Larmes et recueillement... Le 11e arrondissement de Paris sous le choc au lendemain d'attentats
Résumé d'une journée passée dans le 11e arrondissement de Paris, entre les différents lieux visés par les attaques terroristes.
Cela aurait pu être un samedi gris de novembre comme les autres. Mais au bar en bas de chez moi, un message, explicite, rappelle la nuit très courte et les attentats qui ont frappé Paris, vendredi 13 novembre."En raison des événements récents, nous informons que le bar n’ouvrira ses portes qu’à partir de 14 heures", dit le billet. Une jeune femme traverse la rue en courant. Elle pleure. Sur le chemin vers le Bataclan, les mines sont déconfites et les yeux rougis. Le 11e arrondissement est sous le choc.
Instantanés d’une journée à déambuler dans le quartier.
Bus noir et habitants hébétés près du Bataclan
Forêt de camions satellites et caméras tout autour du Bataclan. Au croisement entre le boulevard Voltaire et l’avenue Richard-Lenoir, les passants se mêlent aux journalistes, à quelques mètres de la salle de spectacle. La façade brille encore. Un long bus noir et des bâches en cachent l’entrée. Dans le silence, on assiste seulement au balai des voitures des services funéraires.
Aux abords du bataclan, croisement Voltaire et Richard-Lenoir. Journalistes et badauds sont maintenus écartés pic.twitter.com/awPtXlc1Tt
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
Manuela habite la rue d’à côté. Elle a tout entendu, cette nuit. Elle a "d’abord cru à des pétards" avant de comprendre. Et même si la préfecture recommande de rester chez soi, elle a été obligée de sortir. "Je suis assez choquée. J'avais besoin de venir ici, d’exorciser", m'explique-t-elle, avant de vite repartir.
Proches sous le choc à la mairie du 11e arrondissement
A la mairie du 11e arrondissement, place Léon Blum, une cellule d’urgence psychologique a été mise en place peu après les attentats. Dans la nuit, les équipes ont reçu 167 personnes, rescapées des fusillades. Ce matin, des proches de victimes et d'autres personnes dites "impliquées" viennent chercher de l’aide auprès des sept psychiatres et psychologues venus de Lille (Nord) en renfort. En parallèle, les mariages continuent.
Instantané 2 : les mariages n'ont pas été déprogrammés. du coup, deux époux sortent de la mairie. ça doit être, disons, particulier
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
Accompagné de deux amis, un homme sort de la mairie, le visage en larmes. Sa femme était au concert du groupe Eagles of Death Metal. Il n’a pas de nouvelles et repart sans savoir si elle est morte ou hospitalisée quelque part dans Paris. "On nous a dit de patienter", lâche-t-il en s’éloignant. Le manque d’informations tord les ventres.
Frédérique Warembourg, médecin psychiatre, décrit des personnes "extrêmement choquées" par ce qu’elles ont vu. "Beaucoup sont en état de stress très intense et souffrent de pathologies post-traumatiques sévères", explique-t-elle.
"L'événement que ces personnes ont vécu est vraiment extrêmement violent", dit la psychiatre
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Les psychiatres évaluent l'état de santé des proches ou témoins. "Soit on les garde un peu, soit elles sont en état de rentrer chez elles"
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Pour les proches de victimes, "on leur explique qu'on n'a pas de réponse. C'est extrêmement stressant pour eux" dit le Dr Warembourg
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Un couple, visage blême, repart main dans la main. Trop remué pour parler.
Le jeune homme était rue de Charonne et "a tout vu", m'explique sa compagne. Difficile de m'en dire plus. Ils repartent #ParisAttacks
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
Des hommages de la place Léon Blum à République
"Douleur, effroi, compassion." Le cahier d'hommages aux victimes n'en finit pas de se remplir devant la mairie du 11e arrondissement. Famille venue du Sud-Ouest, touristes américains ou habitants du quartier ont tous un petit mot pour les morts et les blessés. Une femme demande si elle peut donner son sang. On la redirige vers les hôpitaux.
Un peu plus haut, place de la République, les passants déposent bougies et fleurs.
Ils restent là, dans le silence de la ville, parfois troublé par les interventions de policiers en civil : "On circule, on recule. C'est pour votre sécurité." Au fond de la place, la devise de Paris, "Fluctuat nec mergitur", apparaît à la faveur de graffeurs.
"Fluctuat nec mergitur" in progress #ParisAttacks pic.twitter.com/IySGTgVr6z
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
Des résidents bouleversés rue Bichat
Au carrefour entre la rue Alibert et la rue Bichat, l'émotion est à son comble. Contrairement aux autres lieux que j'ai parcourus, on peut approcher les entrées du Carillon et du Petit Cambodge. Le sang a été nettoyé ou recouvert de sciure de bois, mais des gouttes persistent sur la façade du bar, criblée d'impressionnants impacts de balles.
Les impacts de balle dans les vitrines du Carillon glacent le sang #ParisAttacks pic.twitter.com/RsxLC0FJ4u
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
Installés autour d'un banc, Tarek et Pia ont du mal à s'en remettre. La maire de Paris, Anne Hidalgo, vient de les saluer, leur soufflant que "c'est bien d'être là".
Les deux sont du quartier, "nés ici". Ils connaissent tout le staff du Carillon. Vendredi, c'était soir de match. En temps normal, tout le monde rapplique, mais par chance pour leur groupe d'amis, personne n'était de sortie. Le sort tient parfois à quelques hasards, comme une écharpe oubliée chez soi ou une flemme subite de sortir.
"Si ça avait été le PSG qui jouait..." Tarek se sent chanceux. "ça se passe chez nous. C'est dingue" #ParisAttacks pic.twitter.com/L4KNDts56N
— Julie Rasplus (@julie_rs) November 14, 2015
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