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Avec David Rachline, le FN espère faire ses premiers pas au Sénat

Le maire de Fréjus compte parmi les rares chances du Front national pour ces élections, qui se tiennent le 28 septembre. L'attitude des grands électeurs divers droite sera décisive dans l'issue du vote. 

Article rédigé par Ariane Nicolas
France Télévisions
Publié
Temps de lecture : 8min
Le maire FN de Fréjus (Var), David Rachline, le 15 septembre 2014, dans son bureau. (ARIANE NICOLAS / FRANCETV INFO)

Ne vous fiez pas à son sourire détendu et à la cigarette qu'il allume tranquillement dans son bureau : David Rachline est un homme en campagne. Le maire Front national de Fréjus (Var), 27 ans en décembre, a été choisi pour représenter son parti aux sénatoriales dans le Var. Il est, avec Stéphane Ravier, dans le 7e arrondissement de Marseille (Bouches-du-Rhône), l'un des rares espoirs frontistes de victoire, le 28 septembre.

Arrivé en tête aux européennes, après une forte poussée aux municipales, le parti de Marine Le Pen souhaite conforter son implantation locale en entrant dans une assemblée où aucun responsable FN n'a jamais été élu. Que faudra-t-il à David Rachline pour emporter les suffrages des grands électeurs (députés, sénateurs, conseillers régionaux, généraux et délégués des conseils municipaux) face aux cinq autres listes engagées dans la course ? 

Le Var, laboratoire du FN

David Rachline ne s'en cache pas, devenir sénateur ne le fait pas particulièrement rêver. "Au départ, je n'avais pas envisagé de me présenter. Mais il a été décidé au sein du parti que seuls des maires, plus proches du terrain, se présentent. J'ai accepté, car je suis au service de mon mouvement et de ma présidente, Marine." Le premier candidat pressenti, Frédéric Boccaletti, secrétaire départemental du FN 83, atterrit ainsi 3e sur la liste FN, derrière Claudine Kauffmann, conseillère municipale de La Celle, pour cette élection qui se déroule à la proportionnelle.

Depuis quelques années, le Var se veut le laboratoire du FN : c'est à Fréjus que s'est tenue l'université d'été du Front national de la jeunesse, début septembre. La fédération FN du département est d'ailleurs la plus importante de France. Le Var compte trois mairies FN (Fréjus, Cogolin et Le Luc) et pas loin de 200 élus répartis dans les conseils municipaux, généraux et régional de Provence-Alpes-Côte-d'Azur. 

Les élus de droite comme de gauche savent donc qu'ici, il faut composer avec le FN. En plus des courriers envoyés aux grands électeurs, David Rachline et son équipe se sont donnés pour mission de rencontrer les 153 maires du Var. Pour l'heure, il estime avoir été "toujours bien accueilli". "Les maires ont une démarche républicaine. Ils reçoivent, écoutent. Les  problématiques rencontrées par les municipalités ne sont pas très politiques, elles dépassent les étiquettes partisanes." 

"Mes adversaires ? Tous ces élus qui ne servent à rien"

Pour faire valoir sa candidature, David Rachline, qui doit faire face à une polémique après avoir baissé les subventions de certaines associations considérées comme politiquement hostiles, entend parler ruralité, rythmes scolaires, réforme territoriale ou défense des services publics. Il parie aussi sur la colère des grands électeurs face à des ténors locaux "qui envisagent le Sénat comme une maison de retraite". "Mes adversaires, ce sont tous ces élus qui ne servent à rien", dit-il : les sénateurs sortants Hubert Falco et Christiane Hummel à l'UMP, Pierre-Yves Collombat pour le PS et surtout, le député-maire de Saint-Raphaël, Georges Ginesta, 3e sur la liste UMP. Son principal rival.

Rencontré dans son bureau de Saint-Raphaël, l'élu UMP, âgé de 72 ans, assure qu'il ne postule pas à la Haute Assemblée pour pantoufler. "Le Sénat a une réelle chance de passer à droite. Trois ans à attendre l'alternance à l'Assemblée nationale, c'est trop. Je préfère prendre les décisions dès à présent." Mais David Rachline ne manque pas de glisser aux grands électeurs que Georges Ginesta "est un cancre de l'Assemblée", avec zéro question orale, rapport ou proposition de loi l'an passé, et une présence erratique au palais Bourbon, d'après Nos Députés.fr. Autre casserole : Georges Ginesta est accusé par Le Canard enchaîné d'avoir fait passer sa villa à 2,5 millions d'euros pour sa permanence parlementaire, empochant ainsi 6 278 euros bruts par mois au titre de l'indemnité représentative de frais de mandat grâce à cette manœuvre.

Le député-maire UMP de Saint-Raphaël, Georges Ginesta, le 4 janvier 2011. (  MAXPPP)

"Pour les sénatoriales, Ginesta sort le stradivarius et prétend faire demain ce qu'il n'a pas fait hier, peste David Rachline. Je propose au contraire du dynamisme, une conviction, et un tempérament nouveaux." Regard droit et ton calme, le député-maire UMP reste persuadé que le vote utile l'emportera : "Un sénateur FN n'apporterait rien, il serait inefficace et totalement isolé, puisqu'il n'aurait pas de groupe constitué au Sénat. D'ailleurs, on voit bien les difficultés qu'ont les députés FN à faire entendre leur voix." Mais le maire de Fréjus n'en démord pas : "Les idées patriotes doivent être portées au Sénat. Que les Français soient représentés, c'est la moindre des choses !"

Les grands électeurs divers droite "convoités"

Dimanche 28 septembre, 2 193 grands électeurs varois participeront au scrutin. Si Georges Ginesta "n'imagine pas de dispersion de voix de gauche", il n'écarte pas "le risque que certains élus divers droite se tournent vers le FN". Pour l'emporter, le Front national devrait obtenir environ 380 voix, soit le double du nombre de ses grands électeurs de base. Une gageure, d'autant que dans les petites mairies, le scrutin à la proportionnelle (avec l'élection de délégués du conseil municipal) réduit le nombre de grands électeurs FN, favorisant ceux de la majorité. David Rachline se montre néanmoins confiant : "Il y a quelques jours, j'ai rencontré six maires. Trois d'entre eux m'ont affirmé qu'ils voteraient sûrement pour moi."  

Une assertion impossible à vérifier, mais qui fait tiquer certains. "Tout ça, c'est du bluff", assène Michel Tosan, l'un des rares maires socialistes ("non encarté au PS") du département, élu de Bagnols-en-Forêt. "Je connais bien les maires des communes rurales, je serais vraiment très, très surpris qu'ils votent pour David Rachline." Même son de cloche chez le divers droite Paul Boudoube, à la tête de Puget-sur-Argens. "Georges Ginesta sera élu", selon lui. Pour lui, le problème se situe plus du côté de l'inexpérience des frontistes. "Un simple exemple : les conseillers municipaux FN de ma commune ont voté mon budget, alors qu'ils sont dans l'opposition..." 

Un conseiller municipal divers droite de l'ouest du département confie qu'il envisage tout de même de voter pour Rachline. "Tout le monde attend qu'il fasse le ménage, on n'en peut plus de la bande à Falco", s'exclame-t-il, non sans ironie : "On n'a jamais été autant courtisés que cette année, nous, les divers droite". Selon lui, le scrutin des sénatoriales, strictement secret, peut jouer en faveur du Front national. "Certains élus se disent au centre, mais à titre privé, ils disent qu'il y a trop d'Arabes dans la région. Qui sait ce qu'ils voteront le 28 septembre ?" 

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