"Dimanche, il faut voter oui" : pauvres et discriminés, les Kanaks veulent l'indépendance pour la Nouvelle-Calédonie
Le coût élevé de la vie à Nouméa pousse les Kanaks à vivre dans des bidonvilles. Ils doivent également faire face à une discrimination à l'embauche. Pour résoudre cette situation, ils placent beaucoup d'espoir dans l'indépendance et espèrent que le oui l'emportera lors du référendum dimanche.
"Voulez-vous que la Nouvelle-Calédonie accède à la pleine souveraineté et devienne indépendante ?" Une question cruciale, historique, à laquelle 174 000 électeurs devront répondre dimanche 4 novembre. Ce référendum est prévu dans l’accord de Nouméa datant de 1998.
La France n’a gardé sur "le caillou" dans le Pacifique Sud que les compétences régaliennes avec la défense, la sécurité, la justice et la monnaie. Une politique de rééquilibrage a été menée sur l’île, mais il reste encore beaucoup d’inégalités et elles touchent principalement les populations autochtones : les Kanaks. À Nouméa beaucoup vivent dans une grande précarité, car derrière la carte postale se cache aussi un tout autre décor.
Un chemin cabossé et des ordures qui s’entassent, la belle plage de la Baie des Citrons et les yachts semblent loin. Pourtant seuls quelques kilomètres les séparent du "squat de Tina", un bidonville, entouré de champs de tarots et d’igname. "Voilà l'exemple même d'un habitat insalubre. C'est fait de bric et broc", de tôle et de planches en bois, décrit Bruno, un bénévole au Secours catholique. Ici il y a de l’eau, mais pas d’électricité. Cette cabane est vide. Il y dépose un sac rempli de provisions avec "du riz, du lait en poudre, des pâtes, de l'huile, du savon".
La vie est très chère à Nouméa. Elle est même plus chère qu’en métropole. Les loyers y sont proches de ceux de Paris et sont trop élevés pour les 1 000 habitants du squat, tous Kanaks. "En fait, il s'agit surtout de gens de la province Nord et de la province des îles qui viennent à Nouméa pour de multiples raisons : trouver un boulot, la santé" et la scolarité, explique Bruno.
Je travaille la terre, sinon je vais à la pêche. C'est pour manger.
Henrietteà franceinfo
Henriette a quitté Ouvéa, son île, pour que ses enfants puissent aller au collège. Elle doit subvenir seule aux besoins de toute sa famille, dix bouches à nourrir.
Malgré la politique de rééquilibrage économique et sociale menée en leur faveur, le taux de chômage reste plus élevé chez les Kanaks. À quelques minutes du squat se trouve la tribu Saint-Louis. Elle n’a pas bonne réputation. Les jeunes savent que c’est une tâche sur leur CV, alors beaucoup ne travaillent pas. Ils survivent grâce à des petits chantiers dans la communauté. Pour Jean-Michel les choses sont claires : ce qui explique sa précarité c’est avant tout son identité.
"Un petit blanc qui vient de métropole, il vient pour travailler sur un terrain qu'il ne connaît pas, explique l'homme de 27 ans. Le jeune qui vient de la tribu, qui connaît très bien le métier et qui connaît très bien le terrain et qui fait des formations, il ne se fait pas embaucher parce qu'il est Kanak", poursuit-il. Cette situation fait que Jean-Michel estime que "dimanche, il faut voter oui [au référendum sur l'indépendance] pour que cela change. Peut-être que l'on sera prioritaires un peu dans le domaine du travail", espère-t-il.
Un espoir partagé par beaucoup. Sur sa table de jardin, Line observe avec tristesse les jeunes Kanaks de sa tribu s’enivrer d’alcool en plein après-midi pour combler le temps. "Nous aussi, on a eu des difficultés. On a été à l'école, on n'a pas pu avoir un boulot et maintenant cela continue pour nos jeunes, mais faut arrêter. Il faut que ces jeunes-là puissent avoir la chance de réussir dans la vie", estime cette maman. Et pour que cela change, elle ira voter oui dimanche.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.