: Reportage "Je n'aurais jamais cru faire ça un jour" : les catholiques pratiquants de plus en plus nombreux à voter à l'extrême droite
Les catholiques pratiquants ne font plus barrage à l’extrême droite. Un enseignement très clair tiré de la dernière enquête Ifop, l'Institut français d'opinion publique, pour le journal La Croix, intitulée "Le vote des électorats confessionnels aux élections européennes".
En 2019, ils avaient voté à 18% pour des listes d’extrême droite aux européennes. Ils étaient 42% à faire ce choix lors des élections du 9 juin 2024. Dans le détail, 32% ont choisi le Rassemblement national, 10% à se tourner vers Reconquête.
La déception de la politique d'Emmanuel Macron
À la sortie de la messe, à Rambouillet, dans les Yvelines, Florence a presque du mal à croire qu'elle a choisi, pour la première fois de sa vie d'électrice, une liste d’extrême droite. "Je n'ai pas voté pour le Rassemblement national, mais pour Marion Maréchal [parti Reconquête ! - ndlr]. Je n'aurais jamais cru faire ça un jour !"
Le programme de la majorité présidentielle, qu’elle soutenait plutôt jusque-là, l’a plus que déçue. "La seule idée concrète, c'était d'inscrire l'avortement dans la constitution. Je me suis dit 'vraiment ? On n'a que ça à faire ?' Cela m'a paru totalement ahurissant" explique la fidèle. Peu à peu, Florence a donc fait ce chemin vers le vote d'extrême droite, pourtant, "je suis plutôt quelqu'un de modéré, poursuit-elle, avec un vrai souci de l'attention à l'autre, aux plus pauvres".
"Le Seigneur, il ne fait pas grand-chose !"
Marc, un fidèle de l'église de Rambouillet, dans les Yvelinesà franceinfo
La question de l'immigration et "tout ce qui était de l'extrême droite, le fait qu'il y ait un rejet de l'étranger, ça me gênait beaucoup." Cependant, Florence estime qu'il n'y "a jamais eu de solution, chez les gens modérés, pour vraiment accompagner les migrants de façon satisfaisante".
Voter pour l'extrême droite, un choix inédit aussi pour Marc. Le croyant s'est tourné vers le Rassemblement national. "C'est un peu anticatholique ! On devrait, nous, accueillir tout le monde", s'en étonne-t-il avant de se justifier : "Il y a trop de grabuge en France ! Beaucoup d’étrangers en fait".
La peur de l'extrême gauche
D’autres enjeux ont poussé les pratiquants à remettre en question leur vote comme "les lois de bioéthique qui vont dans un sens effrayant", s'émeut Elisabeth. Elle se sent heurtée par les questions sur l’aide à mourir et ne sait pas quoi faire de son vote aux législatives, les 30 juin et 7 juillet 2024. Aux élections européennes, le 9 juin, elle avait voté la liste Les Républicains de François-Xavier Bellamy.
Pour certains fidèles, comme Claire, le glissement vers l'extrême droite s'est fait il y a longtemps. "Je votais déjà très à droite", confesse-t-elle. Mais elle estime que les bouleversements actuels sur l’échiquier politique ont aussi fait venir davantage de pratiquants dans son camp. Selon elle, "l'argument de faire barrage à l'extrême gauche marche très très fort en ce moment. Beaucoup plus qu'il y a cinq, dix, vingt ans, où le vote catholique était plutôt morcelé".
Devant cette église de Rambouillet, ce discours de "faire barrage à l’extrême gauche" a remplacé "freiner la progression de l’extrême droite".
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