Projet de loi sur l'irresponsabilité pénale : "De la poudre aux yeux", selon l'avocat de la sœur de Sarah Halimi
Gilles-William Goldnadel reconnaît l'importance de la séparation des pouvoirs mais critique tout de même Emmanuel Macron, "pointilleux quand ça l'arrange" sur le sujet.
Alors que, onze jours après la confirmation de l'absence de procès dans l'affaire Sarah Halimi, le gouvernement a annoncé dimanche 25 avril un projet de loi sur l'irresponsabilité pénale, Gilles-William Goldnadel, l'avocat de la sœur de cette sexagénaire juive tuée en 2017 affirme : "On nous fait croire que sans ce projet de loi, la décision de la Cour de cassation n'aurait pas pu être différente. C'est faux." Le 14 avril, la Cour de cassation a confirmé que le meurtrier de Sarah Halimi était pénalement irresponsable au moment des faits, en proie à une "bouffée délirante" lorsqu'il a tué sa voisine, après la consommation de stupéfiants. Il ne sera donc pas jugé.
franceinfo : Comment accueillez-vous l'annonce de ce projet de loi ?
Gilles-William Goldnadel : C'est de la poudre aux yeux. On nous fait croire que sans ce projet de loi, la décision de la Cour de cassation n'aurait pas pu être différente. C'est faux. La réalité c'est d'abord une instruction menée en dépit du bon sens, qui n'a jamais voulu recevoir l'avocat de la partie civile que je suis. C'est la première fois que je vois cela en quarante d'exercice. La juge d'instruction n'a pas non plus voulu procéder à la reconstitution de la scène du crime.
"Les experts étaient divisés et certains ont considéré que le discernement de Kobili Traoré n'était pas aboli car il avait pris délibérément de la drogue. D'ailleurs, ce n'était pas la première fois qu'il avait des bouffées délirantes."
Gilles-William Goldnadel, l'avocat de la soeurà franceinfo
Sa famille a raconté qu'il avait un comportement très étrange quand il avait pris du cannabis. C'est la raison pour laquelle l'un des experts a affirmé qu'en fumant cette drogue, Koli Traoré pouvait parfaitement s'attendre à avoir un comportement tel qu'il a eu. La juge d'instruction a choisi une expertise par rapport à une autre. Ce procès s'est donc terminé par un déni de justice que l'avocat et le Juif que je suis ne sauraient tolérer.
Vous avez donc choisi de relancer la procédure en Israël puisqu'il s'agit d'un crime antisémite. Cependant, il s'agira d'un procès par contumace, sans extradition possible. Quel est l'intérêt dans ce cas ?
C'est apaisant et très puissant symboliquement. C'est donc très important pour la soeur de Sarah Halimi, pour l'avocat qui vous parle, pour une grande partie de la communauté juive française et même de la population de ce pays tout entier qui est extrêmement troublée par cette affaire. Cela dit, cela ne remplacera certainement pas ce qu'aurait dû faire la justice française.
Emmanuel Macron a été relativement loin dans son droit d'expression en affirmant que, selon lui, le tueur devait être considéré comme responsable. Le Conseil supérieur de la magistrature parle de mise en cause de la justice. Comprenez-vous leur agacement ?
Je n'ai rien à reprocher à Emmanuel Macron dans la façon dont cette affaire a été menée. Du point de vue de la séparation des pouvoirs, c'est effectivement délicat et je comprends le ressenti du Conseil supérieur de la magistrature. Cependant, quand il constate des dysfonctionnement commis par les magistrats eux-mêmes, il ne les sanctionne pas. Il est donc pointilleux quand ça l'arrange.
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