Elus depuis 1978, candidats à un 9e mandat… Ces députés s'accrochent à leur siège : voici leurs meilleures excuses
Au moins deux tiers des députés sortants comptent se représenter aux élections législatives en 2017. Parmi eux, certains ont déjà siégé pendant cinq, six, sept, voire huit mandats. Franceinfo a interrogé ces cumulards pour leur demander pourquoi ils ne laissaient pas la place aux jeunes.
Vous avez dit renouvellement de la classe politique ? Sur l'ensemble des députés, au moins deux tiers ont décidé de briguer un nouveau mandat, selon une enquête de franceinfo, publiée jeudi 5 janvier. Et pour certains d'entre eux, l'aventure dans l'hémicycle dure depuis longtemps, très longtemps. Avec des élus qui enchaînent cinq, six, sept, voire huit mandats, les têtes deviennent grisonnantes sur les bancs de l'Assemblée et la représentation nationale peine à se renouveler.
>> Lire aussi notre enquête : votre député se représentera-t-il en juin ?
Alors que des mesures de non-cumul des mandats dans le temps sont proposées par certains candidats à la présidentielle comme Manuel Valls, franceinfo a interrogé quelques-uns des doyens de l'hémicycle qui ont décidé de se lancer dans une nouvelle campagne en 2017. Voici leurs principales excuses pour ne pas laisser la place aux jeunes.
1On m'a supplié d'être candidat
"J'avais envisagé de ne pas me représenter pour laisser la place à une nouvelle équipe, mais cela n'a pas été possible", assure Gérard Bapt, qui va bientôt fêter ses 71 ans. Avec huit mandats au compteur, le député socialiste de Haute-Garonne dit s'être senti obligé de repartir pour une neuvième campagne afin d'éviter la défaite à son camp : "La fédération voulait imposer un candidat qui était une machine à perdre, du coup de nombreux élus socialistes de ma fédération m'ont supplié d'être candidat."
Investi facilement par les militants socialistes, Gérard Bapt n'a pas le sentiment de livrer le combat de trop. "J'ai l'image d'un député proche des gens, poursuit le parlementaire, qui siège depuis 1978. Personne dans la population de ma circonscription ne me reproche mon nombre de mandats, il n'y a que le PS pour s'occuper de ça..."
2L'âge, c'est dans la tête
"Je me sens en très bonne forme, physiquement et intellectuellement", explique Jean-François Mancel, qui sollicite les électeurs de l'Oise pour un huitième mandat en tant que député. A bientôt 69 ans, cet élu Les Républicains considère qu'il s'agit avant tout d'un état d'esprit : "Je rencontre souvent les jeunes de ma circonscription, et ils me considèrent comme l'un des leurs." Cet énarque remarque par ailleurs que la société française a rajeuni et que "les papys et les mamies d'aujourd'hui sont comparables aux pères et aux mères d'hier".
Je fais toujours mon métier avec la même passion, et tant que la passion de servir les gens est présente, il n'y a pas de problème d'âge.
Jean-François Mancelà franceinfo
Jean-François Mancel admet tout de même qu'il n'est pas toujours évident pour un sexagénaire de s'adapter aux attentes des jeunes : "J'ai six enfants et quatre petits-enfants et quand je parle avec eux, je vois bien qu'ils ont une approche de la société, une vision du monde assez différente." Mais le député sortant compte bien rattraper ce handicap au cours de sa campagne, en s'entourant de jeunes dans son équipe.
3On est peut-être vieux, mais on a de l'expérience
Au-delà de l'âge, "ce qui compte, c'est l'expérience, la connaissance des choses et la réalité du travail", affirme Jean-François Mancel. Le député se méfie d'un jeunisme qui ferait passer l'image et le symbole avant la compétence.
Un avis partagé par Alain Marleix, 71 ans, candidat à un sixième mandat dans sa circonscription du Cantal. Lui prend en exemples les pays étrangers pour vanter la nécessité de cette expérience : "Il n'y a qu'en France où l'âge des dirigeants est vu comme un problème, il suffit de regarder la Chine, ou les Etats-Unis avec le duel Trump-Clinton. Au final, le plus jeune, c'est Poutine."
On peut être un très bon député à 70 ans et un très mauvais à 30 ans.
Alain Marleixfranceinfo
4Les électeurs n'ont qu'à nous virer
Pour Alain Marleix, il n'y a pas vraiment de problème de renouvellement de la vie politique française. "C'est aux électeurs de choisir, cela ne se décrète pas", tranche le député. "Il faut laisser la liberté aux gens de faire leur choix", abonde son collègue Jean-François Mancel. Contrairement aux députés socialistes, les députés LR sortants avaient la priorité et n'ont pas eu à passer par le choix des militants.
Pour ne pas l'énerver, il ne faut donc pas parler à Alain Marleix des projets de non-cumul des mandats dans le temps : "C'est stupide, ridicule et bien démagogique ! Ce serait une liberté supprimée pour les électeurs. Si ces derniers trouvent bien que leur député se représente, il n'y a pas de raison de l'empêcher."
5J'ai encore quelques dossiers à boucler
Avec une voix parfois chevrotante mais un ton assuré, les seniors de l'Assemblée mettent tous leur travail en avant et leur volonté de continuer à porter leurs combats. "Il y a des sujets qui me tiennent à cœur, comme l'aide publique au développement", avance Jean-François Mancel. "Je suis très concerné par mes dossiers, comme les perturbateurs endocriniens, les pesticides, l'affaire de la Dépakine...", énumère Gérard Bapt, qui rappelle aussi son combat contre le bisphénol A. Personne n'est irremplaçable ? Dans l'hémicycle, cet adage n'est visiblement pas partagé par tous.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.