Cet article date de plus de six ans.

Entretien inutile, manque d'humanité, offre d'emploi décalée... Ces chômeurs qui ne supportent plus Pôle Emploi

Le gouvernement s'attaque, jeudi, au dossier sensible de l'assurance chômage. La mesure envisagée pour durcir le contrôle des chômeurs ne passe toujours pas, alors que de nombreux allocataires dénoncent des offres d'emploi inadaptées.

Article rédigé par Raphaël Ebenstein - Edité par Alexandra du Boucheron
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3 min
Dans une agence Pôle Emploi du 19e arrondissement de Paris en novembre 2017. (THOMAS PADILLA / MAXPPP)

La première réunion de négociations sur la réforme de l'assurance chômage est prévue jeudi 11 janvier au siège du Medef. Cette réforme est l'une des promesses de campagne d'Emmanuel Macron. Patronat et syndicats ont plusieurs sujets chauds, voire explosifs, à régler comme le renforcement du contrôle des chômeurs, alors que des allocataires estiment que beaucoup d'offres ne sont pas adaptées à leur situation.

Il est question de réduire les indemnités de moitié, voire de les supprimer, en cas de refus de deux offres d'emploi ou d'une formation. Près de 3 millions d'offres d'emploi ont été pourvues via Pôle Emploi en 2016, selon les dernières statistiques disponibles en la matière. 

"Je pense qu'ils se sont trompés de dossier"

"Au niveau des offres, j'ai eu un peu de tout, raconte Stéphane, ancien rédacteur pour des collectivités locales en région parisienne, que l'on a fait passer de la communication au maintien de l'ordre : "On m'a dit : 'On va vous mettre sur une plateforme à faire du phoning ou sur une plateforme logistique parce que vous avez une bonne communication écrite et orale.' On m'avait proposé il y a quelques années aussi d'être gardien de la paix !", se souvient-il.

Même type de mauvaise expérience pour Marylène, 23 ans, tout juste diplômée d'école de journalisme. "Une fois, j'ai reçu un sms, mais je pense que c'était une erreur parce que ça me proposait d'être bouchère. Je pense qu'ils se sont trompés dans les dossiers", suppose la jeune femme, inscrite depuis l'été dernier à Pôle Emploi.

"On n'est pas bête"

Et ce n'est pas le seul motif de récrimination qui revient. Nathalie a beaucoup déménagé au gré des mutations de son mari. Elle a multiplié les postes d'assistante et de responsable commerciale, mais aussi les périodes de chômage. "J'ai eu un entretien pour nous expliquer comment fonctionnait le site de Pôle Emploi !, indique cette quadragénaire. L'entretien a duré une heure et demi. On n'est pas bête. On sait très bien comment marche un site internet."

Un entretien qui ne servait strictement à rien, qui n'a abouti strictement à rien !

Nathalie, chômeuse

à franceinfo

Ces demandeurs d'emploi montrent qu'ils ont le sentiment d'avoir servi à Pôle Emploi pour alimenter des statistiques, au lieu de recevoir une aide vraiment utile. 

Un conseiller "tellement démuni"

Les chômeurs interrogés pour ce reportage ne se sentent pas bien accompagnés par Pôle Emploi dans leur recherche de travail. Et les quelques exemples sont édifiants : Marylène se souvient de ce jour où elle a craqué nerveusement face à son conseiller : "Je me suis mise à pleurer parce que je venais d'apprendre que je n'étais pas prise pour un poste pour lequel j'avais postulé et pour lequel j'avais eu un entretien. Il était tellement démuni que la seule chose qu'il a trouvé à me dire c'est : 'Oh, mais au moins vous êtes diplômée et avec le charme que vous avez, vous allez trouver du travail.'"

En fait, ils ne savent pas quoi faire. Même l'accompagnement humain, je ne l'ai pas eu.

Marylène, chômeuse

à franceinfo

Quant à Antoine, il ne veut pas accabler son conseiller... qui lui a dit s'occuper d'environ 300 dossiers en même temps. Mais, ce scientifique installé à Tours et inscrit depuis plusieurs années à Pôle Emploi, ne voit pas sa situation s'améliorer, au contraire. "J'ai l'impression que ça s'est plutôt dégradé, dit-il. Je n'ai plus de rendez-vous, on ne me convoque plus pour faire le point sur ma situation, ma recherche d'emploi, sur tout ça."

Ni Antoine, ni Nathalie, ni Marylène, ni Stéphane n'attendent visiblement grand-chose de la prochaine réforme de l'assurance chômage.

Des chômeurs ne supportent plus Pôle Emploi - un reportage de Raphaël Ebenstein

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.