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Comment les écoles sont-elles protégées contre la menace terroriste ?

Depuis que le groupe Etat islamique a incité ses partisans à s'attaquer à l'école républicaine, l'angoisse grandit chez les parents et les enseignants. Francetv info fait le point sur les moyens mis en œuvre dans les établissements.

Article rédigé par Marthe Ronteix
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Des policiers surveillent l'entrée de l'école maternelle Jean-Perrin à Aubervilliers, le 14 décembre 2015. (CHARLES PLATIAU / REUTERS)

L'agression avait été inventée de toutes pièces, mais a ravivé une inquiétude déjà bien présente chez les enseignants. Après la fausse attaque au cutter contre un instituteur d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis), prétendûment commise au nom de l’Etat islamique, lundi 14 décembre, et depuis que le groupe jihadiste a incité ses partisans à s'en prendre aux enseignants français fin novembre, la peur s'infiltre dans les établissements scolaires. "Nos moyens de contrôle sont notoirement insuffisants", estimait lundi une enseignante d'Athis-Mons (Essonne) contactée par francetv info. 

Après l'incident d'Aubervilliers, la ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, a annoncé pour la fin de la semaine de nouvelles mesures avec son homologue de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. Elles s'ajouteront au dispositif mis en place au lendemain des attentats de novembre. Le sujet est sensible. Au ministère comme dans les inspections académiques, difficile d'obtenir des informations. Tout comme auprès des enseignants contactés par francetv info, qui témoignent sous couvert d'anonymat*. Voici ce que l'on sait du dispositif déjà mis en place. 

Des sorties scolaires sous conditions

Au lendemain des attentats du 13 novembre, le ministère de l’Education nationale avait limité voire interdit les sorties scolaires

Depuis le 30 novembre, "le "niveau alerte attentat" est maintenu en Ile-de-France et la vigilance renforcée continue de s'appliquer sur le reste du territoire", peut-on lire dans un communiqué publié le 2 décembre. Voyages et sorties sont de nouveau autorisés pour tous. Il est seulement demandé d’éviter les "lieux hautement touristiques". Les voyages scolaires en Ile-de-France doivent faire l’objet d’une information préalable auprès du rectorat.

Un contrôle renforcé des entrées dans les établissements

Les mesures prises au lendemain des attentats et toujours en vigueur concernent essentiellement l'accès aux établissements scolaires. Un adulte doit assurer l'accueil et le portail doit être fermé pendant les cours. Un contrôle visuel des sacs est possible et l'identité des personnes étrangères à l’établissement doit être systématiquement vérifiée. Les familles ne doivent pas s’attarder devant les locaux et le stationnement des véhicules y est interdit. 

Autant de contraintes résumées sur une affiche qui doit être visible dans tous les établissements de France. "Cela reste une vigilance basée essentiellement sur la nôtre, constate Evelyne, enseignante de CE1 dans l’Essonne. Nous, on est déjà dans une école un peu blockhaus, avec un portail fermé et un interphone, en dehors des périodes d'accueil des élèves. Donc ces consignes n’ont pas changé grand-chose." Seule nouvelle contrainte dans l’établissement d’Evelyne, la réalisation d’un exercice de confinement avant les vacances de Noël, le 19 décembre.

Paris bénéficie de mesures spécifiques. La maire, Anne Hidalgo, a rappelé, le 22 novembre, que "c’est plus d’un demi-million d’euros qui a été investi pour sécuriser 73 écoles et 15 établissements secondaires" depuis les attentats de janvier, rapporte le Huffington Post. Ce budget doit permettre d'accélérer l'installation de visiophones, de caméras de surveillance et de sas d’entrée sécurisés. 

Des exercices de confinement obligatoires

Depuis le passage du plan Vigipirate au niveau alerte attentat, tous les établissements doivent mettre en place un Plan particulier de mise en sûreté (PPMS), un dispositif créé en 2002 (PDF) mais peu courant jusqu'ici. Les établissements ont le choix entre plusieurs scénarios en fonction des risques auxquels ils peuvent être soumis.

Dans l'école de Julie*, enseignante de CM2, on trouve sur cette liste l’inondation, l’explosion sur la route nationale à proximité, le risque chimique ou encore l’intrusion. L'équipe a choisi la "version light" pour l'exercice. "C’est très compliqué à organiser parce qu’il faut demander des autorisations aux pompiers, à la mairie, au rectorat... Alors on a choisi de simuler la présence d’une voiture suspecte devant l’école, en accord avec la mairie", précise Julie. Les enseignants ont eu deux semaines pour préparer l'exercice. Le jour dit, les élèves devront se rassembler dans des lieux sécurisés prédéfinis et y attendre en silence la fin de l’opération. Les enseignants ont l’obligation d’expliquer la procédure aux élèves avant l'exercice. Les enfants ont rapidement fait le lien avec les récents attentats.

Dans le lycée de Maxime, professeur de physique-chimie dans une grande ville d'Ile-de-France, on a opté pour la simulation d'attentat. Les enseignants ont reçu une fiche les informant de la marche à suivre. "Les élèves ont bien joué le jeu. Ils ont tout de suite compris l’importance de l’exercice, raconte Maxime. Ils ont respecté les consignes : s’écarter des fenêtres, se rassembler au centre de la salle fermée à clé. Après 30 secondes, ils ont fait silence. En tout, ça a duré vingt minutes."

De nouvelles mesures d'ici la fin de la semaine

Le ministère de l'Education nationale, contacté par francetv info, n'a pas souhaité communiquer sur les mesures qui seront détaillées en fin de semaine par Najat Vallaud-Belkacem. Seule certitude, elles concerneront la "formation aux premiers secours d’un grand nombre d’enseignants" dans toute la France. 

Concernant l'Ile-de-France, Le Parisien (article abonnés) dévoile, mercredi 16 décembre, un "plan secret" élaboré par le rectorat de Paris et la préfecture de police pour sécuriser les écoles, collèges et lycées de la capitale et de sa petite couronne. Parmi ces recommandations, des boutons d'alerte pour prévenir au plus vite les secours en cas d'attaque, de la vidéoprotection consultable en temps réel par les responsables de l'établissement, ou encore la création d'"espaces par étage ou par classe (…) entièrement hermétiques et inaccessibles depuis l'extérieur".

* Les prénoms ont été modifiés.

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