Pourquoi la gare Montparnasse, touchée par une nouvelle panne dimanche, est particulièrement vulnérable aux perturbations
"Montparnasse devient une gare cauchemar", déplore un internaute sur X (anciennement Twitter). "La galère ENCORE à #Montparnasse", écrit une autre. Le trafic des trains au départ et à destination de cette gare parisienne a été très perturbé, dimanche 24 septembre, du fait d'un "défaut d'alimentation électrique", selon la SNCF. "L'origine de la panne a été identifiée : il s'agit d'un câble d'alimentation électrique rompu" à l'entrée d'un tunnel, a précisé la compagnie ferroviaire sur son site. Un train bloqué a notamment dû être évacué, et ses passagers ont atteint leur destination dans une rame de secours, avec un retard de six heures. D'autres trains sont arrivés à Paris avec des délais de la même ampleur.
Depuis quelques années, la réputation de la gare Montparnasse ne cesse de se ternir. Des incidents à répétition paralysent le trafic, et mettent à mal les déplacements de milliers de travailleurs et de vacanciers. Fin juillet, une panne de signalisation, liée à des intempéries, avait déjà provoqué de nombreux retards. Une pagaille monstre avait aussi eu lieu à la même période en 2017, à cause d'une panne d'un poste de signalisation à Vanves-Malakoff (Hauts-de-Seine). S'il est difficile d'établir une comparaison du nombre d'incidents avec d'autres gares, et que toutes les raisons ne sont pas imputables à la SNCF, Montparnasse réunit quelques particularités qui peuvent expliquer ce désordre.
Des possibilités de circulation restreintes
A l'origine, la gare Montparnasse n'était pas censée relier une si large partie de l'ouest de la France à la capitale. Comme le rappelle L'Express, elle ne desservait historiquement qu'une partie de la Bretagne, et non pas la Gironde, les Landes ou encore le Pays basque, comme aujourd'hui. En conséquence, sa superficie et ses capacités d'accueil sont plutôt restreintes. "Dans les années 1960, quand elle a été reconstruite et reculée de 400 mètres par rapport à l'ancienne, elle est devenue plus large, mais elle manque toujours de profondeur", rappelle à l'hebdomadaire l'historien Clive Lamming.
Maria Lee, experte en transports pour l'entreprise de conseil Sia Partners, ajoute que Montparnasse ne possède pas de gare à proximité pour dévier efficacement les trains. "S’il y a le moindre problème, on n’a pas vraiment de solution de repli. En théorie, on peut envoyer des trains à Austerlitz, mais les possibilités d'accueil sont réduites dans cette gare, explique-t-elle à franceinfo. Très souvent, les trains de Montparnasse sont obligés d'attendre que la situation s'améliore directement sur place."
Des conditions propices aux embouteillages sur les voies et aux images impressionnantes de voyageurs agglutinés dans le hall. "Il y a des enjeux de modernisation et de fluidité très importants", développe Maria Lee. “[La gare] Montparnasse est limitée en termes de possibilités de circulation. C’est plus difficile de s’y organiser, au contraire de la gare de Lyon par exemple", reconnaissait en 2018 Serge Wolf, alors directeur exécutif du site, auprès de Ouest-France. “C’est le poumon de l’Atlantique. Si cette gare est malade, c’est l’ensemble de la zone qui va mal”, jugeait-il. Selon les chiffres de la SNCF, Montparnasse a accueilli plus de 56 millions de voyageurs en 2022.
Un nœud ferroviaire surchargé à quelques kilomètres
L'autre vulnérabilité de la gare Montparnasse réside dans son lien avec l'immense nœud ferroviaire de Massy (Essonne), où se croisent TGV, Ouigo, TER et Transiliens avant de rejoindre la capitale. "S'il y a des pannes à Massy, cela implique Montparnasse et vice-versa", note Maria Lee, qui compare l'endroit à une sorte de "gros périphérique ferroviaire parisien". La panne de dimanche était justement liée à un incident à Massy. Dans cette gare de banlieue, des travaux sont en cours pour créer plus de voies dédiées à chaque type de train. Mais "les effets ne peuvent se voir dans l'immédiat", prévient la consultante, qui plaide pour réduire la dépendance à cette gare : "Il faut construire un réseau qui soit bien plus capacitaire et faire du contournement par le sud de Paris", plutôt que de faire croiser tous les trains "au même endroit".
De son côté, la Fédération nationale des associations d'usagers des transports (Fnaut) dénonce un manque criant de budget. "Il va finir par falloir investir quelque peu dans les infrastructures ferroviaires de la gare Montparnasse et de la LGV Atlantique, car ces pannes reviennent trop régulièrement", dénonce sur X la section Nouvelle-Aquitaine de la Fnaut. En février, la Première ministre Elisabeth Borne a annoncé un plan pour investir 100 milliards d’euros dans les transports ferroviaires d'ici à 2040, afin de "mettre un terme au vieillissement du réseau et le moderniser". Si la France est le pays d'Europe qui subventionne le plus le transport de voyageurs par le rail, les économistes soulignent depuis longtemps le manque chronique d'investissements dont souffre le réseau.
Tous les incidents ne sont pas pour autant liés au bon fonctionnement ou non de la gare Montparnasse. Ainsi, en juillet 2018, c'est l'incendie d'un poste électrique de RTE qui avait fortement perturbé la circulation des trains. Cet été, des trains ont pu subir des retards, à Montparnasse comme ailleurs, du fait des conséquences de la canicule. "La SNCF travaille à l'adaptation face aux risques climatiques, rappelle Maria Lee. Entre les orages, les inondations et les fortes chaleurs, ils font face à des événements de plus en plus extrêmes et fréquents".
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