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Affaire Pierre Palmade : que risque l'humoriste après son accident sous l'emprise de stupéfiants ?

La question est de savoir si la qualification d'homicide involontaire sera retenue, après qu'une passagère enceinte a perdu son enfant à naître. Dans ce cas, et si plusieurs circonstances aggravantes sont prises en compte, le comédien risque jusqu'à dix ans de prison.
Article rédigé par franceinfo
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  (FRANCOIS GUILLOT / AFP)

L'enquête sur l'accident de la route dans lequel Pierre Palmade est impliqué se poursuit. Alors qu'il circulait à hauteur de Villiers-en-Bière, près de Melun (Seine-et-Marne), en direction de Dammarie-les-Lys, vendredi 10 février, en début de soirée, le véhicule de l'humoriste de 54 ans s'est déporté sur la voie de gauche, sans raison apparente, selon une source proche du dossier à franceinfo. Il a alors percuté un autre véhicule qui arrivait en face. 

Quatre personnes ont été gravement blessées dans l'accident : Pierre Palmade, un homme de 40 ans, une femme enceinte et un enfant de 6 ans. Le parquet a précisé que la femme enceinte avait perdu l'enfant qu'elle portait. Dans la journée de samedi, la famille de l'humoriste a annoncé que ses jours n'étaient "plus en danger". Les analyses toxicologiques ont révélé qu'il conduisait sous l'emprise de la cocaïne, selon le procureur.

L'enquête est donc désormais menée pour "homicide et blessures involontaires ayant entraîné une incapacité totale de travail supérieure à trois mois, par conducteur sous l'emprise de produits stupéfiants". Franceinfo fait le point sur ce que risque l'humoriste dans cette affaire.

Pourquoi une enquête a-t-elle été ouverte pour "homicide involontaire" ?

La femme qui se trouvait dans la voiture percutée par le comédien a perdu l'enfant qu'elle portait, ce qui a motivé, selon le parquet, la qualification d'"homicide et blessures involontaires" pour l'enquête. Elle était enceinte de six mois et demi, a précisé le procureur de Melun à l'AFP. Peut-on parler d'homicide dans ce cas ? D'après un arrêt de la Cour de cassation qui date du début des années 2000, l'homicide involontaire ne peut s'appliquer à un enfant à naître. En effet, seul un bébé né vivant a une personnalité juridique. "Si l'enfant est né vivant, la qualification d'homicide involontaire pourra être maintenue. S'il est mort-né, le statut de personne, donc la qualification d'homicide involontaire, ne sera pas possible", détaille Rémy Josseaume, avocat en droit routier, sur franceinfo

Malgré cette jurisprudence, le tribunal de Tarbes avait prononcé une décision inverse en 2014, finalement annulée en appel. "Un chauffard qui avait percuté une femme enceinte, causant la mort de l'enfant in utero, a été condamné pour "homicide" par le tribunal correctionnel de Tarbes. Mais le parquet général a fait appel et la cour d'appel de Pau a infirmé cette décision", explique Jean-René Binet, professeur de droit civil à l'université Rennes 1, interrogé par La Croix (article payant).

Dans l'affaire impliquant Pierre Palmade, l'autopsie déterminera si l'enfant était en vie hors du ventre de sa mère. "Les médecins vont vérifier si, lorsqu'ils ont extrait l'enfant, celui-ci a, par exemple, respiré, s'il avait des signes de vie ou pas", explique Rémy Josseaume. Auquel cas le comédien pourrait être poursuivi pour homicide involontaire. Il sera aussi poursuivi pour ce chef si l'une des personnes hospitalisées succombe à ses blessures. Car le pronostic vital de l'enfant est toujours engagé, a affirmé, lundi, une source judiciaire à franceinfo.

Quelle peine encourt l'auteur d'un accident ?

"L'homicide involontaire est le fait de causer la mort de quelqu'un sans le vouloir. Ce comportement ne constitue pas un crime mais un délit, car la loi prend en compte l'absence de volonté de tuer la victime. Il peut s'agir par exemple d'un accident de la route mortel", rappelle service-public.fr.

L'homicide involontaire commis par un conducteur peut être puni de 5 ans d'emprisonnement et 75 000 euros d'amende. La peine encourue peut être alourdie par une circonstance aggravante. Dans ce cas, le conducteur peut être puni d'une peine pouvant aller jusqu'à 7 ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende. S'il y a plusieurs circonstances aggravantes, la peine peut aller jusqu'à 10 ans d'emprisonnement et 150 000 euros d'amende, toujours selon le site officiel de l'administration française.

Une conduite sous l'emprise de drogue est, par exemple, considérée comme une circonstance aggravante. Or, après l'accident de vendredi soir, "les analyses toxicologiques ont mis en évidence que Pierre Palmade conduisait sous l'emprise de produits stupéfiants (cocaïne)", a déclaré le procureur de la République de Melun. L'enquête a donc été requalifiée pour "homicide et blessures involontaires par conducteur sous stupéfiants".

"Si l'on en reste à des blessures involontaires aggravées, avec un mis en cause qui n'a pas d'antécédents judiciaires, il y a très peu de chances que celui-ci aille en prison. Dans la pratique, au pire des cas, l'auteur de l'infraction peut se voir sanctionner d'une peine de prison aménagée avec, par exemple, le port d'un bracelet électronique", précise Antoine Régley, avocat en droit routier au barreau de Lille, au Parisien (article payant). Ce spécialiste en droit des victimes de la route affirme ne "jamais" avoir vu, "dans un cas de blessures involontaires causées par un accident de la route, un individu écoper d'une peine de plus de deux ans de prison ferme, et donc non aménageable". En revanche, dans le cas d'une condamnation pour homicide involontaire, "le risque de séjourner en prison augmente", selon lui.

D'autres circonstances aggravantes peuvent-elles être retenues ?

Dans l'accident de Pierre Palmade, d'autres circonstances aggravantes pourraient être examinées, estime l'avocat Rémi Josseaume. "Il y a la vitesse du véhicule. Cela peut être aussi le franchissement de la ligne continue, parce que l'état du véhicule montre une collision extrêmement forte", explique-t-il.

L'enquête cherchera donc aussi à déterminer les circonstances de l'accident. "La seule certitude qu'on a aujourd'hui, c'est qu'il sera poursuivi pour blessures involontaires, avec circonstance aggravante, car on a retrouvé dans ses analyses du stupéfiant", conclut Rémi Josseaume. Pierre Palmade devra être interrogé afin de faire toute la lumière sur les événements de vendredi soir.

Pour l'instant, son état de santé ne permet pas de l'auditionner, précise à France Télévisions le procureur de Melun. Ce dernier ajoute que le téléphone de l'humoriste, saisi, est en cours d'exploitation par les gendarmes. Par ailleurs, les enquêteurs sont en possession d'une vidéo de l'accident, issue d'une caméra embarquée dans une voiture et remise à la police par deux automobilistes.

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