Prêtre tué en Vendée : "Pas de dysfonctionnement particulier" de la justice, selon la présidente de l'Union syndicale des magistrats
Le suspect, placé en détention provisoire après l'incendie de la cathédrale de Nantes, en juillet 2020, avait été libéré et placé sous contrôle judiciaire. La justice n'a pas les moyens de mener un procès assez rapidement, rappelle Céline Parisot.
"Je ne vois pas de dysfonctionnement particulier" de la justice, "toutes les procédures ont été respectées", déclare Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistrats, mardi 10 août sur franceinfo, après le meurtre d'un prêtre la veille à Saint-Laurent-sur-Sèvre, en Vendée, par le principal suspect dans l'enquête sur l'incendie de la cathédrale de Nantes, en juillet 2020. "Le risque zéro n'existe pas. Il y aura toujours des drames, des gens qui passeront à l'acte de manière totalement inattendue, même si c'est extrêmement dur à entendre", poursuit-elle, estimant toutefois que les "délais d'organisation des procès en France sont extrêmement longs, beaucoup trop longs".
franceinfo : Cet homme était en liberté après avoir passé dix mois en détention provisoire dans le cadre de l'enquête sur l'incendie de la cathédrale de Nantes. Est-ce habituel ?
Céline Parisot : C'est tout à fait habituel, puisque le principe, quand vous êtes présumé innocent et en attente de votre procès, c'est que vous devez être libre. La loi dit que la personne doit être libre. On peut mettre quelques mesures de contraintes, un contrôle judiciaire voire une assignation à résidence sous surveillance électronique, et en tout dernier recours, la détention provisoire, mais c'est vraiment la mesure qui doit être évitée. À plusieurs reprises, la justice s'est faite taper sur les doigts parce qu'il y a trop de monde en détention provisoire. Donc, il est normal quand une personne est en détention provisoire de chercher à l'en faire sortir.
Qu'est ce qui peut décider de ce changement de situation : dix mois de détention provisoire, puis après on sort.
Malheureusement, ce qui peut motiver cette décision est l'impossibilité d'organiser rapidement un procès.
"La détention provisoire est encadrée dans des délais. Au bout d'un certain nombre de mois, il est nécessaire de la lever si vous ne pouvez pas juger la personne tout de suite."
Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistratsà franceinfo
Ensuite, la remise en détention peut intervenir pour plusieurs raisons, notamment une nouvelle infraction, si la personne remise en liberté fait pression sur des témoins ou si elle détruit des preuves. Mais, en général, quand une personne est libérée, si elle se comporte correctement, il n'y a pas de remise en détention avant le procès.
Pourquoi cet homme était sur le sol français ? Certains disent qu'il aurait dû être expulsé étant donné qu'il a fait l'objet de trois OQTF, des obligations de quitter le territoire français.
Cela dépend de l'autorité préfectorale. Le préfet peut décider ou pas de mettre à exécution un arrêté d'expulsion. Néanmoins, quand il y a une procédure judiciaire en cours, que la personne est en attente de son procès, sous contrôle judiciaire ou en détention provisoire, le principe est qu'on ne renvoie pas la personne dans son pays. Le judiciaire prime.
L'incendie de la cathédrale de Nantes a eu lieu il y a plus d'un an. Pourquoi en est-on arrivé là un an plus tard ?
Avoir un procès d'une affaire aussi importante sous un an, en France aujourd'hui, avec les moyens de la justice, ce n'est pas possible. Nous n'avons pas la possibilité de dégager des moyens humains et matériels pour enquêter si rapidement sur un incendie, qui est quand même d'une certaine ampleur.
"Les délais d'organisation des procès en France sont extrêmement longs, beaucoup trop longs."
Céline Parisot, présidente de l'Union syndicale des magistratsà franceinfo
Ça peut aller de la comparution immédiate, à jusqu'à dix ans après les faits. Mais je ne vois pas de dysfonctionnement particulier. Il y a malheureusement un drame, ce meurtre, mais je ne vois pas de dysfonctionnement dès lors que toutes les procédures ont été respectées. Le contrôle judiciaire était en cours, il n'est pas indiqué que le suspect cherchait à s'y soustraire. Aujourd'hui, le délai d'instruction d'un an après des faits d'incendie volontaire ne me parait pas délirant. Il y aura toujours des drames, des gens qui passeront à l'acte de manière totalement inattendue, et il y aura toujours des victimes, même si c'est extrêmement dur à entendre.
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