"Gilets jaunes" : la délinquance en hausse depuis la mobilisation des forces de l'ordre
Depuis novembre 2018, les cambriolages sont en hausse de 9% et les vols violents en augmentation de 7%.
La délinquance augmente depuis novembre 2018 en France, selon les statistiques du ministère de l'Intérieur consultées par franceinfo jeudi 11 avril. Cette hausse est à contre-courant de la tendance générale, à la baisse depuis un an. Certains font le lien entre cette augmentation et les manifestations des "gilets jaunes", qui mobilisent une part importante des forces de l'ordre. Elles n'auraient ainsi plus les moyens de lutter efficacement contre la délinquance.
Depuis les premières manifestations des "gilets jaunes", les cambriolages sont en hausse de près de 9%, les vols dans les véhicules de 8%, les vols sans violence de 5%, et les vols violents sont en augmentation de près de 7% d'après les calculs réalisés par franceinfo à partir des données publiques du ministère de l'Intérieur. Les crimes et délits sont en augmentation quasi générale.
Ces chiffres ne recensent pas la totalité des infractions commises, notamment parce que toutes les victimes ne se font pas forcément connaître. La Fédération France Victimes, qui regroupe 130 associations d’aides aux victimes, établit le même constat. "On ressent un poids plus fort des vols, des vols aggravés, des destructions et des dégradations depuis le mois de novembre", assure-t-elle.
Un lien évident, selon les forces de l'ordre
Philippe Capon, du syndicat UNSA-Police, rappelle que les "gilets jaunes" mobilisent chaque samedi plusieurs milliers de policiers et de gendarmes. "Il y a un transfert des missions qui se fait par rapport à la semaine, avance-t-il. Énormément d’effectifs sont utilisés le samedi, BAC, CRS, compagnies de sécurisation, compagnies d’intervention... Ils ne sont pas en mesure d’être sur le terrain, de travailler par exemple le vendredi soir ou le samedi soir."
Ces missions, ce sont par exemple les patrouilles dissuasives : le fait, pour les forces de l’ordre, de se montrer. Mais c’est aussi tout le travail de démantèlement des réseaux de cambrioleurs, des flagrants délits. C’est le cas, par exemple, dans les Pyrénées-Orientales, où le patron des gendarmes du département, le colonel Guillaume Poumeau de Lafforest, a fait part de ses inquiétudes à France Bleu Roussillon : "Les cambriolages augmentent dans le département de façon extrêmement significative. C’est un domaine dans lequel, jusqu'au 17 novembre, le département, en tout cas pour la zone de gendarmerie, était assez performant."
La grande préoccupation des gendarmes, c’est de pouvoir revenir au plus vite à leur cœur de métier, c’est-à-dire le traitement de la délinquance et l’accompagnement des victimes.
Colonel Guillaume Poumeau de Lafforestà France Bleu Roussillon
Dans tout le pays, et notamment dans les régions où les "gilets jaunes" sont fortement mobilisés, le constat est le même : la délinquance augmente.
Le cas de la capitale
Paris est un lieu de rendez-vous hebdomadaire des manifestations depuis le 17 novembre. Là aussi, les chiffres sont en hausse, explique Colombe Brossel, l’adjointe à la mairie de Paris, en charge de la sécurité et de la prévention. "Plus de 7% pour les vols à la tire, près de 10% d’augmentation pour les vols simples dans les locaux ou dans les lieux publics et plus 8,5% pour le recel", précise l'élue.
On voit bien qu’on a une augmentation des statistiques, notamment depuis la fin du mois de novembre.
Colombe Brossel, adjointe à la Ville de Parisà franceinfo
"Aujourd’hui, on a besoin d’effectifs de police en uniforme dans nos arrondissements, dans nos quartiers qui soient stabilisés, qui soient des relais également pour la population", conclut Colombe Brossel. Pour cela, il faut que les manifestations des "gilets jaunes" s’arrêtent, dit un policier.
Des explications à nuancer
Christophe Soullez, directeur de l’Observatoire national de la délinquance, préfère tempérer. On ne peut pas lier aussi simplement la hausse de la délinquance au mouvement des "gilets jaunes", nuance-t-il. "Je ne pense pas que la présence des forces de l’ordre sur la voie publique soit un élément qui permette, aujourd’hui comme hier, d’expliquer les fluctuations à la baisse ou la hausse de la délinquance", assure cet expert.
Ce sont des cycles généralement assez déconnectés de tout ce qui est présence, évolution des effectifs sur le terrain. Les causes sont multiples. Il n’y a pas qu’une seule explication.
Christophe Soullezà franceinfo
Au plus fort du mouvement des "gilets jaunes", plus de 80 000 policiers et gendarmes étaient mobilisés les samedis de manifestations.
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