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La femme du jour. Catalina Martin-Chico, forte et sensible

Chaque jour, Nathalie Bourrus raconte une femme. Un portrait, mais surtout une rencontre. Aujourd'hui, la photographe Catalina Martin-Chico.

Article rédigé par Nathalie Bourrus
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Catalina Martin-Chico, photographe. (NATHALIE BOURRUS / RADIO FRANCE)

Nom : Martin-Chico. Prénom : Catalina. Age : 48 ans. Métier : photographe. Pourquoi elle ? Parce qu’elle expose la Grande Halle de La Villette, à Paris. Quelques images du festival de photojournalisme Visa pour l’image de Perpignan de cette année sont proposées à Paris (dont les siennes) et on peut les voir jusqu’au 15 octobre. Et les images de la série "Colombie : (Re)Naître" prises par cette photographe franco-espagnole sont des claques. Ce sont les femmes des Farc en Colombie.

La femme du jour Catalina Martin-Chico

C’est un thème mystérieux non ? On ne connait rien de leur vie.

Presque rien. On sait qu’elles arrivaient vers l’âge de 11, 12, 13 ans dans les camps des Farc. Qu’elles changeaient de lieu sans arrêt. Qu’elles vivaient dans la jungle. Qu’elles devaient oublier leur passé, et même leur nom. Mais on sait peu qu’elles n’avaient pas le droit de tomber enceinte.

Hein ? Mais ça a dû arriver ?

Bien sûr. Mais des infirmières passaient tous les mois les piquer, avec des contraceptifs. Donc, ça n’arrivait pas trop.

Mais ça arrivait.

Oui. J’ai rencontré des femmes qui ont accouché, et qui ont dû abandonner leurs bébés. Certaines ont pu être en contact avec leurs mères. C’est leurs mamans qui récupéraient, et ont élevé les enfants. J’ai pu photographier des retrouvailles 20 ans après.

[Les images sont d’une force, à l’égale de la sensibilité de Catalina Martin-Chico. Depuis 10 ans, elle photographie des scènes, et elle entre littéralement dans le sujet. Elle est avec ses "personnages", comme elle dit. Catalina vit l’histoire, et elle nous attire dans ce récit.]

C’était très fort pour moi, ces rencontres. Elles ont eu lieu dans les zones transitoires, les villages bâtis après la déclaration de paix en Colombie. Les récits les plus poignants sont sans doute ceux des femmes qui ont dû avorter dans la jungle. Parfois enceinte de six mois. Et enterrer les petits corps.

[La voix de Catalina se trouble. Mais son sourire éclatant, digne des plus fières madones latinas, revient illico.]

Il y a des histoires merveilleuses. Le baby-boom. Depuis la paix, les femmes font des enfants avec leurs mecs des Farc. Et ça, c’est la belle histoire.

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Un mot pour la définir ? Loyale. Elle est la première photographe à être allée au Yémen, couvrir la guerre. Elle y est retournée sans cesse. Catalina Martin-Chico n’a rien d’une voleuse d’image, ou d’une voyeuse, et qu’est-ce que c’est bon à voir.


Nathalie Bourrus, grand reporter depuis 20 ans à franceinfo, raconte avec sa plume aiguisée et sa voix chaude les tops et les flops, les rires et les larmes d’une femme. Un portrait, mais surtout une rencontre, du lundi au vendredi à 16h56 et 21h51.

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