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"Les municipales sont devenues un référendum contre l'exécutif"

Pour le politologue Martial Foucault, les électeurs ont sanctionné la politique gouvernementale lors du scrutin municipal.

Article rédigé par Christophe Rauzy - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Le président de la République, François Hollande, et le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, le 27 mars 2014, à l'hôtel Matignon, à Paris. (WITT / REVELLI BEAUMONT / SIPA)

Le réveil est difficile pour le Parti socialiste au lendemain de la claque électorale qu'il a reçue, dimanche 30 mars, à l'issue du second tour des municipales. La vague bleue amorcée au premier tour est largement confirmée, avec le basculement à droite de 171 villes de plus de 9 000 habitants, selon le décompte de francetv info, dont Reims, Toulouse, Angers ou Limoges.

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Un phénomène que n'avait pas prévu le PS, croyant que la priorité des problématiques locales sauverait le gouvernement d'un vote sanction. Une erreur stratégique, selon le politologue Martial Foucault, directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), qui décrypte les résultats de ce scrutin pour francetvinfo.

Francetv info : Quels sont les principaux enseignements de ces élections municipales ?

Martial Foucault : Ce qui frappe avant tout, c'est la confirmation du degré de défiance vis-à-vis du politique qui règne en France. On le voit dans le taux de participation encore affaibli, malgré les enjeux considérables dans de nombreuses villes, y compris celles où se sont déroulées des triangulaires. On le voit aussi dans la dizaine de villes conquises par le FN, qui confirment la surprise du premier tour. L'autre phénomène à retenir, c'est la vague bleue, la victoire de l'UMP, bien plus importante que ce à quoi s'attendaient les observateurs.

Peut-on parler de vote sanction contre le gouvernement ?

Clairement, quand on voit des fiefs socialistes comme Limoges, Angers ou Pau basculer à droite. A gauche, pourtant, on refuse d'évoquer un possible vote sanction. C'est la grande erreur du Parti socialiste : avoir considéré que les municipales sont des élections locales, durant lesquelles les électeurs votent uniquement en fonction de critères locaux et non nationaux.

Comment expliquer la transformation des municipales en scrutin à portée nationale ?

Tout vient de l'inversion du calendrier électoral, lors de l'instauration du quinquennat en 2002. Les municipales ont acquis le statut d'élections intermédiaires, avec une participation faible et un vote sanction contre le gouvernement, comme le prouvent les scrutins de 2008 et de 2014. On constate que les Français plébiscitent l'élection présidentielle et qu'ils n'ont pas d'autres moments pour exprimer leur rejet de la politique gouvernementale que lors de ces scrutins intermédiaires. Les municipales sont devenues un référendum contre l'exécutif.

Les solutions envisagées par le gouvernement, un cadeau fiscal ou un remaniement, peuvent-elles inverser la tendance ?

Je ne crois pas que ce soit le genre de changements que les Français attendent, notamment ceux qui se sont mobilisés pour sanctionner le gouvernement. Il faut en revanche s'attendre à des remises en cause de certains choix gouvernementaux. Fin avril, le pacte de responsabilité sera soumis à l'Assemblée. Il ne serait pas étonnant de voir certains députés de gauche proposer de nouveaux amendements pour relayer la volonté de changement exprimée par certains de leurs administrés lors des municipales.

Quel est le message envoyé par l'électorat ? Veut-il plus de justice sociale, comme le clame le PS, ou un changement de cap, comme le réclame l'UMP ?

Il y a une vraie demande de rééquilibrage des efforts considérables demandés aux Français. L'électorat qui a abandonné la gauche, ce sont des plus de 50 ans, des fonctionnaires, des salariés, issus des classes moyennes, ceux qui ont été le plus exposés au "matraquage fiscal". Mais ils ont aussi une vraie défiance vis-à-vis de la politique menée par le gouvernement. Ils considèrent que deux ans, c'est suffisant pour obtenir des résultats et ils réclament des changements profonds. Pour François Hollande, c'est un vrai dilemme. S'il ne change rien, il exposera son camp à de futures déconvenues électorales. Et s'il change tout, il donnera l'impression que l'exécutif est une girouette, qui procède uniquement par rétropédalage.

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