"Déflagration", "complètement incohérent" : les réactions de la filière laitière après l'annonce de la réduction de la collecte de lait en France par Lactalis

Lactalis a annoncé, mercredi, qu'il allait réduire sa collecte en France à partir de la fin de l'année.
Article rédigé par franceinfo
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Le logo Lactalis sur un batiment à Laval (Mayenne). (JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP)

Des producteurs de lait de l'est et de l'ouest de la France s'inquiètent de leur avenir. Lactalis annonce la réduction progressive de près de 9% de ses volumes de lait collectés en France à partir de la fin de l'année. Le géant laitier veut se retirer des marchés internationaux pour mieux se concentrer sur la France, une décision qui choque les agriculteurs.

Des dizaines de producteurs de lait vont perdre leur contrat avec Lactalis. Une décision unilatérale qui met en colère le président de la FNSEA, premier syndicat agricole de France, Arnaud Rousseau : "Quand on parle de souveraineté alimentaire, de capacité à produire - et c'est ce qu'on porte depuis plus d'un an maintenant - on a un exemple très concret, qui est une déflagration pour le milieu laitier, qu'on a besoin de continuer à se battre pour produire singulièrement du lait." Dans le détail, 272 agriculteurs sont concernés. Une centaine en Vendée et le reste dans quatre départements de l'est : la Haute-Marne, la Marne, les Vosges et la Haute-Saône.

"Lactalis a toujours refusé de faire des contrats collectifs"

La fédération nationale des producteurs de lait l'a appris mercredi 25 septembre sans concertation. Yohann Barne en est le président et il se sent impuissant : "On ne peut jamais s'opposer puisque c'est un contrat qui lie les industriels avec les producteurs de lait et Lactalis a toujours refusé de faire des contrats collectifs. Ce sont des contrats individuels donc chaque producteur va recevoir dans sa cour de ferme le courrier lui annonçant qu'à telle date Lactalis ne collectera plus. Nous, on s'est déjà organisés à la FNPL pour accompagner les producteurs et surtout n'en laisser aucun sans solution, sur le bord d'une route, ce qui serait impossible pour eux." C’est-à-dire tenter de trouver des débouchés, les producteurs concernés ont donc quelques mois. La coopérative laitière Unicolait perd également son contrat, mais elle a 5 ans pour se retourner. Les producteurs demandent au moins d'aligner les délais.

Lactalis décide de réduire le volume de lait collecté parce qu'il veut se retirer des marchés internationaux. C'est pour cela qu'on parle de lait d'excédent : 5 milliards de litres par an produits en France, mais vendu à l'étranger. Il est transformé en poudre le plus souvent pour l'export. Le prix est fixé en fonction des courts mondiaux, donc très volatiles.

"Complètement déconnecté de la réalité"

Lactalis veut réduire de 450 millions de litres chaque année. Yohann Serreau, président de l'Unell, l'union nationale des éleveurs livreurs Lactalis, comprend cette stratégie. C'est lui qui fixe le prix du lait avec le groupe laitier en France : "Le marché des ingrédients, c'est quand même un marché très volatil. C'est parfois très haut, mais le plus souvent, c'est très bas. Donc stratégiquement ce n’est pas inentendable, toutefois en France il y a des besoins en lait parce qu'il y a des beaux produits qui sont fabriqués et d'autres entreprises ont besoin de lait. Donc baisse de collecte ne veut pas dire baisse de production."

En revanche, il ne comprend pas pourquoi des éleveurs sont ciblés : "C'est complètement incohérent et de l'imposer au producteur, c'est complètement déconnecté de la réalité de ce qu'est l'agriculture aujourd'hui. Ce qu'on demande, c'est qu'ils revoient leurs plans. S’ils élargissent les zones, il y a des producteurs qui vont être volontaires parce qu'ils vont trouver d'autres débouchés, d'autres clients. Vous avez des coopératives et puis des privés qui eux ont besoin de lait et l'annoncent. Ils recherchent des producteurs pour pouvoir fournir leurs clients finaux."

D'autant plus que Lactalis ne veut pas revoir la rémunération des éleveurs. Le prix est relativement haut en ce moment, autour de 450 euros les 1 000 litres : "En théorie mathématiquement, le prix du lait doit augmenter s'il y a une baisse de collecte de Lactalis et on n'a pas eu de garanties. Aujourd'hui, les propositions qui sont sur la table de Lactalis sont les propositions d'un industriel qui ne regarde que ses intérêts et pas ceux de la filière et des producteurs." Yohann Serreau va multiplier les réunions pour obtenir gain de cause.

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