Procès Clearstream : Villepin accuse Sarkozy d'avoir "inspiré" le Parquet
Le réquisitoire a pourtant été plus clément que lors du premier procès : quinze mois de prison avec sursis contre 18 mois avec sursis et 45.000 euros d'amende. Mais dès la sortie de la salle d'audience Dominique de Villepin a critiqué l'attitude du parquet, qui est selon lui sous l'autorité de Nicolas Sarkozy. Il faut dire que Dominique de Villepin a eu tout le temps, durant l'après midi de réfléchir à sa petite phrase. Le réquisitoire à l'encontre de Jean-Louis Gergorin (30 mois dont 18 avec sursis et 45.000 euros d'amende) et Imad Lahoud (30 mois dont 15 avec sursis et 45.000 euros d'amende) a en effet duré plusieurs heures.
L'avocat général Dominique Gaillardot est allé droit au but. Quelques minutes à peine après le début de son intervention, une phrase donne le ton de ce qui va suivre : "il y a bien eu dénonciation, à l'initiative de Jean-Louis Gergorin, seul." Dominique Gaillardot est ferme, sans lui, pas d'affaire Clearstream. "Au delà de la mauvaise foi", il y a chez l'ancien PDG d'EADS "une véritable volonté de nuire, de calomnier et de dénoncer", avec pour seule obsession les luttes de pouvoir à la tête du groupe EADS, explique l'avocat général. Évacuant ainsi rapidement la thèse de la machination politique.
"La fable du corbeau qui voudrait se faire passer pour un pigeon"
Mais si Gergorin, qui prend consciencieusement des notes durant tout le réquisitoire, est "l'instigateur, le dénonciateur, et le seul bénéficiaire de l'opération", Dominique Gaillardot décrit de manière peu flatteuse le "couple" Lahoud-Gergorin. C'est "la rencontre de deux intelligences perturbées, de deux menteurs et manipulateurs", assène-t-il de manière cinglante. Le sort des deux hommes est lié, car leur "magouille" est un permanent échange de données, d'informations falsifiées. Qui a glissé le nom de Sarkozy sur les listings ? Impossible de le dire. "Ces listes sont bien les manipulations de l'un et les obsessions de l'autre. C'est une complicité fusionnelle et des échanges qui ont permis la constitution de ces listings", estime l'avocat général.
Menteur, opportuniste, manipulateur, l'informaticien aux petites lunettes rondes ne semble pas avoir réussi à convaincre Dominique Gaillardot qu'il n'était qu'une marionnette. "Ne vous laissez pas abuser par sa posture de modeste professeur de mathématiques qui veut jouer le second rôle", prévient l'avocat général. (Lahoud est d'ailleurs venu à l'audience accompagné par ses élèves...) Les condamnations de Lahoud dans plusieurs affaires d'escroqueries confirment pour l'avocat général, "sa capacité à manipuler, faire des faux et à se servir des autres". "Nous avons bien à faire à un escroc, un vrai".
C'est ensuite au tour de Jean-Louis Pérol d'exposer les arguments de l'accusation contre Dominique de Villepin. Son réquisitoire décortique trois verbatims de réunions scrupuleusement consignés par le général Rondot, et un petit déjeuner avec Arnaud Lagardère. Selon l'avocat général, en janvier 2004, Dominique de Villepin "acquiert la connaissance de la dénonciation, en mars que la source est en garde à vue, et en juillet il apprend la fausseté des listings".
Il a ensuite le choix : parler ou se taire. Et c'est là que se fonde selon l'avocat général la "complicité par abstention" de dénonciation calomnieuse. Car lorsqu'il apprend que les comptes figurant sur ces listings n'existent pas, que les noms et les listings sont faux, Dominique de Villepin peut "tout arrêter", souligne Jean-Louis Pérol. Mais il choisit de ne rien dire et de laisser Jean-Louis Gergorin continuer sa dénonciation calomnieuse. Il y avait "une convergence d'intérêts entre Dominique de Villepin et Jean-Louis Gergorin, l'un au sein d'EADS, l'autre au sein de l'UMP" , affirme l'avocat général.
Caroline Caldier
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