapport aux plus de cinq millions de chômeurs recensés, toutes catégories confondues ? On reste extrêmement loin du compte."

La fraude n'est pas l'enjeu principal

Sur la question des 350 000 emplois "qui ne trouvent pas preneurs", Vincent Godebout a une autre réaction. Partant du constat que "les Français ne sont pas mobiles", l'enjeu essentiel, selon lui, pour l'année 2014-2015 "devrait être de renforcer la formation au plus près des régions pour permettre aux entreprises de trouver rapidement les salariés dont elles ont besoin".

Autre point sur lequel il est important d'agir, le développement de ce qu'il appelle le "réseautage de proximité". Et le représentant de Solidarités nouvelles face au chômage d'expliquer : "Quand une TPE [très petite entreprise] recrute quelqu'un, c'est qu'elle le connaît." Beaucoup "trop éloigné des PME qui sont aujourd'hui les principaux créateurs d'emploi", Pôle emploi devrait, juge-t-il, s'investir davantage dans un "rôle d'interface".

"Qu'un ministre socialiste propose ça, c'est du délire"

Pierre-Edouard Magnan conclut sur une note plus politique : "Qu’un gouvernement socialiste propose ça, c’est du délire. Qu’auraient dit sous Nicolas Sarkozy les députés socialistes, de Manuel Valls à Jérôme Guedj, si Xavier Bertrand, alors ministre du Travail, avait fait une proposition pareille ?", s'interroge-t-il. 

"Il n’y aura pas de création d’emplois sans nouveau partage des richesses et partage du travail, plaide-t-il. C’est sûr, si on invente le travail à un euro de l’heure comme en Allemagne, on crée des emplois. Là-bas, ils ont fait le choix d’accroître la pauvreté pour diminuer le chômage."

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