Radio France : pourquoi la restauration des boiseries du bureau de Mathieu Gallet a coûté si cher
Le montant total des travaux dépasse les 100 000 euros, mais la rénovation des boiseries murales a plombé la facture : plus de 70 000 euros. Explications.
La facture dévoilée par Le Canard enchaîné est salée. Alors que les syndicats de Radio France redoutent des réductions d'effectifs pour lutter contre un déficit de plusieurs dizaines de millions d'euros, l'hebdomadaire dévoile que le nouveau bureau du patron, Mathieu Gallet, a coûté 105 000 euros. Sur cette somme, dénoncée par le Syndicat national des journalistes, "70% sont consacrés à la restauration des boiseries", soit un peu plus de 72 000 euros. Catherine Sueur, directrice générale du groupe, confirme au Canard : "Cela a coûté cher (...). Mais il fallait le faire un jour ou l'autre." Qu'est-ce qui justifie un tel montant ?
Un "ensemble patrimonial" plus qu'un bureau
Pour comprendre le prix des travaux, des journalistes de "La Nouvelle Edition" de Canal+ ont visité le bureau de Mathieu Gallet, mercredi matin, avec pour guide Marion Bernard, architecte des lieux. Elle décrit le bureau, d'une trentaine de mètres carrés et dont les murs sont couverts de lambris sur au moins deux mètres de hauteur, comme un "ensemble patrimonial assez exceptionnel".
Si l'architecture et l'aménagement de la Maison de la radio sont remarquables, le bâtiment et son mobilier ne sont toutefois pas officiellement classés au patrimoine historique. Ce qui n'empêche pas l'architecte Marion Bernard de comparer le bureau à la Sainte-Chapelle, classée au patrimoine mondial. "Vous allez à la Sainte-Chapelle, elle a l'air en bon état, vous approchez des vitraux, vous pleurez", assure-t-elle à "La Nouvelle Edition".
Le palissandre, un bois rare
"Une partie des murs est ornée de boiseries précieuses en palissandre", explique Catherine Sueur. Le palissandre est aussi appelé "bois de rose". Sans plus de détail, difficile de savoir à quel point le bois brut qui recouvre les murs du bureau de Mathieu Gallet est précieux. L'appellation englobe en effet plusieurs essences de bois exotiques, venus du Brésil, du Belize, d'Inde ou de Madagascar. En France, le palissandre est surtout utilisé en placage et en marqueterie, plutôt que brut, depuis le XVIIe siècle. Certaines essences servent notamment à la fabrication d'instruments de musique (bassons, guitares acoustiques, chevilles de violon, lames de xylophone…).
Mais les palissandres de Rio et de Madagascar, par exemple, sont protégés depuis 1992 et 2013 par la convention de Washington, qui interdit leur commerce. Seuls les stocks antérieurs à l'interdiction peuvent encore faire l'objet d'échanges commerciaux, à des prix exorbitants. "Et il faut disposer d'une autorisation spéciale pour se procurer la plupart des essences de palissandre", explique Daphné Duchesne, ébéniste. Ce qui peut faire grimper la facture, si le professionnel chargé des travaux a dû se procurer de la matière première.
La restauration, un travail d'orfèvre
"Une restauration à 70 000 euros, ça ne me surprend pas", indique l'ébéniste Bernard Bizoux, spécialiste du bois précieux. Lui-même "travaille en ce moment sur un devis à 100 000 euros". "C'est un bois qui doit être vernis, pas ciré, et cette opération est beaucoup plus longue", ajoute-t-il. "Le prix d'une belle restauration de bois précieux est souvent mal compris, constate Daphné Duchesne, mais vernir un bois exotique est une tâche difficile, surtout s'il s'agit de retrouver l'aspect des années 1960." Et d'autant plus "s'il a fallu retraiter l'ensemble des boiseries, pour obtenir un résultat homogène".
Les boiseries, selon l'architecte Marion Bernard, n'avaient pas été restaurées depuis 1963, date d'inauguration du bâtiment. Mais ce n'est pas le cas de la moquette et des peintures du bureau, "retapé en novembre 2013", selon Le Canard enchaîné…
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