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Bientôt un film hollywoodien sur le 13-Novembre ? "Je trouve ça inadmissible", s'énerve une rescapée du Bataclan

Article rédigé par Julie Rasplus
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 4min
Des Parisiens se rassemblent devant le Bataclan, le 13 novembre 2016, à Paris, un an après les attentats qui ont touché la capitale.  (MAXPPP)

Des producteurs américains ont annoncé travailler sur un film dont l'intrigue se déroulera à Paris pendant les attaques du 13-Novembre. Franceinfo a recueilli la réaction (agacée) de deux victimes. 

On connaît déjà le titre et le pitch. Dans Violent Delights ("Plaisirs violents" en français), un groupe de musiciens punk-rock, deux peintres et un jeune migrant vont se retrouver au cœur d'une attaque terroriste en plein Paris. Ça vous rappelle quelque chose ? Les producteurs de ce film assument s'être librement inspirés des attentats survenus le 13 novembre 2015 dans la capitale française. L'annonce du long-métrage par le magazine Hollywood Reporter (en anglais), dimanche 12 février, a suscité de vives réactions sur les réseaux sociaux, ainsi que chez les victimes des attaques

"Dans les discussions, il y a pas mal de gens assez révoltés", rapporte Emmanuel Domenach, rescapé du Bataclan, contacté par franceinfo.

On est nombreux à éprouver une sorte de lassitude. Le jour du 13-Novembre, il y avait déjà des cinquantaines de reportages, des bouquins… Certains sont très bien, mais on devient un peu blasé. Il y a clairement un business autour de ça.

Emmanuel

à franceinfo

C'est ce point précis qui a fait sortir Sophie de ses gonds. "Quand j'ai vu l'info, j'ai d'abord hurlé car je trouve ça inadmissible qu'on se fasse de l'argent sur notre dos", lâche-t-elle, encore agacée, au téléphone, quelques jours après avoir tweeté son désarroi

"A aucun moment on se dit que des gens souffrent encore"

Pour ces deux survivants, le timing semble brutal. Il faut dire que le tournage du film doit commencer durant l'été, soit moins de deux ans après les faits. "C'est encore hyper frais", souligne Emmanuel Domenach, qui a du mal à "admettre" qu'on attende si peu de temps pour faire un film sur ce qu'il a vécu de l'intérieur. 

"Il y a des personnes qui n'ont pas fini leur deuil, d'autres qui hésitent à sortir dans la rue, qui font des cauchemars ou qui sont encore blessées", renchérit Sophie, très remontée. Elle-même attend de savoir si elle doit être opérée pour se faire enlever une balle restée fichée dans sa hanche.

Pour la rescapée, les attentats s'inscrivent toujours dans le quotidien et "à aucun moment, on se dit qu'il y a des gens qui souffrent encore... Là, on va leur remettre les événements sous le nez. Franchement, on s'en souvient suffisamment pour ne pas en rajouter."

"Je sais que je ne suis pas objective"

Outre le timing, leurs craintes sont grandes de découvrir un film dont l'histoire serait éloignée de leur réalité. "Je me demande comment on va parler des attentats, quel sera le message, est-ce que ce sera politique ?", énumère Emmanuel, avant d'imaginer un scénario dans lequel le héros "sauverait sa dulcinée, alors que pour toi ça ne s'est pas du tout passé comme ça"

Nous, on n'a pas eu de fin hollywoodienne.

Sophie

à franceinfo

"On a tous été plus ou moins marqués, même ceux qui ont survécu. Vivre après les attentats, c'est vivre avec les cris, les cauchemars. Dans les films, le héros est blessé, s'en sort avec le sourire, mais tu ne le vois plus trois mois après. Nous, on ne retrouve pas le super sourire Colgate", rebondit Sophie, qui s'énerve que le projet naisse sans qu'aucune équipe de tournage n'ait pris contact avec les proches de victimes ou rescapés. 

Tous deux sont toutefois conscients de leur trop grande implication pour se faire une idée mesurée. "Je sais que je ne suis pas objective car j'ai été touchée", confie ainsi Sophie, en précisant tout de même qu'elle n'a jamais éprouvé d'attirance pour ce genre de film. Emmanuel, lui, attend de voir le résultat, même s'il pense d'ores et déjà qu'il ne se précipitera pas dans une salle obscure. "Je vais quand même laisser sa chance au film. De toute façon, il va falloir qu'on s'y habitue car ne sera ni la première ni la dernière fois que ça arrivera."

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