Un moratoire demandé sur les trop-perçus réclamés aux chômeurs
Des associations sont reçues par le ministre du Travail au sujet de ces sommes versées par erreur et qui doivent être remboursées.
Un mois après l'immolation par le feu d'un demandeur d'emploi qui devait rembourser une somme perçue indûment à Pole emploi, des associations de défense des droits des chômeurs veulent alerter le ministre sur ce problème "central" que constituent les "trop-perçus". Reçues vendredi 15 mars par le ministre du Travail, Michel Sapin, elles demandent un "moratoire" sur ces sommes versées par erreur par Pôle emploi puis réclamées ensuite aux demandeurs d'emploi.
Les trop-perçus : des "erreurs de bonne foi"
Les trop-perçus sont à distinguer des fraudes avérées. Pôle emploi considère qu'il s'agit d'"erreurs de bonne foi", imputables à ses agents ou aux chômeurs. Dans 80% des cas, ces "allocations indûment perçues" proviennent de courtes périodes de travail, en intérim notamment, non déclarées, ou déclarées trop tard, par les demandeurs d'emploi. D'autres fois, ces "indus" sont causés par une méconnaissance des règles. Il arrive aussi que Pôle emploi commette des erreurs lors du calcul des droits à indemnisation.
Les indus représentent "2,5% à 3% des allocations versées, un ratio à peu près stable sur 10 ans", selon l'Unedic, l'organisme paritaire qui gère l'assurance-chômage. Fin janvier 2013, environ 300 millions d'euros versés par erreur n'avaient pas été recouverts.
Un "cauchemar" pour les chômeurs
Les trop-perçus constituent un problème "central", selon les associations de défense des demandeurs d'emploi. Elles dénoncent leurs "conséquences catastrophiques"."On demande que soit pris le temps de réexaminer les dossiers, car, dans une famille de chômeurs, [le trop-perçu], c'est de l'argent dépensé : tout va à la nourriture ou à la résorption des dettes", argumente Malika Zediri, de l'Association pour l'emploi, la formation et la solidarité des chômeurs et travailleurs précaires (Apeis).
"Il y a des situations ubuesques, avec parfois des conséquences dramatiques", regrette Colette Pronost, du syndicat SNU. Pour elle, le cas du demandeur d'emploi de Nantes, qui était en train de rembourser un indu quand il s'est suicidé, n'est que "la face émergée de l'iceberg". L'explosion des "petits boulots" et de leur cumul avec une allocation, le manque de formation des agents et l'accumulation de dossiers, alors que le chômage est en hausse depuis 21 mois, sont en cause. Rose-Marie Péchallat, de l'association Recours-radiation, estime quant à elle que "ces trop-perçus sont devenus le cauchemar des chômeurs".
Jusqu'à 10 000 euros réclamés
Les permanences et les forums internet des associations regorgent de témoignages de détresse de personnes à qui on réclame des sommes pouvant atteindre plusieurs milliers d'euros, jusqu'à 10 000 euros, parfois plus d'un an après les faits. Christine, par exemple, a raconté sur Europe 1 s'être vu réclamer 4 700 euros.
Selon l'Unedic, les demandeurs d'emplois peuvent bénéficier d'échanciers pour rembourser et certaines dettes peuvent parfois être effacées par Pôle emploi (en-dessous de 650 euros) ou des instances paritaires régionales. Mais les chômeurs ne sont pas toujours informés de ces possibilités.
Une pression croissante pour récupérer les indus
Selon une note interne consultée par l'AFP, Pôle emploi s'est récemment engagé dans un "plan d'action pour l'amélioration du taux de recouvrement des indus". La "cible" est fixée à 68% de dettes soldées, alors que le taux a baissé au fil de 2012 (65% en octobre, contre 72,4% en janvier). Un "guide", diffusé en février aux managers d'agences, vise ainsi à "développer une culture autour des enjeux du recouvrement des indus".
Depuis peu, en Rhône-Alpes et en Aquitaine, certains demandeurs d'emploi reçoivent des SMS les enjoignant de rembourser leurs créances. Une méthode qui fait hurler syndicats et associations. Le médiateur de Pôle emploi prépare actuellement un rapport sur le sujet, qu'il espère présenter "avant l'été". "Un indu, ça se rembourse, la question n'est pas là. Mais demander de rembourser à des gens qui n'ont rien, c'est dramatique."
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