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Quatre questions sur le retour de la taxe carbone proposé par la majorité

Depuis plusieurs jours, ministres et membres de la majorité proposent de réintroduire cette hausse d'impôt qui avait suscité la colère des "gilets jaunes".

Article rédigé par franceinfo
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Un automobiliste dans une station-essence, le 5 décembre 2018, à Saint-Laurent-de-Condel (Calvados).  (CHARLY TRIBALLEAU / AFP)

Hausse de la taxe carbone, saison 2. Après avoir renoncé à augmenter cet impôt en décembre dernier, ministres et membres de la majorité proposent désormais de la réintroduire. Mardi 12 février, 86 députés ont signé une tribune dans Le Figaro appelant à ne "pas abandonner cet outil" et à débattre de son retour dans le cadre du grand débat nationalFranceinfo revient sur ce sujet brûlant qui, en novembre, avait suscité un mouvement de colère donnant naissance au mouvement des "gilets jaunes".

Qu'est-ce que la taxe carbone ?

La taxe carbone est un prélèvement sur les produits énergétiques calculé en fonction de leur émission de CO2. Cet impôt devait augmenter le 1er janvier 2019, passant de 44,60 euros à 55 euros la tonne de CO2, ce qui aurait eu pour conséquence d'augmenter le prix au litre du gazole de 6,5 centimes et de 2,9 centimes celui de l'essence.

Dès le mois d'octobre, cette augmentation annoncée des taxes sur les carburants a suscité une levée de bouclier, qui a donné naissance au mouvement des "gilets jaunes" le 17 novembre. Face à une crise sociale sans précédent, l'exécutif avait d'abord annoncé un moratoire de six mois sur cette augmentation de la taxe carbone, avant de l'abandonner complètement, au mois de décembre. 

Que réclament les députés ? 

Dans Le Figaro, 86 députés de plusieurs groupes politiques, mais principalement issus des rangs de La République en marche (LREM), ont signé une tribune plaidant "pour une fiscalité carbone juste socialement". Dans ce texte, les élus appellent à "construire tous ensemble une fiscalité qui soit à la fois écologique, juste et lisible".

Plutôt que d'abandonner cet outil, nous voulons continuer le débat entamé avec les citoyens dans le cadre du grand débat national.

Les 86 signataires de la tribune

dans "Le Figaro"

Interrogé par franceinfo, le député Matthieu Orphelin, à l'origine de la tribune, s'est défendu de vouloir revenir à cette taxe qui a suscité une levée de bouclier massive au mois de novembre.

Ce n'est pas le retour de la taxe carbone telle qu'elle a été envisagée et qui a été la goutte d'eau ou l'étincelle qui a lancé cette mobilisation des 'gilets jaunes'.

Matthieu Orphelin

à franceinfo

Celui qui a récemment quitté le groupe LREM à l'Assemblée dit appeler à "une réflexion globale" pour une "fiscalité écologique plus juste socialement". "Ce n'est pas forcément une taxe en plus. Ça peut être une fiscalité différenciée", affirme-t-il, avant de citer pêle-mêle : "Des bonus-malus, des baisses de taxes sur les transports en commun, sur la réparation de vélos ou d'autres modes de déplacement alternatif à la voiture." Bref, "tout ce qui peut favoriser les comportements qui vont dans le sens de la transition".

Le gouvernement est-il à la manœuvre 

C'est ce qu'affirment plusieurs élus d'opposition, à l'image du député Eric Ciotti, du parti Les Républicains. Difficile de ne pas voir dans cette tribune l'épilogue d'un plan de communication, amorcé par le gouvernement quatre jours plus tôt. Dimanche 10 février, sur le plateau de France 3, Brune Poirson, secrétaire d'Etat auprès du ministère de la Transition écologique, avait déjà affirmé que "la taxe carbone est un outil efficace en faveur de la transition écologique".

Elle reviendra peut-être, ça fait l'objet d'une discussion du grand débat. Les questions de fiscalité et pouvoir d'achat sont au centre du débat.

Brune Poirson

sur France 3

Le ministre de la Transition écologique, François de Rugy, lui a emboîté le pas, mardi. Le retour de la taxe carbone "est sur la table, c'est le moment où jamais d'en débattre, a-t-il déclaré sur Europe 1Si on est capable de dire que cet argent irait à 100% dans la transition écologique (...), à ce moment-là, on pourrait peut-être reprendre cette trajectoire."

La proposition ne semble cependant pas convaincre Emmanuel Macron, dont la "conviction c'est plutôt moins d'impôt que plus d'impôt". "Le président a souligné que nous étions entrés dans ce moment, le 17 novembre dernier, suite à une hausse de la fiscalité et ce n'est sans doute pas par une hausse de la fiscalité qu'on répondra à la colère qui s'est exprimée", a affirmé le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux, à l'issue du Conseil des ministres.

Que répond l'opposition ?

Des députés issus de cinq formations politiques – La République en marche, MoDem, PS, UDI-Agir et Libertés et Territoires – ont signé ce texte, qui ne fait pourtant pas consensus au sein de ces groupes. "Sur les taxes énergétiques, moi je souhaite qu'on dise d'abord ce qu'on veut financer et ensuite ce qu'on réduit comme impôt", a critiqué sur RFI la présidente du groupe socialiste à l'Assemblée, Valérie Rabault, qui a refusé de participer à la tribune.

La France insoumise et le Rassemblement national s'y sont aussi refusé, tout comme Les Républicains, vigoureusement opposés à cette nouvelle augmentation d'impôts. "Ceux qui ont signé n'ont rien compris", a critiqué Eric Ciotti, député LR des Alpes-Maritimes, évoquant un "concours Lépine de la stupidité fiscale".

Le gouvernement non plus n'a rien compris. On voit revenir la taxe carbone par la fenêtre alors qu'elle avait été éjectée par la porte. C'est ahurissant.

Eric Ciotti

à franceinfo

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