Le patron du Raid répond aux critiques sur ses choix tactiques
Les responsables politiques ne sont pas les seuls à débattre de l’intervention
du Raid à Toulouse. Des spécialistes des opérations délicates, comme Christian
Prouteau, fondateur du GIGN, et d’anciens membres des forces spéciales
israéliennes, mettent en doute la validité des décisions du Raid. Le patron de
l’unité d‘élite de la police leur répond dans un interview à France Info.
Les 30 heures d’attente
"Qui
attend 30 heures quand il n'y a pas d'otages ? Toute l'opération ressemble à
une démonstration de stupidité ". Ancien chef de l'unité d'intervention de
la police israélienne, Alik Ron ne comprend pas la stratégie du Raid. "Je
présume que l'ordre était de le capturer vivant, mais il y a une limite ".
Un ancien officier des forces spéciales israéliennes, Lior
Lotan, le rejoint dans la surprise : "Ou ils ont dû passer à l'action
avant d'avoir terminé tous leurs préparatifs, ou bien il y a eu un problème
dans la planification de l'opérations ".
Amaury
de Hautecloque assume la décision de ne pas donner l’assaut pour préserver les
chances d’arrestations du forcené. S’il s’était agi de l’abattre, c’est quelque chose que j’aurais
pu opérer en toute sécurité dès le mercredi matin à 3h30, c’était extrêmement
facile pour moi, et je n’aurais eu à déplorer aucun blessé.
L’utilisation de gaz
"Il fallait le
bourrer de gaz lacrymogène. Il n'aurait pas tenu cinq minutes ",
estime Christian Prouteau. "Au lieu de ça, ils ont balancé des
grenades à tour de bras. Résultat : ça a mis le forcené dans un état
psychologique qui l'a incité à continuer ".
Le recours aux gaz
lacrymogènes faisait bien partie du plan, explique Amaury de Hautecloque : "J’avais une idée précise de sa présence et de
lui lancer des gaz lacrymogènes pour saturer la pièce où il était et s’assurer
de sa personne au moment où il sortirait. Voilà ce qui était prévu. C’est la
raison pour laquelle nous sommes tous intervenus avec des masques à gaz, tel
que ça avait été validé par les autorités gouvernementales ".
"Il était dans la salle de bain, on
pouvait très bien envoyer les gaz par les aérations" - Christian Prouteau
La charge du forcené a empêché le Raid de procéder comme prévu, regrette son patron : "Mohamed Merah
a choisi son destin puisqu’il est sorti de la salle de bain les armes à la main,
il nous a engagés immédiatement en faisant feu. J’ai continué, pourtant, à donner
l’ordre de ne riposter qu’avec des armes non-létales et notamment des grenades
offensives afin qu’il puisse être choqué et que nous puissions nous assurer de
sa personne ".
Christian
Prouteau aurait aussi suggéré l’utilisation d’autres substances : "Dans
ce cas-là il faut utiliser ce qu’on appelle des disperseurs, qui sont des gaz
incapacitants à hautes doses . Il était dans la salle de bain, on
pouvait très bien envoyer les gaz par les aérations, le GIGN l’a déjà fait dans
d’autres interventions et ça a été fait ailleurs ".
La polémique
"Monsieur Prouteau n’est plus dans une unité d’intervention
depuis de très nombreuses années. Je ne suis pas là pour polémiquer ", arrête Amaury de
Hautcloque. "J’estime que l’unité est allée jusqu’à l’extrême
possibilité que nous avions d’agir en toute sécurité. Les cinq policiers blessés
vont bien. Trois d’en eux sont déjà de retour parmi nous. Les deux derniers sont
rapatriés aujourd’hui par avion de Toulouse, et ils vont bien également ".
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