: Vidéo Procès des attentats de janvier 2015 : "Jamais les dessinateurs ne se sont levés pour humilier les musulmans", rappelle Plantu
Alors que s’ouvre le procès des attentats de janvier 2015 qui ont fait 17 morts dont une partie de la rédaction de "Charlie Hebdo", le dessinateur revient sur le long travail de pédagogie qu'il a entrepris avec son association Cartooning for peace, notamment dans les écoles.
"Mon boulot, c'est toujours de dire, partout où je vais, que jamais les dessinateurs ne se sont levés pour humilier les musulmans", a expliqué Plantu, dessinateur de presse au Monde et fondateur de l’association Cartooning for peace, mercredi 2 septembre sur franceinfo, alors que s’ouvre le procès des attentats de janvier 2015 qui ont fait 17 morts dont une partie de la rédaction de Charlie Hebdo. Pour Plantu, "le vrai gros travail" doit être mené à l’école.
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franceinfo : Qu’attendez-vous de ce procès qui débute aujourd’hui ?
Plantu : J'attends une nouvelle pédagogie, mieux comprendre comment on peut, dans les écoles, par exemple, se parler, parler de tout, de la laïcité, des religions, et essayer de comprendre pourquoi dans mon pays, la France, et en Europe, on a de plus en plus de mal à s'exprimer, à dire ce qu'on a vraiment dans le ventre. Il n’y a pas très longtemps, j'étais dans une école et des petits jeunes m’ont demandé : "C’est qui vos modèles, vos maîtres ?" J’ai répondu : "Hergé, le créateur de Tintin, pour moi, c’est un dieu." Et ils m’ont dit : "Qu'est-ce que vous avez dit ? Vous avez dit dieu ? Vous allez mourir !" Cela fait plus de 30 ans que je vais dans les écoles et je vois ça depuis une dizaine d'années.
C’est justement à l’école que le travail doit être mené ?
Oui, je pense que le vrai gros travail, c'est dans les écoles. L'association Cartooning for peace que je dirige, avec des dessinateurs chrétiens, juifs, musulmans, agnostiques ou athées, a de plus en plus de mal à montrer des panneaux de nos expositions où il y a une étoile de David, par exemple. Sur les 11 panneaux qu'on propose, des fois, il y a des panneaux qui sont rangés dans le tiroir. Il y a des choses qu'on ne peut pas dire. On nous dit : "Oui, mais vous savez, c'est trop compliqué."
C’est donc un combat qu’il faut continuer à mener ?
Je dirais même qu'on ne l'a pas mené du tout. N'oublions pas que déjà, quand les dessins du Jyllands-Posten, le journal danois, ont été publiés en 2005 [12 caricatures du prophète Mahomet que Charlie Hebdo avaient republiées en 2006 et republie aujourd'hui], il y a des gens qui n'ont pas compris. Ils ont cru que les Danois voulaient humilier la planète entière. Il y a eu 200 morts au Pakistan, il faut l'avoir en tête. Et donc, il faut à la fois aller dans les écoles, ce que je fais avec mes copains de Cartooning for peace, aller à l'étranger, aller dans le Maghreb, aller à Chypre, aller même aux Philippines pour parler avec les musulmans, pour leur dire : les dessinateurs danois, jamais ils ne se sont levés le matin pour vouloir humilier les musulmans. Or, c'est comme ça c’est compris. Donc, il faut recréer des débats.
La rédaction de Charlie Hebdo a décidé de republier ces caricatures dans son dernier numéro qui paraît ce mercredi. A-t-elle raison de le faire, selon vous ?
Je suis dessinateur, je n'ai pas à dire à un dessinateur ce qu'il doit ou ne doit pas décider. Comme je n'aimerais pas qu'un dessinateur me dise : "Tu dois faire ceci ou faire cela." Et mon boulot, c'est toujours de dire, partout où je vais, que jamais les dessinateurs ne se sont levés pour humilier les musulmans. Il faut juste se parler dans les écoles et ailleurs.
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