Nîmes : "On a désormais des tueurs à gages qui ont à peine 18 ans", constate un professeur de sciences criminelles
"On observe qu'il y a un rajeunissement des participants aux trafics" de stupéfiants, analyse mercredi 23 août sur franceinfo Jean-Baptiste Perrier, professeur de droit pénal et de sciences criminelles à l’Université d’Aix-Marseille, moins de 48 heures après la mort de Fayed, âgé de 10 ans, tué par balle à Nîmes dans un quartier gangréné par le trafic de drogues. Pour le spécialiste, "on a désormais des tueurs à gages, qui ont à peine 18 ans".
franceinfo : Comment expliquer cette montée de la violence dans le trafic de stupéfiants ?
Jean-Baptiste Perrier : Cette montée de la violence n'est pas soudaine, c'est une lente augmentation que l'on constate depuis plusieurs années. Ceci s'explique d'abord parce que le trafic est toujours plus rentable, donc il y a toujours plus d'argent et, évidemment, l'attrait, l'appât du gain fait que la violence peut s'accompagner d'actes de plus en plus graves. On observe aussi qu'il y a un rajeunissement des participants aux trafics et ce rajeunissement est souvent accompagné de violences plus importantes. On a des tueurs à gages désormais, qui ont à peine 18 ans et là où, peut-être il y a dix ou quinze ans, on était plutôt sur des participants qui avaient autour de 25-30 ans, aujourd'hui il n'est pas rare de voir des mineurs qui ont treize ou quatorze ans qui sont déjà en train de guetter, de participer sur les points de deal. On a de très jeunes majeurs qui participent à des règlements de comptes aussi.
On parle de Nîmes, on peut évidemment penser à Marseille... quand on dézoome, est-ce qu'on peut chiffrer ce trafic de drogue ?
On a des estimations, un ordre d'idée. Les dernières étaient autour de trois milliards d'euros, l'Insee avait chiffré ça à quatre milliards d'euros, il faut comprendre que c'est le chiffre d'affaires de Nestlé en France. Donc évidemment, il y a énormément d'argent, on estime qu'il y a des points de deal qui rapportent à Marseille 80 000 euros par jour. Et donc c'est la raison pour laquelle il y a un tel intérêt économique, qu'il y a une véritable guerre qui se livre pour l'argent que représente le trafic de stupéfiants.
Comment on en arrive à ces règlements de comptes ?
Il y a plusieurs explications, mais ce sont souvent des affrontements entre bandes rivales, c'est ce que l'on peut observer pour notamment récupérer des points de deal.
"Lorsqu'il y a des opérations, notamment policières, qui vont démanteler un réseau, un autre se reconstitue presque aussitôt, il faut conquérir le territoire qui était perdu par un autre."
Jean-Baptiste Perrier, professeur de droit pénal et de sciences criminellesà franceinfo
C'est la principale explication. C'est une hydre, dès qu'on coupe une tête, une autre repousse. Ça peut accentuer le phénomène de violence parce que ça perturbe le trafic, ça perturbe les réseaux et donc nécessairement, ces périodes de perturbation sont souvent des périodes de violence.
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