Rapport annuel d'Oxfam sur les inégalités : "Elles ne font pas qu'augmenter, elles s'accélèrent", d'après le porte-parole de l'organisation
"En 2021, des milliardaires se sont plus enrichis en l'espace d'un an, que sur la dernière décennie", a affirmé lundi sur franceinfo, Quentin Parrinello, porte-parole d'Oxfam France.
"Les inégalités ne font pas qu'augmenter, elles s'accélèrent puisque pour la première fois depuis 25 ans, on a une augmentation simultanée de l'extrême richesse et de l'extrême pauvreté à travers le monde", a détaillé lundi 16 janvier sur franceinfo Quentin Parrinello, porte-parole d'Oxfam France. L'organisation internationale publie son rapport annuel sur les inégalités alors que s'ouvre le forum économique de Davos (Suisse). "63% des richesses créées depuis deux ans sont captées par les 1% les plus riches", assure le porte-parole qui ajoute : "C'est plus que sur la dernière décennie." Toujours d'après lui, "ces inégalités sont le résultat de choix politiques [...] On a besoin d'une meilleure répartition des richesses."
franceinfo : Parmi les conclusions du rapport d'Oxfam, on retrouve le fait que deux tiers des richesses mondiales produites depuis 2020 ont été captées par les plus riches ?
Quentin Parrinello : Ce que montre ce rapport c'est que les inégalités ne font pas qu'augmenter, elles s'accélèrent puisque pour la première fois depuis 25 ans on a une augmentation simultanée de l'extrême richesse et de l'extrême pauvreté à travers le monde. 63% des richesses créées depuis deux ans sont captées par les 1% les plus riches. C'est plus que sur la dernière décennie. Dans le même temps, il y a des dizaines de millions de personnes en plus qui ont basculé dans l'extrême pauvreté à la faveur de ces successions de crises qu'on a vécues : crise Covid, crise climatique, crise de la vie chère. À tel point qu'aujourd'hui la Banque mondiale nous dit que l'objectif de mettre fin à l'extrême pauvreté d'ici 2030 est probablement désormais inatteignable.
Comment cette accélération de l'extrême richesse s'explique-t-elle ?
Pour l'extrême richesse, c'est notamment concentré au niveau des milliardaires. Pendant la crise du Covid, on a injecté des centaines de milliards d'euros d'argent public dans les marchés financiers. Cet argent a très largement été capté par les milliardaires, de telle manière qu'en 2021 on a eu des milliardaires qui se sont plus enrichis en l'espace d'un an, un an et demi, que sur la dernière décennie et cela provoque une augmentation de richesses sans précédent.
Quelle est la conséquence de cette extrême concentration des richesses ?
Elle est double. Premièrement, on a des gouvernements qui ont beaucoup dépensé d'argent pour faire face à la crise et aujourd'hui les gouvernements sont face à un choix : à qui vont-ils faire payer la facture ? Soit aux plus riches qui se sont enrichis grâce à l'intervention publique, soit aux autres. Malheureusement, pour le moment les gouvernements font plutôt le choix de faire payer la facture aux plus précaires. Deuxièmement, il y a un enjeu d'ordre démocratique. On a un affaissement de la démocratie avec cette concentration des richesses toujours plus forte détenue par quelques-uns et cela pose des problèmes de fractures au sein d'une société déjà très facturée.
Est-ce que c'est une tendance de fond qui va se poursuivre dans les prochaines années ?
On a un énorme risque. Dans les prochaines années, trois gouvernements sur quatre prévoient de réduire les dépenses de santé, d'éducation ou de protection sociale. Cela devrait représenter environ 7 500 milliards d'euros d'économie. Pourquoi est-ce que ça nous inquiète ? Parce que c'est une manière de faire payer la facture de la crise aux plus précaires. Si on a eu des dizaines de millions de personnes qui ont basculé dans la pauvreté pendant la crise c'est précisément parce que ces personnes n'avaient pas de protection sociale assez forte ou de système de santé d'assez bonne qualité et qu'elles risquaient déjà de basculer dans la pauvreté. Si on affaiblit encore plus ces filets de sécurité, on risque d'exacerber la pauvreté et les inégalités.
Ce qu'on montre, c'est que ces inégalités sont le résultat de choix politiques. Lorsqu'on prend la position de ne pas taxer les plus riches, on les laisse avoir une concentration de richesses de plus en plus forte.
Quentin Parrinello, porte-parole d'Oxfam Franceà franceinfo
On montre qu'en mettant en place des impôts sur les plus fortunés, on serait capable non seulement d'avoir une réponse à la crise mais aussi d'avoir des réponses plus structurelles. On a besoin d'une meilleure répartition des richesses. On a un système qui produit des inégalités mais ce n'est pas une fatalité.
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