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Arrestations à la manifestation anti-migrants à Calais : "Ça va être la guerre", menacent les organisateurs

Malgré l'interdiction de manifester, une centaine de personnes se sont rassemblées, samedi, devant la gare de Calais, à l'appel notamment de la branche française du mouvement islamophobe Pegida.

Article rédigé par Louis San
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Le général de Corps d'Armée Christian Piquemal, qui a commandé la légion étrangère de 1994 à 1999, lors d'une manifestation anti-migrants interdite, à Calais (Pas-de-Calais), le 6 février 2016. (PHILIPPE HUGUEN / AFP)

"On est chez nous", "Calais aux Calaisiens", "Dehors les migrants", "Hollande, démission". Voici un aperçu des slogans scandés, samedi 6 février, devant la gare de Calais (Pas-de-Calais). Malgré l'interdiction de manifester décidée par arrêté ministériel, une centaine de personnes se sont rassemblées, à l'appel de la branche française du mouvement islamophobe Pegida. Ils réclament le démantelement de la "jungle" de Calais, et du camp de migrants de Grande-Synthe.

Il est 13 heures. Sous un ciel gris et une température douce pour la saison, les manifestants s'agglutinent sur le parking de la gare, sans vraiment savoir que faire. L'affluence espérée n'est pas au rendez-vous. Sur la page Facebook dédiée à l'événement, quelque 450 personnes avaient indiqué leur intention de venir. Qu'importe, ces personnes ne comptent pas obéir à la "dictature socialiste". D'autant plus que certains viennent de loin, comme Thomas, 46 ans, chauffeur-routier, qui habite les Alpes-de-Haute-Provence.

Pas de banderoles, pas de slogans préparés

On trouve chez les manifestants des adolescents comme des quinquagénaires, des hommes et des femmes. Et pas mal de logo de la marque Lonsdale (appréciée dans les milieux d'extrême droite). "Ça y est, t'es arrivé, Gaëtan ! Ils t'ont laissé passer ?", plaisante une femme, en passant sa main sur ses cheveux. Elle s'adresse à un homme, le crâne rasé, portant une écharpe du PSG, et une veste grise au motif camouflage.

Ces personnes qui ont bravé l'interdiction discutent et fument des cigarettes en attendant on ne sait quoi. Il n'y a pas de banderole, pas de défilé prévu. Le climat se tend brusquement lorsqu'à 13h21 un membre des forces de l'ordre se saisit d'un mégaphone, rappelle que ce rassemblement est interdit et appelle à la dispersion. Aussitôt, il se fait siffler. Quelques slogans xénophobes fusent et la Marseillaise est entonnée. 

"Les manifestants ne se dispersent pas. Nous procédons aux interpellations", indique un gendarme à la radio, dix minutes plus tard. Les gardes mobiles enfilent leur casque. Rapidement, un premier homme est interpellé, mis au sol puis immobilisé. D'autres vont connaître le même sort. 

Après un meeting matinal devant une soixantaine de "patriotes", dans une ville à 15km de Calais, le général Christian Piquemal, ancien chef de légion étrangère, fait une apparition devant le troquet de la gare. La Marseillaise est chantée à nouveau, les drapeaux sont sortis.

"On écoute le général"

C'est l'heure de la dernière sommation : "Nous allons faire usage de la force", prévient un autre gendarme. Rien à faire, les manifestants ne bougent pas. Certains provoquent les gendarmes sous l'oeil du service d'ordre de la manifestation.

Le général Piquemal demande alors la dispersion du rassemblement. "Cela ne sert à rien de manifester si nous ne sommes que 60-80, cela nous rendrait ridicules", avait-il déclaré quelques heures auparavant. "Le général demande à ce qu'on décolle. On écoute le général. On ne vous écoute pas, vous", crie un manifestant à l'attention des forces de l'ordre. Alors que l'ancien légionnaire quitte la gare et traverse la rue, il est interpellé. 

Une vingtaine d'interpellations

"Allez taper sur les bons Français, bande de connards !", éructe un jeune homme à des gendarmes qui se dirigent vers le parking adjacent où explosent des pétards.

Au total, une vingtaine d'hommes sont arrêtés, une majorité de personnes "d'extrême droite et quelques antifas", selon un représentant de la préfecture.

"Les légionnaires sont au courant, ça va être autre chose"

Le calme revient peu à peu. Il est environ 15 heures lorsque la route qui passe devant la gare, qui était fermée, accueille à nouveau des voitures. Des manifestants se dirigent vers le commissariat où a été embarqué le général Piquemal mais il ne restent pas longtemps devant le bâtiment.

En fin d'après-midi, Jean-Philippe Jardin, co-organisateur de la manifestation est amer, déçu face au manque d'affluence. Cet ancien militaire, aujourd'hui chauffeur-routier, dit "avoir la haine" après l'arrestation du général Piquemal. "Ca va péter. C'est le père de la légion étrangère (...) Les légionnaires sont au courant. Là, ça va être autre chose", menace-t-il. Pour lui, les gendarmes qui l'ont interpellé vont être la cible de représailles : "Ils vont se faire défoncer." Et de lancer cet ultime avertissement : "Ca va être la guerre."

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