Mort de Nahel : "On est bouleversés, exténués, immensément tristes", confie le maire de Rouen qui appelle à l'apaisement
Nicolas Mayer-Rossignol, maire socialiste de Rouen, s'est dit vendredi 30 juin sur franceinfo, "bouleversé", "fatigué" et "exténué" après la troisième nuit d'émeutes qui a touché plusieurs villes de France dans la nuit de jeudi à vendredi en réaction à la mort de Nahel mardi à Nanterre. Quelque 249 policiers et gendarmes ont été légèrement blessés, selon le ministère de l'Intérieur. Et Rouen n'a pas échappé à cette violence.
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Plusieurs quartiers ont été dégradés. Le maire de la ville normande se dit "extrêmement inquiet" pour la prochaine nuit. "Ça fait trois jours et c'est de pis en pis. Ce n'est pas la peine de faire de la langue de bois. Je ne vois pas tellement pourquoi ça se calmerait", a-t-il expliqué.
franceinfo : Dans quel état sortez-vous de cette troisième nuit d'émeutes ?
Nicolas Mayer-Rossignol : On est bouleversés, on est fatigués, on est exténués. On est immensément tristes et inquiets parce qu'il y a des dégradations partout. C'est un jeune qui venait d'avoir un boulot, qui a sa voiture brûlée, qui ne peut plus aller bosser. Il va perdre son boulot. C'est une petite mamie qui ne peut plus retirer de l'argent parce que le bureau de poste a cramé. Elle ne peut plus faire ses courses. C'est un monsieur qui était hier soir dans un magasin qui était en train d'être pillé. Il est tombé et est maintenant au CHU. Il risque de décéder. J'appelle au calme, j'appelle au calme, j'appelle au calme... David Lamiray le maire de Maromme dans l'agglomération rouennaise, a été pourchassé pendant la nuit.
Comprenez-vous la colère de ces jeunes ?
La souffrance, la douleur, et même la colère, je la comprends complètement.
Mais la violence ne résout strictement rien et surtout, elle est contre-productive."
Nicolas Mayer-Rossignol, maire de Rouenà franceinfo
D'une part, elle donne une extrême mauvaise image des quartiers, de la population, de Françaises, de Français et en particulier des jeunes. On parle de gamins de 14-15 ans. D'autre part, elle se retourne contre les Françaises et les Français les plus modestes qui habitent dans ces quartiers. Ceux-là ne peuvent plus se déplacer parce qu'il n'y a plus de bus, parce que les transports en commun ne passent plus. Ils ne peuvent plus aller bosser, etc. Franchement le pays a besoin d'apaisement. Je le dis au gouvernement. Vous savez ce qu'ils nous disent les jeunes : "Quand les paroles ne suffisent pas pour être écouté, on voit bien qu'il faut brûler, il faut casser pour être entendus. Si vous n'écoutez pas, si vous méprisez, si vous divisez le pays derrière vous en récoltez les fruits". Je vous assure qu'à Rouen comme ailleurs, ces fruits-là ont très mauvais goût.
Que faut-il faire pour apaiser les quartiers ?
On a besoin de moyens de proximité. On a besoin d'aider les associations locales, les éducateurs. On a besoin d'aider les profs, les écoles, les crèches. On a besoin de mettre des moyens beaucoup plus efficaces et rapides sur la politique de la ville. C'est bien de mettre des moyens sur l'Agence de rénovation urbaine, mais quand ça met cinq ans, dix ans, quinze ans pour changer un immeuble, les habitants du quartier qui voient une friche qui n'a pas bougé pendant quinze ans pensent qu'on ne s'occupe pas d'eux. La police n'est pas proche, malheureusement, elle est trop loin. Ils font tout ce qu'ils peuvent, les pauvres. La plupart des policiers sont parfaitement professionnels, rigoureux, sérieux, humains. Sauf que, s'ils ne sont pas intégrés dans le quartier, vous avez évidemment des risques d'affrontements. Et surtout, si vous n'envoyez pas le message au niveau national, que vous entendez, vous écoutez tout le monde et si au contraire vous envoyez le message que vous passez en force, que vous ne voulez pas écouter, derrière, il y a des conséquences.
Vous appréhendez la nuit la prochaine ?
Je ne vais pas vous mentir, pour la nuit prochaine, je suis extrêmement inquiet. Ça fait trois jours et c'est de pis en pis. Ce n'est pas la peine de faire de la langue de bois. C'est l'élu local qui vous parle. Personnellement, je ne vois pas tellement pourquoi ça se calmerait la nuit la prochaine. Je ne le souhaite pas évidemment. J'appelle au calme depuis le début. On est des milliers d'élus locaux sur le terrain pour essayer d'apaiser, comme des milliers de jeunes des quartiers eux-mêmes. On essaie d'apaiser, comme des milliers de grands frères, de papys, de mamies, de mamans, de parents, on essaye d'apaiser. Mais la colère est immense. Il faut des gestes très forts au plan national.
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