Robert Murdoch, son fils et Rebekah Brooks ont été entendus mardi devant une commission parlementaire sur les médias
Dix parlementaires britanniques ont mis sur le grill les Murdoch père et fils, puis Rebekah Brooks, pour tenter d'y voir plus clair dans le scandale des écoutes au News of the World.
Au début de son audition suivie par des millions de britanniques à la TV, Rupert Murdoch, 80 ans, a déclaré qu'il s'agissait du "jour le plus humiliant" de sa vie.
Le propriétaire du puissant groupe de médias News Corp a expliqué avoir fermé le journal News of the World, tenu responsable d'écoutes téléphoniques sur des milliers de personnes, parce que "nous avions honte de ce qui s'était passé".
Son fils James Murdoch, 38 ans, numéro trois du groupe familial News Corp., a dit vivement regretter les écoutes effectuées par des journalistes du groupe et a assuré qu'il ferait en sorte que de tels actes ne se reproduisent pas.
"Avant tout, je souhaiterais dire combien je suis désolé, en particulier envers les victimes de piratage illégal de messageries téléphoniques et leurs familles".
Rupert Murdoch nie sa responsabilité "finale"
Mais lorsque les députés ont commencé à mettre sur le grill le puissant Rupert Murdoch, patron d'un des plus grands groupes de presse mondial, sur sa responsabilité "finale" dans l'affaires des écoutes pratiquées à grande échelle par un tabloïde de sa branche britannique dans les années 2000, il a botté en touche.
Au député qui lui demandait: "acceptez-vous de reconnaître vous êtes le responsable ultime de tout ce fiasco", M. Murdoch a laconiquement répondu : "non".
Qui est responsable? a alors poursuivi le parlementaire. "Les personnes à qui j'ai fait confiance et ensuite peut-être les personnes à qui elles ont fait confiance", a ajouté le magnat.
"Le News of the World représente moins de 1% de notre groupe. J'emploie 53.000 personnes dans le monde, qui sont de grands professionnels, soucieux d'éthique", a-t-il plaidé.
L'audition de Rupert Murdoch et de son fils James a été brièvement interrompue par l'irruption d'un manifestant qui a tenté de jeter une
mousse blanche sur le magnat. D'après la chaîne de télévision Sky News, l'homme interpellé serait un humoriste. L'audience a repris quelques minutes après, M. Murdoch reprenant sa place sans sa veste de costume.
Rebekah Brooks également entendue
Rebekah Brooks, l'ex-directrice de la filiale britannique du groupe Murdoch a été elle aussi entendu mardi l'après-midi à propos des écoutes téléphoniques imputées aux journaux du groupe.
L'ancienne rédactrice en chef de News of the World, Rebekah Brooks, a joint mardi ses excuses à celles exprimées un peu plus tôt par Rupert et James Murdoch. "Je souhaiterais joindre mes excuses personnelles à celles qu'ont faites James et Rupert Murdoch. Les accusations d'interceptions de communications, d'interceptions de courriels de victimes de crimes est quelque chose d'horrible et d'odieux", a-t-elle dit devant les députés.
"Evidemment, j'ai des regrets, l'idée que quelqu'un payé par News of The World ait eu accès à la messagerie téléphonique de Milly Dowler (une fillette de 13 ans assassinée en 2002) ou pire encore que ce soit quelqu'un qui ait été autorisé par News of the World, est quelque chose d'odieux à mes yeux comme à chacun présent dans cette pièce", a-t-elle poursuivi. Brooks était rédactice en chef de News of the World à l'époque où ce tabloïd se serait livré à des écoutes illégales de milliers de personnes et aurait corrompu des policiers.
Arrêtée par Scotland Yard, la "reine des tabloïds" déchue avait été remise en liberté conditionnelle sous caution, dimanche, deux jours après sa démission de News International.
L'interpellation de Brooks, 43 ans, dans le cadre de l'enquête de police, avait jeté un doute sur sa capacité à témoigner devant la commission des médias. Jusqu"à aujourd"hui, sa présence à l"audition était loin d"être confirmée.
L'avocat de Mme Brooks, Stephen Parkinson, a souligné qu'"elle n'est coupable d'aucune infraction." Il a jugé "difficile à comprendre" la conduite de la police qui "l'a arrêtée et interrogée pendant neuf heures sans aucun chef d'accusation et sans lui montrer aucun document établissant un lien avec une quelconque infraction".
Rebekah Brooks est depuis la réouverture de l'enquête au début de l'année. Elle avait admis lors d'une précédente audition en 2003 que le News of the World, qu'elle a dirigé de 2000 à 2003, avait payé des policiers pour obtenir des informations.
Qui conduit l"audience ?
Les dix parlementaires qui conduisent l'audience, sont d'habitude chargés au sein de la Commission culture, médias et sport, de contrôler le fonctionnement de ces trois ministères, mais peuvent aussi "conduire des enquêtes" sur des sujets de leur choix, dans leur champ de compétence.
Ce rendez-vous, le dernier avant la fin de la session parlementaire est exceptionnel. Ouverte au public, la séance, qui a débuté à 14h30, est retransmise en direct.
"Cette audition est présentée comme l'une des plus importantes sessions jamais tenues par une commission parlementaire", notait The Independent on Sunday.
Pour y parvenir, la commission a dû taper du poing sur la table: après un premier refus des Murdoch, elle a eu recours à une procédure rarement utilisée, les convoquant en bonne et due forme.
Le président de la commission, le conservateur John Whittindgale, ancien conseiller de Margaret Thatcher, a promis une séance "calme", sans "lynchage", mais qui va "au fond des choses".
Les députés marchent sur des oeufs
Certains s'interrogent toutefois sur la pugnacité de cette commission, rappelant qu'en 2003, elle avait déjà entendu Rebekah Brooks, sans donner suite à ses déclarations fracassantes.
L'ancienne rédactrice en chef du News of theWorld, devenue ensuite directrice de News International, la branche britannique du groupe dont elle a , avait pourtant lâché: , avant de se rétracter.
Les députés marchent sur des oeufs avec cette triple audition car ils ne doivent pas empiéter sur les prérogatives de la police. Un argument que n'a pas manqué de faire valoir Rupert Murdoch, demandant à la commission de "s'assurer que cette audition ne menacerait en rien les investigations en cours".
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