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Le cyberharcèlement, le nouveau virus de la génération 2.0

A l'occasion de la "journée pour un internet plus sûr", mardi 11 février, francetv info s'intéresse au harcèlement via les nouvelles technologies et les réseaux sociaux.

Article rédigé par franceinfo - Manon Descoubès
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
D'après l'Education nationale, 40% des élèves déclarent avoir été victimes de violences en ligne. (MENDIL / BSIP)

A la veille de "safer internet day", la journée mondiale pour un internet plus sûr, mardi 11 février, l’association e-Enfance, qui lutte pour une meilleure utilisation d’internet chez les jeunes, a lancé sa nouvelle campagne de communication pour "dire non au cyberharcèlement des adolescents".

C'est quoi le cyberharcèlement ?

Il est défini comme "l'utilisation de tous les moyens modernes de communication pour nuire à quelqu’un de façon intentionnelle et répétée", d'après Justine Atlan, directrice de l’association e-Enfance, citée par le site de l’Education nationale. Un phénomène qui semble en constante progression avec l'utilisation permanente d'internet chez les jeunes générations. La spécificité du cyberharcèlement réside dans sa diffusion massive et instantanée, son caractère permanent (ce qui est sur Internet, reste sur internet et est susceptible de ressortir ultérieurement) mais permet cependant une meilleure traçabilité et sert donc de "preuve", poursuit Justine Atlan.

On peut identifier plusieurs formes de cyberharcèlement, des "jeux cruels" dont les enfants sont les auteurs. Le premier stade peut prendre la forme d’intimidations, d’insultes, de moqueries ou de menaces en ligne. Les adolescents propagent également des rumeurs, piratent ou usurpent les identités numériques. Certains vont jusqu'à créer un sujet de discussion, un groupe ou une page sur un réseau social, type Facebook, à l’encontre d’un autre camarade, où ils peuvent publier des photos ou des vidéos de la victime en mauvaise posture, ou pire, publier des photos à caractère pornographique après avoir manipulé leur camarade.

Mais les violences sur internet peuvent se propager dans la vie réelle. Comme ça a été le cas pour Yoann, le jeune handicapé agressé dans l’Isère par deux adolescents, la semaine dernière. Il a été victime de ce que l’on appelle un "lynchage vidéo". Ce qui consiste à agresser collectivement une victime tout en la filmant au moyen d’un téléphone portable, puis à diffuser le film pour humilier la victime. Selon Laurent Bègue, directeur de la Maison des Sciences de l'homme à Grenoble"un élève victime de harcèlement verbal ou physique multiplie par 7 la probabilité d’être victime de harcèlement en ligne".

Quelles sont ses conséquences ?

"En moyenne, l’âge du premier clic est de 9 ans en France", selon Catherine Blaya, professeur en sociologie de l’éducation et auteure de l’ouvrage Les ados dans le cyberespace. Et ils "n’auraient pas conscience de ce qu’ils font sur la toile", à ce moment-là. D'après la sociologue, l’enfant ne peut pas toujours contrôler ce qu’il provoque sur internet.

Car pour certains jeunes, il est valorisant de harceler son prochain, rappelle Laurent Bègue dans son ouvrage Psychologie du bien et du mal (éd. Odile Jacob, 2011), cela peut être perçu comme quelque chose de "cool". Ce fut le cas des camarades de Marion, en Essonne, qui se moquaient de la jeune fille pour ses bons résultats scolaires ou ses goûts vestimentaires sur Facebook.

Dans le magazine Cerveau & Psycho, Laurent Bègue relève aussi chez les victimes de cyberharcèlement "une symptomatologie anxio-dépressive", pouvant se traduire par une hausse de l’anxiété, par des troubles du comportement alimentaire, par une faible estime de soi, des difficultés d’ajustement psychosocial ou la crainte de fréquenter l’établissement scolaire. Une isolation qui peut conduire jusqu’au pire des scénarios comme ce fut le cas d’Amanda Todd au Canada en 2012, qui dans une vidéo YouTube témoignait de sa descente en enfer, quelques semaines avant son suicide.

Le scientifique explique aussi que l'absence de prise de conscience de leurs actes par les adolescents résident dans la "désindividualisation" du cyberharcèlement. Car l’agresseur n’est pas témoin des réactions de souffrance de sa victime, ce qui favorise ses agissements et facilite les mauvais comportements. Cette absence de signaux chez la victime facilite ainsi la violence, qui "ne se limite plus aux murs du collège ou du lycée et qui n’accorde aucun répit à sa victime". Les réseaux sociaux et les portables ayant une place prépondérante dans la vie de ces jeunes, ces agressions peuvent "menacer le développement social et émotionnel des adolescents", qui restent majoritairement muets. Mais c’est aussi l’anonymat d’internet qui révèle le pire chez ces jeunes adolescents. Ils délivrent alors des messages qu’ils n’oseraient jamais porter à voix haute ou en chair et en os.

Que faire en cas de cyberharcèlement ?  

La règle fondamentale est la communication, rappelle Justine Atlan dans sa vidéo sur le site de l’Education nationale. Lorsque le problème est interne à l’établissement scolaire, il faut avant tout informer l’école afin que celle-ci prenne en charge la victime, fasse cesser le harcèlement et supprime les contenus postés sur internet. Il faut ensuite rassurer la victime et la faire se confronter au harceleur pour expliquer sa faute. Le principal travail de l’association de e-Enfance est précisément de rappeler aux établissements, que ces situations de cyberharcèlement sont de leurs ressorts, et qu’ils peuvent intervenir dans le champ du privé et organiser des forums de prévention adressés aussi bien aux enfants qu’aux parents. C’est à cet usage que l’Education nationale a mis à disposition des professeurs un guide préventionSi les harcèlements persistent, alors les associations et les écoles peuvent accompagner l’élève dans sa démarche judiciaire, car le harcèlement est puni par la loi (à partir de 12 000 euros).

A l'occasion de la journée mondiale pour un internet plus sûr, l’ONG internationale Safer Internet, l'association e-Enfance et deux syndicats lycéens (l’UNL et le SGL) proposent ainsi aux jeunes de s’engager en signant un texte. Il sera porté en septembre prochain, au Comité des droits de l’enfant de l’ONU. Une initiative qui a pour finalité de faire des adolescents, les premiers acteurs de la lutte contre le cyberharcèlement.

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