Incendies : la France est-elle bien préparée ?
Les pompiers ont maîtrisé vendredi l'incendie qui a ravagé 550 hectares de pins à Lacanau (Gironde). Mais la France est-elle suffisamment préparée à ce type de catastrophe ?
INCENDIES - Les pompiers sont parvenus, vendredi 17 août, à contenir l'incendie qui a détruit 650 hectares de pins à Lacanau (Gironde). Deux d'entre eux ont été blessés durant l’intervention, qui avait débuté la veille.
En juillet, le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, avait promis que les moyens accordés aux sapeurs-pompiers et à la sécurité civile seraient bien "une priorité" dans la prochaine loi de finances. Mais certains craignent que la lutte contre les incendies ne pâtisse des difficultés financières de l'Etat. FTVi fait le point sur les faiblesses de la France en la matière et les efforts qu'il lui reste à faire.
La flotte des bombardiers d'eau : à revoir
"Peut-être que pour nos dirigeants, 650 hectares valent moins que trois avions", ironise Patrice Beunard, président du Syndicat national des sapeurs-pompiers professionnels. Pour lui, l'incendie de Lacanau prouve la vétusté et l'insuffisance de la flotte des bombardiers d’eau français.
Résultat, "on condamne certains avions pour récupérer des pièces et en réparer d’autres", explique-t-il. Pour obtenir 10 millions d'euros supplémentaires et maintenir en état les 23 appareils français (dont 12 Canadair), les 88 pilotes de la base de la sécurité civile de Marignane (Bouches-du-Rhône) ont lancé une grève début juillet. Une première depuis 1998.
De fait, peu d'appareils stationnent dans le Sud-Ouest. "Il a fallu attendre quatre heures pour que des Canadair arrivent sur place, rappelle Patrick Beunard. Pourtant, on sait qu’un incendie se joue dès les premières minutes. Il faut frapper vite et fort."
Pour cette raison, il réclame une flotte européenne de bombardiers d’eau, afin d'améliorer l’efficacité des interventions. "On a créé une Union européenne monétaire, pourquoi n’arrive-t-on pas à créer une Union européenne de la sécurité civile ? On pourrait imaginer une dizaine d’avions-bombardiers européens, prêts à intervenir en cas d’alerte."
La chasse aux broussailles : peut mieux faire
Les broussailles sont autant d'allumettes potentielles. Pour préparer l’été, un nettoyage de printemps est donc nécessaire autour des habitations et le long des voies. Le Code forestier a même rendu ce débroussaillage obligatoire dans les 6 000 communes situées dans des zones à risque. En cas d'oubli, le propriétaire du terrain concerné peut écoper d'une amende de 750 euros.
Mais d'après Georges Fandos, ingénieur agronome et vice-président du parti écologiste Cap21, tout le monde ne joue pas le jeu. Contacté par FTVi, il explique que "dans certaines zones, les préfets surveillent de près les campagnes de débroussaillage, comme dans les Cévennes. Mais dans d’autres, comme en Corse, il faut encore améliorer la prévention".
Autre inquiétude : l’existence de "massifs de pins non exploités, qui sont de véritables poudrières à la moindre étincelle", rappelle Fandos. Inexploités, ils ne disposent pas de "coupures de combustible", ces zones consacrées à la vigne ou au pâturage et qui limitent la propagation du feu.
Contacté par FTVi, Pierre Macé, directeur en Aquitaine de l'association Défense de la forêt contre les incendies, avance un autre danger : certaines "extensions de lotissements ne disposent pas toujours d’une zone-tampon (piste d’accès, point d’eau…) avec la forêt", ce qui expose les habitants en cas d'incendie.
Les mégots de cigarette : à creuser
C’est l’ennemi numéro un des forêts, et une mauvaise habitude que de nombreux automobilistes ne sont pas près de lâcher. Pour le prouver, deux journalistes du quotidien régional L’Indépendant ont campé mercredi 16 août sur une portion de route bordée de broussailles, à la sortie de Narbonne (Aude). En seulement vingt minutes, ils ont ramassé… 393 mégots jetés par les fenêtres des voitures.
Et les conséquences sont parfois dramatiques. Les causes de l'incendie de Lacanau ne sont pas encore établies, mais les gendarmes privilégient la piste d'un mégot jeté sur la route, rapporte l'AFP. Déjà, le 15 août, une cigarette aurait entraîné l’incendie d'un jardin de 2 000 m² à Cagnes-sur-Mer (Alpes-Maritimes), rappelle Nice-Matin. En juillet dernier, le journal espagnol El Correo titrait : "Des mégots assassins à Gérone", pour rendre compte du plus grand incident de l'été en Europe, qui a ravagé 13 000 hectares en Catalogne.
L'Union européenne estime que les mégots mal éteints sont à l'origine chaque année de 30 000 incendies, qui ont causé 1 000 morts et 4 000 blessés entre 2003 et 2008. Depuis novembre 2011, une réglementation oblige les fabricants à vendre des cigarettes "anti-incendie". Deux anneaux de papier plus épais sont censés bloquer leur combustion une fois abandonnées dans la nature. Compte tenu des récents incidents, la mesure est loin d'être infaillible.
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