: Vidéo Ciblage électoral : des techniques qui permettent de s'approcher d'un profilage politique
Pour décrocher le vote des indécis et convaincre les abstentionnistes, les partis politiques font de plus en plus appel à des sociétés privées spécialisées dans la collecte et l'analyse de données. Au cœur de la campagne présidentielle, "Complément d'enquête" s'est intéressé à ces "data brokers" et à leurs techniques de ciblage. Pour la première fois, l’une de ces sociétés a accepté d'ouvrir ses portes aux journalistes et de réaliser une simulation.
Zecible est une entreprise familiale, ce qui ne l'empêche pas d'être un des leaders du marché de la donnée. Elle détient celles de 38 millions de Français, récupérées en toute légalité via des partenariats avec des sites comme EasyVoyage, SeLoger ou AlloCiné (quand les internautes cochent, pas toujours en connaissance de cause, une petite case qui autorise le traitement de leurs données personnelles). Sa clientèle est surtout composée d'enseignes désireuses d'inciter à l'achat de leurs produits, mais depuis cinq ans, des femmes et des hommes politiques y ont fait leur apparition.
Une cible réduite pour une communication personnalisée
Quelles sont leurs demandes ? Julie Périssé, présidente de Zecible, a accepté de faire une simulation pour "Complément d'enquête". Tout commence avec cet outil : "créer un ciblage". Il permet de sélectionner des profils à qui seront envoyés un mail ou un SMS.
Prenons le cas d'un candidat qui souhaiterait communiquer sur une thématique précise, par exemple la taxation de l'essence. Il suffit de cocher le critère "automobile" pour toucher un public qui en possède une. Ce qui, chez Zecible, représente plus de 7,5 millions de contacts. Une communication à une telle échelle, qui s'apparente à une distribution massive de tracts, coûterait plus de 453 000 euros… et n'a "strictement aucun intérêt", selon Julie Périssé. "On préfère avoir des petites campagnes, de 1 000, 2 000, 3 000 profils, explique-t-elle, parce que là, on peut vraiment faire de la communication personnalisée et ciblée."
Pour affiner la cible, il peut être pertinent d'ajouter un critère complémentaire. On peut ainsi choisir de se limiter à "des profils dont le foyer a des revenus qui n'excèdent pas 3 000 euros". On passe alors de 7,5 millions de contacts à 1,4 million, ce qui reste "une énorme cible", souligne Julie Périssé. Enfin, on peut choisir de cibler particulièrement une zone géographique : dans ce cas, plutôt une zone rurale, où la voiture est plus largement utilisée. Dans notre exemple, le candidat aura in fine accès à 4 408 profils… pour la modique somme de 264 euros.
Des profils anonymisés
Ces profils sont anonymisés, car "on ne met jamais à la disposition d'un candidat ou d'un élu les bases de données qui composent nos fichiers, assure Julie Périssé. Le candidat ne verra jamais les coordonnées des personnes qu'il va contacter. Il n'aura jamais accès à leur e-mail, à leur numéro de téléphone, à leur identité". Pourtant, avec tous les critères dont dispose sa base de données, les techniques de Zecible permettent de s'approcher d'un profilage politique. Le rêve de tout candidat...
Extrait de "Big data : quand les politiques nous ciblent !", un document à voir dans "Complément d'enquête" le 14 avril 2022.
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