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Assassinat de Samuel Paty : "On a beaucoup de mal à détecter ceux qui vont franchir le pas", reconnaît un expert en renseignement

Éric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R) explique que la menace d'individus qui se radicalisent seuls, sans lien avec de grandes organisations terroristes, est plus difficile à appréhender.

Article rédigé par franceinfo
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Un policier devant une banderole d'hommage à Samuel Paty, à Montpellier, le 21 octobre 2020 (PASCAL GUYOT / AFP)

"On a beaucoup de mal à détecter ceux qui vont franchir le pas", a reconnu sur franceinfo jeudi 22 ocotbre Éric Denécé, directeur du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R), après l'assassinat de Samuel Paty. "La menace a changé de forme", a-t-il affirmé. Aujourd'hui, ce n'est plus la menace terroriste via de très grands groupes comme Al-Qaïda et Daesh, mais "on est sur des individus qui se radicalisent, qui ont souvent des faiblesses psychologiques ou qui sont sous influence et qui vont passer à l'action".

franceinfo : Quels enseignements tirez-vous de ce drame ?

Éric Denécé : Malheureusement, il n'y a pas beaucoup d'enseignements nouveaux. La radicalisation est toujours là, présente. Quand on est du côté des services de renseignements, on a des dizaines voir des centaines de cas de cette nature, heureusement 99% ne passent pas à l'acte et malheureusement on a beaucoup de mal à détecter ceux qui vont franchir le pas. Nous sommes aussi dans un État de droit et on ne peut pas arrêter systématiquement quelqu'un qui fait une vidéo ou des appels au meurtre [sur les réseaux sociaux]. Lui [Abdoullakh Anzorov] est passé entre les mailles du filet. Peut-être qu'au même moment il y avait des profils qui attiraient davantage la préoccupation des services de renseignements. Il n'y a qu'eux pour dire qu'il y a eu erreur ou pas.

Comment répondre aux signaux d'un passage à l'acte difficile à détecter ?

On est passé de menaces organisées par de très grands groupes comme Al-Qaïda et Daesh, à des petites cellules plus locales et aujourd'hui on est plus confronté à des comportements de type tueurs en série ou d'individus qui sont dans une situation de crise psychologique ou existentielle. Nos pays étant de plus en plus ouverts, il y a parmi les gens qui viennent s'installer chez nous des personnes qui sont dangereuses et qu'on n'a pas pu déceler à temps et c'est un véritable problème.

Le renseignement a-t-il les moyens de traiter cette masse de menaces sur les réseaux sociaux ?

Si on met de côté cet acte barbare qui a visé un de nos compatriotes, le système ne marche pas trop mal. Les attentats sont relativement peu fréquents. Et de plus en plus, depuis plus de 10 ans, ce sont systématiquement des individus isolés qui passent à l'acte, nos services de renseignement arrivent à démanteler rapidement les bandes organisées, les grosses organisations. On est sur des individus qui se radicalisent, qui ont souvent des faiblesses psychologiques ou qui sont sous influence et qui vont passer à l'action. Cela montre que la menace a changé de forme et qu'elle est toujours présente. Il y a un travail de vigilance en tant que citoyen à renforcer.

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