Mesure phare de la gauche, la loi Aubry sur les 35 heures a dix ans d'application
Bien qu'entrée dans les moeurs, elle suscite toujours autant de passions politiques. Appréciée par les cadres, elle a pu avoir des effets pervers pour les ouvriers.
Selon l'Insee, les 35 h ont permis la création d'environ 350.000 emplois entre 1998 et 2002 et des gains de productivité de 4% à 5%. Elle s'est accompagnée d'une modération salariale.
L'entrée en vigueur de la loi défendue par Martine Aubry, à l'époque ministre du Travail socialiste, est progressive. Une première loi, en 1998, affiche le principe, le calendrier et encourage des expérimentations. Une deuxième loi, promulguée le 19 janvier 2000, fixe les modalités. Elle est appliquée au 1er février 2000 pour les entreprises de plus de 20 salariés et étendue début 2002 aux entreprises plus petites.
Les 35 heures correspondent à la durée légale de travail hebdomadaire, pas à la durée maximale ni à la durée obligatoire: elles correspondent au seuil de déclenchement des heures supplémentaires. Certains secteurs n'y sont jamais passés, comme la restauration, le transport routier, le bâtiment ou de nombreuses petites entreprises. En 2007, la semaine moyenne effective de travail à temps complet atteignait 39 heures et 24 minutes, selon l'Insee.
Les 35 heures ont été plébiscitées par les cadres, à qui elles permettaient de profiter de plus de loisirs. Mais pour les ouvriers, elle s'est parfois traduite par une annualisation du temps de travail réduisant les heures supplémentaires qui permettaient d'arrondir les fins de mois.
La droite, de retour au gouvernement en 2002, s'est attelée à réduire la portée des 35 heures, en favorisant au contraire le recours aux heures supplémentaires, accomplies au-delà de la durée légale et payées davantage que les heures normales.
En 2003, le contingent annuel d'heures supplémentaires (au-delà duquel les entreprises doivent accorder un repos compensateur aux salariés concernés) est relevé de 130 à 180 heures (sauf accord de branche le maintenant à un niveau inférieur). En 2004, il passe à 220 heures, et, en 2005, des "heures choisies", accomplies au-delà de ce contingent, peuvent être instaurées par accord de branche ou d'entreprise.
A son arrivée à l'Elysée en 2007, Nicolas Sarkozy, pour concrétiser son slogan "travailler plus pour gagner plus", a joué aussi sur les heures supplémentaires, en les exonérant de cotisations et d'impôts sur le revenu.
Critiquée à droite, la loi sur les 35 heures n'a été "ni une catastrophe ni un miracle", selon l'économiste Philippe Askenazy (CNRS), et parler d'un "carcan" est "exagéré", remarquait en 2008 l'avocat conseil d'employeurs Jacques Barthélémy.
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