Reportage Les éleveurs en Haute-Saône appelés à tuer les loups : "On ne peut pas inviter les éleveurs à se mettre dans l'illégalité", réagit la ministre de l'Agriculture

Annie Genevard était au sommet de l’élevage de Cournon alors que le président des agriculteurs de Haute-Saône a appelé les éleveurs de son département à "sortir armés" et à "taper" des loups afin de protéger leurs troupeaux.
Article rédigé par Edouard Marguier
Radio France
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La ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, au sommet de l'élevage à Cournon dans le Puy-de-Dôme, le 3 octobre 2024. (MARIE JULLIARD / HANS LUCAS / VIA AFP)

Elle avait annoncé ce déplacement au moment de sa prise de fonction. La ministre de l’Agriculture Annie Genevard s'est rendue au sommet de l’élevage de Cournon, près de Clermont-Ferrand, dans le Puy-de-Dôme. Elle a annoncé qu’un fonds d’indemnisation pour les éleveurs confrontés à la fièvre catarrhale ovine, cette épizootie qui décime les élevages de moutons et de brebis. Le Premier ministre doit présenter les détails vendredi. Mais la nouvelle ministre a été interpellée sur un autre sujet d’inquiétude : le loup.

Le sujet est relancé depuis le récent courrier du président de la chambre d’agriculture de Haute-Saône qui demande aux éleveurs de "sortir armés" pour "taper un loup". L’auteur de cette lettre, Thierry Chalmin, n’est pas présent au sommet de l’élevage mais son appel à la désobéissance civile, comme il l’a dit dans la presse, est soutenu par de nombreux éleveurs. "Je comprends qu'on arriverait presque à financer des opérations annexes pour gagner en efficacité, déclare Michel Pelestor qui vient de Digne-les-Bains dans les Alpes-de-Haute-Provence. Il y a beaucoup d'éleveurs qui se sont équipés et quand on met 10 000 euros dans une arme alors qu'on pourrait les mettre dans la génétique, c'est qu'on a passé le cap."

"On est sur 600 attaques dans le département, et nous, on doit avoir une vingtaine d'attaques annuelles. On perd à peu près 150 brebis. On n'est pas payés pour trouver des cadavres, on est là pour s'occuper des moutons."

Michel Pelestor, éleveur dans les Alpes-de-Haute-Provence

à franceinfo


Il y a également eu ce tract cet été en Haute-Vienne de la Coordination rurale, troisième syndicat agricole, qui offre 1 000 euros pour chaque loup tué. La ministre Annie Genevard comprend la colère mais appelle au calme : "Je pense que ce n'est pas du tout la bonne façon d'approcher le sujet. Je comprends ce qui la motive, mais je pense que les choses doivent se traiter différemment et dans le respect. Je dis que les agriculteurs qui feraient cela se mettraient en défaut vis-à-vis de la loi parce que c'est illégal. Donc on ne peut pas inviter les agriculteurs à se mettre dans l'illégalité." Ils risqueraient jusqu'à trois ans de prison et 150 000 euros d’amende.

La présence du loup - un millier en France actuellement - inquiète également pour l’avenir du pastoralisme. Christine Valentin en charge de la question pour le massif central interpelle la ministre. Selon elle, l'élevage en pâturages naturels souffre : "Aujourd'hui, la meilleure solution pour protéger les ovins, c'est de les rentrer à la bergerie. Ça a un effet très néfaste sur le pastoralisme et c'est un sujet très fort."

"Personne ici ne dit qu'il faut éradiquer le loup, je voudrais juste tordre le cou aux idées reçues et aux simplifications, rappelle la ministre. Simplement, il faut donner aux éleveurs la possibilité de vivre de leur travail. Ce qui s'est passé au niveau de l'Union européenne avec l'accord des États membres, est tout de même une avancée considérable." L'Union européenne veut passer d'une "protection stricte" à une "protection simple", qui permettrait d'éliminer plus facilement les loups mais cela doit être encore confirmé.

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