"Je suis écœuré de l'avoir écouté" : à Amiens, les ex-salariés de Whirlpool attendent Emmanuel Macron avec amertume
En octobre 2017, Emmanuel Macron avait rassuré tout le monde en présentant le projet du repreneur, Nicolas Decayeux. Mais depuis, l'entreprise a été liquidée. Alors qu'une rencontre est prévue avec le chef de l'État vendredi, les anciens salariés sont en colère.
Une "trahison" : voilà comment Emmanuel Schroven a vécu cette reprise. Il a été licencié après 21 ans de carrière chez Whirlpool, il a cru au projet WN de l'industriel picard Nicolas Decayeux et aux promesses d'Emmanuel Macron, en 2017 : "Il nous a dit des choses, tout le monde y a cru aux idées de monsieur Macron et au bout d'un an avec WN, la plupart ont été licenciés. La façon dont il nous a parlé, il nous a bien endormis."
"Livrés à nous-mêmes"
L'ancien salarié compte donc demander des comptes au chef de l'État : Emmanuel Macron rencontre vendredi 22 novembre à Amiens les anciens de l'usine de sèche-linge. La dernière fois qu'ils s'étaient vus, c'était il y a deux ans, après l'annonce de la délocalisation de la production en Pologne.
À ce moment-là, les 282 salariés sont inquiets, le président les rassure et leur présente le projet du repreneur, Nicolas Decayeux. Les 180 personnes reprises doivent fabriquer notamment des box connectées, mais la ligne de production ne démarre jamais. Faute de travail, les salariés s'ennuient, multiplient les formations, entretiennent les espaces verts. Au bout d'un an, WN est en redressement judiciaire. Aujourd'hui, l'entreprise a été liquidée, près de 200 personnes sont sans emploi.
Ce qui m'inquiète le plus ? Ce n'est pas pour nous, c'est pour nos enfants. Parce que plus ça va aller, pire ce sera malheureusement.
Corine Jumel, ancienne salariée de Whirlpoolà franceinfo
"Bien sûr qu'on a des choses à lui dire, confie pour sa part Corine Jumel, 46 ans dont 27 chez Whirlpool, aujourd'hui au chômage. Pour elle, le chef de l'État a des comptes à rendre : "Après tout ce qu'il s'est passé, il disait qu'il serait derrière nous, qu'il ferait attention... Personne n'a fait attention à quoi que ce soit, pendant un an on a été livrés à nous-mêmes."
Colère et écœurement
À 51 ans et après 20 ans chez Whirlpool, Corine Bizet n'a pas retrouvé de travail. "Trop vieille", dit-elle. Elle sera en face d'Emmanuel Macron pour obtenir "des réponses". "Je veux savoir pourquoi il a mis WN dans les pattes des salariés, pourquoi ?"
C'était un coup de pub, pour les élections, pour lui. Mais pour les gens, c'était des promesses en l'air.
Corine Bizet, ancienne salariée de Whirlpoolà franceinfo
Comme la plupart des anciens salariés, Farid Baaloudj, lui aussi au chômage, n'attend plus rien d'Emmanuel Macron. À 44 ans, il a passé la moitié de sa vie chez Whirlpool. Aujourd'hui en colère, il regrette d'avoir cru aux promesses du président : "J'en veux à Emmanuel Macron. Je suis écœuré de l'avoir écouté. Là, on se sent abandonné. C'est du dégoût ! Aux élections municipales, je ne sais même pas si je vais voter, ça ne m'intéresse pas."
"Nous voulons que le président de la République soit démasqué !"
"Les salariés l'ont cru". Fiodor Rilov, l'avocat des salariés licenciés pae Whirpool se fait l'écho de leur immense déception. "Nous voulons que le président de la République soit démasqué ! Il ne peut pas rouler dans la farine des centaines et des centaines de familles qui sont aujourd'hui au chômage et qui n'ont plus que leurs yeux pour pleurer", a réagi le défenseur vendredi sur franceinfo. Les salariés "vont lui demander des comptes et demander au président de la République de leur expliquer comment il a pu venir à deux reprises sur le site pour apporter son soutien à la reprise WN, apporter une véritable explosion d'enthousiasme, dire qu'un miracle industriel allait se produire."
De nombreux anciens salariés de Whirlpool prévoient de descendre dans la rue le 5 décembre prochain, pour ne pas se faire oublier et pour qu'un "tel fiasco ne se reproduise pas".
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