: Vidéo Amiante : une loi inapplicable à la campagne ?
A l’Oeil du 20h, nous avons dû nous protéger de l’amiante en pleine campagne. La cause ? Ces bâtiments des années 70 laissés à l’abandon. La loi oblige leurs propriétaires à les désamianter. Mais bien souvent, ils n’en ont pas les moyens : le prix des travaux a explosé. Et quand personne ne peut payer, l’amiante cancérigène reste à l’air libre...
A Méhers, dans le Loir-et-Cher, des milliers de poussins étaient jadis élevés en batterie, dans les hangars de la commune. Aujourd’hui, les poulaillers ressemblent à de vieilles granges décrépies, à l’abandon. Et couverts de plaques amiantées en fibrociment, typiques des bâtiments construits dans les années 70.
Désamianter ? Trois fois le budget de la commune !
Pour le confirmer, nous avons fait appel à Jérôme Pecon, spécialiste en diagnostic amiante chez Expert Habitat. ”On peut retrouver de l’amiante au niveau de la toiture et au niveau des murs, explique-t-il derrière son masque et sa combinaison protectrice. Ici c’est dans un très mauvais état, ça a commencé à se détériorer, on le voit, il y a des morceaux d’amiante qui sont tombés au sol.” Dans son viseur : les morceaux de toit ou de mur qui peuvent dégager de l’amiante quand ils se dégradent. “L’amiante, une fois qu’elle s’est échappée, est dans l’air. Si elle est respirée, il y a un risque de cancer.”
Le volailler qui exploitait ce site a fait faillite en 1999. La préfecture se tourne alors vers le maire pour désamianter. Il commande un devis. Hors de prix. “C’était 25 à 30 000 € minimum par poulailler, révèle François Charbonnier, maire (divers droite) de Méhers. Soit au bas mot : 600 000 € à débourser, trois fois le budget de la commune !
Cinq intervenants qui font flamber la note
Si le désamiantage coûte cher, c’est surtout à cause de la réglementation. Depuis l’interdiction de l’amiante en 1997, l’État multiplie les textes pour mieux protéger la population de ce matériau nocif.
Conséquence : pour désamianter un bâtiment, de plus en plus de spécialistes doivent intervenir. “On est en général cinq : le diagnostiqueur, le laboratoire, le coordinateur sécurité, l’entreprise de désamiantage et le transporteur de déchet, énumère Azzedine El Bied, gérant de l'entreprise de désamiantage Altatech. Chaque intervenant facture sa prestation et c’est le client final qui supporte le coût.”
Un coût qui a dissuadé Gabriel Sergent. A 80 ans, cet éleveur breton à la retraite ne sait plus quoi faire de son ancienne étable dont le toit amianté s’est effondré. Pour respecter la loi, il est censé faire désamianter puis retirer les débris qui jonchent le sol. “Je ne suis pas chaud pour dégager ça de là si c'est de ma poche !” réagit-il. Coût estimé des travaux : 8100 €, soit dix fois le montant de sa retraite.
Le ministère de l’Agriculture a annoncé en 2014 un plan pour aider les éleveurs à financer les travaux. Pas certain que le message soit passé : la chambre d’agriculture de Bretagne n’en a jamais entendu parler...
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