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Braquages de bijouteries : ce que disent les chiffres

La mise en examen d'un bijoutier pour homicide volontaire sur un braqueur relance le débat sur la sécurité des professionnels du secteur, qui expriment leur ras-le-bol. 

Article rédigé par Catherine Fournier
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
La bijouterie Casty à Paris, victime d'un braquage à la voiture-bélier, le 9 septembre 2013.  (MAXPPP)

"Depuis quelques années, les chiffres des braquages de bijouteries sont en forte hausse. Il y a un braquage par jour en France !" L'estimation est signée Christine Boquet, présidente déléguée de l'Union de la bijouterie horlogerie, dans Nice-Matin. Elle s'exprimait, lundi 16 septembre, à l'occasion du rassemblement de soutien à Stephan Turk, le bijoutier niçois mis en examen pour avoir tué un jeune braqueur. Le lendemain, un autre professionnel du secteur fait le même constat dans L'Indépendant : "Depuis un an et demi, le nombre de vols et de braquages a explosé, on est très inquiets." 

Les chiffres officiels disent-ils la même chose ? Francetv info s'est penché sur la question.

Les braquages de bijouteries explosent entre 2008 et 2011...

C'est un fait, les bijouteries sont devenues une cible privilégiée des braqueurs à partir de 2008. Au nombre de 143 cette année-là, les braquages de bijouterie passent à 223 en 2009, 290 en 2010 et 359 en 2011. Soit une multiplication par 2,5 en trois ans et une explosion de 61% en deux ans, selon les chiffres de l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). 

Cette augmentation exponentielle est spécifique au secteur. Car pour l'ensemble des commerces, banques ou transports de fonds, les vols à main armée ont constamment baissé entre 2009 et 2012 (-26,4% en zone police et -19,1% en zone gendarmerie).

Le boom des cours de l'or en cause. Comme le relève Le Monde (article abonnés), "les malfaiteurs, qui délaissent les banques, les stations-services et les grandes surfaces se reportent sur les commerces de l'or". Entre 2008 et 2011, la part des bijouteries dans le nombre total de vols à main armée passe de 3,5 % à 10,5 %. Parallèlement, le cours de l'or, valeur refuge en pleine crise économique, explose, atteignant un record en août 2011, à près de 2 000 dollars l'once d'or. L'évolution des deux courbes est frappante, comme le démontre le journaliste Arnaud Comte sur France 2 : 

Les chiffres des braquages de bijouterie (ARNAUD COMTE - FRANCE 2)

... mais sont à la baisse depuis 2012

Contrairement à ce qu'avancent certains professionnels du secteur, la situation s'est plutôt améliorée depuis un an et demi. En 2012, le nombre de braquages de bijouteries a reculé à 327. Et pour 2013, l'ONDRP relève une baisse de 18,6% sur les huit premiers mois. La tendance est donc en train de s'inverser, car pour l'ensemble des commerces, les vols à main armée repartent à la hausse. L'ONDRP fait état d'une augmentation de 6,8% chez les policiers et de 14,7% chez les gendarmes depuis le mois d'août 2012. Le Nord, le Pas-de-Calais et les Alpes-Maritimes sont particulièrement concernés. 

La sécurisation des bijouteries invoquée. Si l'on regarde la courbe des cours de l'or, il n'est pas étonnant de constater que celle-ci amorce une baisse en août 2012, pour poursuivre sa chute au cours de l'année 2013. Malgré un petit regain cet été, l'once d'or a regagné ses niveaux de fin 2010, à 1 300 dollars. Ce n'est pas pour autant la seule raison du recul des braquages de bijouteries. "La collaboration renforcée entre le ministère de l'Intérieur et la profession a abouti à la sécurisation d'un certain nombre d'établissements et à des arrestations", explique à francetv info Christophe Soullez, responsable de l'ONDRP. Un Observatoire de sûreté de l'horlogerie-bijouterie, créé en 2003, se réunit chaque année pour dresser un bilan.

Reste que tous les établissements n'ont pas les moyens de se sécuriser. La bijouterie de quartier de Stephan Turk, à Nice, disposait d'une caméra de surveillance mais pas d'un sas de sécurité. Et si les braquages décroissent, ils sont de plus en plus violents. Le risque de dérapage est important car la majorité sont commis en plein jour, par deux hommes, et 20% d'entre eux (contre 12% pour les petites et grandes surfaces et les agences bancaires) sont menés avec au moins une arme d'épaule. A Nice, c'était un fusil à pompe. D'autres vont jusqu'à s'équiper d'une scie à métaux ou d'une voiture-bélier pour déjouer les systèmes de sécurité. 

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