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Attentat à Strasbourg : comment les forces de l'ordre se préparent pour l'"acte 5" des "gilets jaunes"

"Exténués" et "fatigués" un mois après le début du mouvement des "gilets jaunes", les forces de l'ordre espèrent une mobilisation moindre en cas d'"acte 5" samedi. Certains représentants syndicaux et responsables politiques lancent même des appels à ne pas manifester.

Article rédigé par Anne Brigaudeau
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
Des policiers sur les Champs-Elysées, samedi 8 décembre 2018, après une journée de manifestation des "gilets jaunes" émaillée d'incidents à Paris. (N.E. / NURPHOTO / NURPHOTO)

"Nous verrons ce qui se passe, nous ne sommes pas des abrutis. Mais en l'état actuel des choses, nous sommes toujours partis pour un 'acte 5', sur les mêmes revendications." Au lendemain de l'attentat à Strasbourg, qui a fait au moins deux morts, une victime en état de mort cérébrale et 12 blessés, mardi 11 décembre, de nombreux "gilets jaunes", à l'image de cette coordinatrice locale de Marseille, qui préfère garder l'anonymat, affichent leur détermination à poursuivre le mouvement.

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Une perspective qui n'enchante pas les forces de l'ordre, épuisées par un mois de blocages des "gilets jaunes" dans toute la France et par le mouvement des lycéens qui se durcit depuis quelques jours. Comment envisagent-elles cet "acte 5" des "gilets jaunes" prévu samedi 15 décembre à Paris, alors que l'auteur de l'attentat de Strasbourg est toujours en fuite ? Eléments de réponse.

Pas d'état d'urgence ni d'interdiction de manifester

Au lendemain des événements de Strasbourg, le gouvernement a réaffirmé qu'il n'y aurait pas de recours à l'état d'urgence"Nous pouvons être à la hauteur des événements sans pour autant déclencher l'état d'urgence", a déclaré mercredi la ministre de la Justice, Nicole Belloubet, sur la chaîne Public Sénat. Une décision dont le secrétaire général de l'UNSA Police, Philippe Capon, se félicite. "Le plus de l'état d'urgence est tellement infime que ça n’apporte rien, glisse-t-il en faisant référence aux mesures qui ont été pérennisées dans la loi antiterroriste adoptée en 2017. Sinon de supprimer l'état d’urgence des policiers, ce dont nous ne voulons pas."

Pas question, non plus, d'interdire de manifester dans l'Hexagone, selon le secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'Intérieur, Laurent Nuñez. "Nous n'en sommes pas là. La mesure qui a été prise, c'est l'interdiction de manifestations à Strasbourg uniquement, aujourd'hui [mercredi 12 décembre]", a-t-il déclaré sur France Inter.

Des appels à cesser les mobilisations

A priori, rien n'interdit aux "gilets jaunes" de manifester à nouveau samedi 15 décembre. Une perspective que n'envisagent pas de gaieté de cœur les policiers, tendus à l'idée que des rassemblements peuvent dégénérer comme à Paris ou Bordeaux la semaine passée. Le secrétaire général adjoint du syndicat Alliance, Frédéric Lagache, lance ainsi un appel clair à l'arrêt des manifestations : "Il faut que ça se calme. On ne peut pas être sur tous les fronts à la fois, déplore-t-il. La responsabilité des uns et des autres, 'gilets jaunes' comme lycéens d'ailleurs, c’est qu’il n'y ait pas de manifestation. Nous étions déjà mobilisés pour le plan Vigipirate à cause des risques terroristes lors des fêtes de fin d’année, nous venons de passer au niveau "urgence attentat" après la fusillade à Strasbourg. Nos hommes sont fatigués."

Le samedi c’est les "gilets jaunes" qui manifestent. La semaine, c’est les lycéens. Nous ne sommes pas corvéables à merci. La corde se tend, on ne peut pas être sur tous les fronts.

Frédéric Lagache, secrétaire général du syndicat de police Alliance

à franceinfo

"Nous sommes exténués", confiait aussi à franceinfo, dès le samedi 8 décembre, Yves Lefebvre, secrétaire général du syndicat Unité SGP Police FO. Il rappelait que certains policiers en étaient déjà "rendus à 20 jours, parfois 21 jours de travail non-stop, avec des amplitudes horaires particulièrement conséquentes", pouvant aller jusqu'à "20 heures de service d'affilées" les jours de manifestations. "Certains en sont à huit ou neuf week-ends de mobilisation de suite, renchérit Philippe Capon. On n'est pas des robots."

L'appel à une pause a été relayé aussi mercredi par certains politiques. Sur Europe 1, le maire de Nice, Christian Estrosi (LR), a appelé les "gilets jaunes" à "suspendre leur mouvement". Au gouvernement, Laurent Nuñez "espére qu'il y aura moins de manifestations" samedi, comptant sur une "responsabilité générale" des Français après la fusillade de Strasbourg.

De nouvelles interpellations "préventives" programmées ?

Et si les manifestations des "gilets jaunes" devaient malgré tout se maintenir, samedi 15 décembre ? Les syndicats de police comptent sur les interpellations "préventives", qui ont fait leurs preuves la semaine passée, jugent-ils. Un record a ainsi été battu samedi 8 décembre, avec 1 939 interpellations dans toute la France, lesquelles se sont traduites par 1 709 gardes à vue, puis 278 personnes déférées au parquet.

Ce type de mesures était réclamé de longue date, a affirmé à franceinfo Yves Lefebvre"Les interpellations en amont – contrôles aux péages, sur les parkings, à la sortie des gares, dans le métro – étaient nécessaires." 

Tout ce qui était contrôlable l'a été [samedi 8 décembre] et c'est tant mieux. Depuis les manifestations contre la loi El Khomri [au printemps 2016], nous n'avons cessé de le réclamer à la préfecture de police de Paris.

Yves Lefebvre, secrétaire général du syndicat Unité SGP Police FO

à franceinfo

"Nous n'avions jamais été écoutés, jusqu'à maintenant. C'est enfin un point positif", conclut-il. Laurent Nuñez a confirmé mercredi sur France Inter que ce dispositif serait maintenu : "Si les manifestations devaient être aussi nombreuses que samedi dernier, nous sommes prêts comme nous l'avons été samedi dernier à être extrêmement mobiles et à procéder à de très nombreuses interpellations", a-t-il assuré.

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