Enquête franceinfo Autoroute A13 fermée : vers une réouverture totale juste avant le 26 juillet pour les JO ?

Article rédigé par Stéphane Pair
Radio France
Publié Mis à jour
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L'autoroute A13 à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), en partie fermée depuis le 29 avril 2024 (LP/OLIVIER ARANDEL / MAXPPP)
Le viaduc de l'autoroute A13, à l’ouest de Paris, est toujours fermé à l’exception d’une seule voie rendue à la circulation début mai. Et cela pourrait durer encore plusieurs semaines, voire jusqu'aux Jeux olympiques.

L'autoroute A13 est toujours fermée et en travaux aux portes de Paris après un mouvement de terrain et l’apparition de fissures suspectes, le 19 avril. Rendue en partie à la circulation, le mois dernier, sur une file unique dans le sens province-Paris, l’autoroute de l’Ouest est habituellement empruntée par quelque 100 000 véhicules par jour.

Le préfet des Hauts-de-Seine évoque une réouverture totale pour la fin juin, mais selon plusieurs sources proches de ce dossier, dont certaines à la Direction Interdépartementale des routes d’Ile-de-France (DiRIF), la réouverture de l’A13 n’est pas assurée avant l’ouverture des Jeux olympiques, le 26 juillet prochain, ce qui inquiète l’organisation de Paris 2024.

Lancées à la mi-mai, des réparations délicates des services du département des Hauts-de-Seine sont en cours sur une canalisation souterraine endommagée sous la chaussée. Une opération délicate qui ne doit pas occasionner de fuites. Mais surtout, pour être totalement sécurisé, l’ouvrage doit être tout à fait stabilisé or certains capteurs placés un peu partout dans la zone auraient mesuré des écarts depuis le premier mouvement de terrain. Ce qui pourrait retarder l’ensemble des réparations en cours.

Contacté par franceinfo sur cette question, le préfet des Hauts-de-Seine renvoie à son dernier communiqué qui parle toujours d’une réouverture totale de l’A13 à la fin juin. Durant les Jeux, l’A13 va permettre l’accès à la capitale par l’ouest. Elle doit surtout desservir quatre sites olympiques dans les Yvelines : le golf à Guyancourt, l’équitation à Versailles, le VTT sur la colline d’Elancourt et puis le cyclisme sur piste, le BMX et les épreuves d'escrime du Pentathlon à Montigny-le-Bretonneux.

À l'origine des fissures, des travaux au pied du mur de soutènement

Comme l’a lui-même reconnu le préfet, le suspect numéro un des problèmes de l’A13 serait un grand trou creusé sur un chantier contigu au viaduc et non un mauvais entretien de l’autoroute. Ce trou, aujourd’hui remblayé, a été creusé par les ouvriers de l’entreprise Fayat Bâtiment à seulement quelques mètres du mur de soutènement de l’A13 pour accueillir le parking souterrain privé du musée du Grand Siècle, projet phare du conseil départemental des Hauts-de-Seine, financé à hauteur de 100 millions d’euros.

Quelques semaines après le creusement de ce grand trou par l’entreprise Fayat Bâtiment, Pierre, un riverain a constaté le mouvement de terrain. Il emprunte chaque jour une petite route qui longe l’autoroute pour accéder au Parc de Saint-Cloud. "En moins d'une semaine, j'ai vu la route se déformer. Quand on creuse comme des malades et qu'on ne gère pas l'hydraulique, l'eau passe en dessous. Et forcément, le terrain en amont s'est affaissé aussi. Si le mur avait cédé, c'était la catastrophe..."

Des fissures sur l'autoroute A13 fermée à Saint-Cloud, à l'ouest de Paris, le 19 avril 2024. (MIGUEL MEDINA / AFP)

Or, le risque d’effondrement de ce segment de l’A13 existait bel et bien. Le préfet et la Dirif ont d’ailleurs décidé de fermer immédiatement l'autoroute après l’apparition des premières fissures. Une expertise menée notamment par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (CéRéMA) doit confirmer l’origine du sinistre. La piste principale poursuivie par le département "risques" du CéRéMa c’est un retrait - gonflement des sols argileux causé par le creusement de ce trou et qui aurait fragilisé le mur de soutien, déclenché ce mouvement de terrain et endommagé la couverture de l’A13. 

Les travaux étaient autorisés, et le risque identifié

Question : les risques inhérents à la construction de ce parking souterrain avaient-ils été pris en compte ou l’objet d’un débat technique lors de la phase préparatoire de ce projet de Musée du Grand Siècle. Aucun des acteurs publics de ce dossier n’a souhaité répondre à franceinfo. Nous nous sommes donc procuré certains échanges écrits et le permis de construire du musée du Grand Siècle dont le marché avait été remporté par le groupe Fayat Bâtiment, TPF Ingénierie et le cabinet d'architectes de Rudy Ricciotti.

Conclusion : quelques mois encore avant le début du chantier, la Direction des routes d’Île-de-France ignorait par exemple que des travaux allaient directement concerner le "mur de soutènement" de son autoroute. Ce détail n’était pas dans la présentation initiale de la notice du projet affirme la DiRIF dans un courrier à l’hiver 2023.

Les travaux du "mur de soutènement" de l'A13 n’était pas dans la présentation initiale de la notice du projet, affirme la DiRIF dans un courrier à l’hiver 2023. (STEPHANE PAIR / FRANCEINFO)

Début 2023, après un premier avis favorable de la DiRIF du 30 janvier,  la direction des routes continue de parler activement de ce fameux mur de soutènement avec les services du Conseil Départemental des Hauts-de-Seine. Sans que l’on connaisse les garanties apportées par le département, la DiRIF donne un avis favorable à ces travaux à proximité du mur porteur de son autoroute. Et cela, sans apparemment demander la réalisation d’une nouvelle étude hydraulique. Interrogée sur ce point, la DiRIF n’a pas répondu à nos questions.

Le musée du Grand Siècle est un projet voulu par Patrick Devedjian, l’ancien président LR du Conseil Départemental des Hauts-de-Seine décédé en mars 2020 durant la crise du Covid, et repris à bras le corps par son successeur, Georges Siffredi. Les élus d’opposition représentés au jury de concours pour le choix du bureau d’études et de l’architecte de ce projet ne se souviennent pas avoir entendu parler de travaux de parking. "À aucun moment dans les projets candidats n'était abordée la question d’un parking", expliquent les élus socialistes du conseil. Jusqu’à plus ample information, ce n’est pas le président du Conseil départemental qui s’est donné à lui-même des autorisations. Les services de l’État ont accepté le projet et ne semblent pas avoir procédé à une étude des sols. Auraient-ils dû le faire lorsqu’ils ont reçu la demande du département ? "Difficile à affirmer sans avoir accès aux documents techniques", expliquent ces élus.

À la mairie de Saint-Cloud, ville qui va abriter le futur musée, un élu sous couvert d’anonymat ironise : "Ici, tous les acteurs de ce dossier connaissent la volonté du conseil départemental des Hauts-de-Seine de réaliser ce musée au plus vite. De là à dire que les services de l’Etat ont fait preuve d’empressement pour huiler le dossier, personne n’en a la preuve..."

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