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Mobilisation des juges et des avocats : "Le justiciable va être le premier à pâtir de ces réformes", selon un syndicat de magistrats

Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des magistrats, a expliqué, jeudi sur franceinfo, les motivations des avocats, juges et greffiers à se mobiliser contre la réforme engagée par la garde des sceaux Nicole Belloubet.

Article rédigé par franceinfo
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Des avocats devant le palais de justice de Paris, le 26 janvier 2018. (JACQUES DEMARTHON / AFP)

Les avocats, les juges et les greffiers sont appelés à se mobiliser, jeudi 15 février, contre la réforme engagée par la garde des Sceaux Nicole Belloubet. Pour Virginie Duval, présidente de l'Union syndicale des magistrats (USM), cette réforme va "éloigner le juge" du justiciable qui sera "le premier à en pâtir". Nicole Belloubet avaient annoncé début octobre le lancement d'une vaste consultation visant à préparer une réforme judiciaire fondée sur cinq grands chantiers : le numérique, la procédure civile, la procédure pénale, l'efficacité des peines et l'organisation territoriale.

franceinfo : Vous dénoncez la méthode employée par la garde des Sceaux, que lui reprochez-vous ?

Virginie Duval : On a eu une pseudo-concertation depuis plusieurs mois, mais on sait de toute façon où vont mener ces concertations puisque ces projets étaient déjà dans le programme présidentiel. On a des réformes à visée purement gestionnaire. Et c'est cela qui est contesté aujourd'hui.

Comme la réforme de la carte judiciaire ?

La carte judiciaire, effectivement, c'est se conformer à une gestion sans prendre en compte la question de l'accessibilité de la justice, de la cohérence et de la lisibilité pour le justiciable. Il y a donc beaucoup de contestation parce que le justiciable sera le premier à pâtir des réformes qui se profilent.

Vous estimez aussi que c'est la suppression annoncée des tribunaux d'instance.

Les tribunaux d'instance sont les tribunaux de proximité par excellence. Ce sont ceux qui fonctionnent le mieux. On a les meilleurs délais dans ces tribunaux et ils sont accessibles pour les personnes les plus fragiles. On est vraiment dans la justice de proximité, c'est la justice du quotidien. Et c'est cette justice là qu'on veut dissoudre dans le reste en créant des juridictions éloignées et extrêmement spécialisées. La campagne présidentielle parlait d'un tribunal judiciaire par département, cela veut dire éloigner la justice pour le justiciable. On nous dit parallèlement qu'il n'y aura aucune fermeture de site, peut-être, mais les juridications seront vidées de leur substance. Ce seront des magistrats et des greffiers volants qui risquent d'aller rendre la justice un peu comme cela se déroulait il y a 150 à 200 ans.

Est-ce que vous reprochez au président de la République d'être déconnecté de la réalité des justiciables français ?

Clairement, on a des justiciables qui sont en forte demande de justice et on devrait pouvoir répondre à leurs attentes. Actuellement, on a une justice lente qui n'a pas assez de moyens humains. Il y a deux fois moins de juges que la moyenne européenne, quatre fois moins de procureurs en France que la moyenne européenne et deux fois moins de greffiers. Forcément, les justiciables sont mécontents de leur justice. On ne peut pas répondre aux attentes des justiciables et pourtant ils ont besoin d'accéder aux juges.

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