Réforme de l'assurance-chômage : voici ce que contient le texte qui vient d'être adopté définitivement par le Parlement
Le refus à deux reprises en un an d'un CDI après un CDD ou un contrat d'intérim sur le même poste, le même lieu et avec la même rémunération, entraînera la perte de l'indemnisation chômage.
Un texte peut en cacher un autre. Le Parlement a adopté définitivement, jeudi 17 novembre, le projet de loi "portant mesures d'urgence" en vue "du plein emploi", qui ouvre la voie à une nouvelle réforme de l'assurance-chômage en 2023.
Le texte permet au gouvernement de prolonger les règles actuelles de l'assurance-chômage, issues d'une réforme contestée pendant le premier quinquennat Macron. Surtout, il offre la possibilité future d'en moduler certaines règles, par décret, en fonction de la situation sur le marché du travail. Objectif : que l'assurance-chômage soit "plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé", selon la promesse de campagne d'Emmanuel Macron. Les députés et les sénateurs ont par ailleurs amendé le texte avec d'autres mesures, notamment sur les abandons de poste. Franceinfo détaille les principaux points de cette réforme.
Une prolongation des règles actuelles de l'assurance-chômage
L'article 1 du texte vise, dans un premier temps, à prolonger le fonctionnement actuel de l'assurance-chômage, issu de la réforme entrée en vigueur le 1er décembre 2021, au plus tard jusqu'en décembre 2023. En effet, ces règles devaient initialement prendre fin le 1er novembre, avant qu'un décret ne prolonge leur validité jusqu'au 31 janvier 2023, au plus tard.
Une modulation de l'indemnisation chômage selon la conjoncture économique
Surtout, l'article 1 ouvre la possibilité de moduler l'assurance-chômage afin qu'elle soit "plus stricte quand trop d'emplois sont non pourvus, plus généreuse quand le chômage est élevé". Le texte actuel ne fixe pas la forme que prendra cette modulation, qui fait l'objet d'une concertation avec les partenaires sociaux depuis la mi-octobre. Le gouvernement doit dévoiler ces nouvelles règles le 21 novembre, pour une entrée en vigueur, par décret, début 2023.
Le ministre du Travail, Olivier Dussopt, a d'ores et déjà assuré que le gouvernement "ne touchera[it] pas au montant des indemnités", dont les modalités de calcul avaient déjà été revues dans la précédente réforme. De la même manière, les conditions d'affiliation au système d'assurance-chômage ne devraient pas de nouveau être modifiées. La durée minimale permettant de toucher une indemnisation – six mois de travail sur une période de référence de 24 mois – devrait donc rester inchangée. Le gouvernement envisage en revanche de jouer sur "la durée maximale d'indemnisation", actuellement de 24 à 36 mois selon l'âge du demandeur d'emploi allocataire.
L'abandon de poste assimilé à une démission
C'est une disposition, introduite par des amendements de la majorité présidentielle et des députés LR, qui a fait débat. L'abandon de poste sera désormais assimilé à une démission, pour limiter l'accès à l'assurance-chômage. "Le salarié qui a abandonné volontairement son poste et ne reprend pas le travail après avoir été mis en demeure de justifier son absence et de reprendre son poste (…) est présumé avoir démissionné", prévoit le texte.
Jusqu'ici, un licenciement motivé par un abandon de poste ne privait pas le salarié de son droit à bénéficier de l'assurance-chômage. Le gouvernement s'était dit favorable à cet amendement, pointant "un phénomène en augmentation constante". La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) évoque toutefois"un sujet compliqué", sur lequel il n'y a "pas de statistiques" et qui est vécu différemment en fonction de la taille des entreprises.
Un durcissement de l'accès aux indemnités pour les personnes en CDD
Le refus à deux reprises en un an d'un CDI après un CDD ou un contrat d'intérim sur le même poste, le même lieu et avec la même rémunération, entraînera la perte de l'indemnisation chômage. Ce sera à l'employeur d'en informer Pôle emploi, qui vérifiera la compatibilité des refus avec les offres raisonnables d'emploi que le chômeur doit déjà accepter sous peine de sanctions. Cette disposition a été adoptée malgré l'opposition du gouvernement. "Je considère qu'un salarié qui est allé au bout de l'engagement contractuel qu'il a signé n'a pas à être sanctionné", a déclaré le ministre du Travail, début novembre, dans une interview à Ouest-France.
"Le gouvernement n'en voulait pas, mais nous n'avons pas plié", a affirmé la rapporteure LR du texte au Sénat, Frédérique Puissat, auprès de l'AFP. Son homologue à l'Assemblée nationale, le député Renaissance Marc Ferracci, juge de son côté cette disposition "peu opérationnelle et fragile juridiquement", et y voit "une démarche un peu idéologique, même s'il y a un vrai sujet sur le refus de CDI".
La validation des acquis de l'expérience encouragée
Le texte vise en outre à développer davantage le dispositif de validation des acquis de l'expérience, encore peu utilisé. La VAE, créée en 2002, permet d'obtenir une certification professionnelle grâce à la reconnaissance d'une expérience acquise, y compris dans un cadre bénévole. L'objectif du gouvernement est d'atteindre 100 000 parcours de VAE par an, contre 30 000 aujourd'hui, selon le site Vie-publique.fr.
Pour y parvenir, un "service public de la validation des acquis de l'expérience" aura désormais pour mission "d'orienter et d'accompagner" les personnes souhaitant bénéficier de ce mécanisme. Une plateforme numérique sera mise à leur disposition. Par ailleurs, une expérimentation de "VAE inversée" sera lancée pendant trois ans dans les secteurs en tension de recrutement, "en associant la voie de l'alternance et celle de la VAE", détaille le site Vie-publique. Ainsi, les contrats de professionnalisation pourront comporter "des actions en vue de la validation des acquis de l'expérience".
Prolongation du mécanisme de "bonus-malus" pour les entreprises
Enfin, le gouvernement a obtenu la possibilité de prolonger par décret, jusqu'au 31 août 2024, le dispositif de "bonus-malus" sur les cotisations patronales d'assurance-chômage. Créé en 2019 et entré en application en septembre 2022, il vise à "inciter les entreprises de plus de 11 salariés à proposer des contrats de travail plus longs et à privilégier les embauches en CDI plutôt que les contrats courts", résume le site de Pôle emploi.
Ce système concerne les entreprises de sept secteurs qui ont fréquemment recours à des contrats courts, comme l'hébergement et la restauration, ainsi qu'aux sociétés de "transports et d'entreposage" ou encore de "fabrication de denrées alimentaires, de boissons et de produits à base de tabac".
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