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Le Truvada est un "moyen de casser la dynamique de propagation du sida"

Des experts ont recommandé jeudi à l'Agence américaine des médicaments la mise sur le marché du Truvada en traitement préventif contre le sida. Les explications du Dr Gilles Raguin, spécialiste du VIH.

Article rédigé par Nora Bouazzouni - Propos recueillis par
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Le Truvada fait partie depuis 2006 de l'arsenal thérapeutique pour le traitement des personnes séropositives. (JUSTIN SULLIVAN / GETTY IMAGES NORTH AMERICA)

Un comité de vingt-deux experts a recommandé jeudi 10 mai à l'Agence américaine des médicaments la mise sur le marché du Truvada en traitement préventif antisida. Le Dr Gilles Raguin, spécialiste du VIH à l'hôpital Saint-Antoine (Paris 12e), a répondu à nos questions.

FTVi : On a l'impression que le Truvada est une découverte, mais il existe depuis longtemps, non ?

Gilles Raguin : Ce médicament n'est pas nouveau : il fait partie depuis 2006 de l'arsenal thérapeutique pour les personnes séropositives. Il est aussi utilisé après une exposition à risques, dans les cadres professionnel et non-professionnel. La nouveauté, c'est cette indication de "prévention" pour certains groupes à risques, comme les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, ou les couples sérodifférents [dont l'un des partenaires est séropositif].

Cette nouvelle indication est-elle si révolutionnaire ?

L'épidémie continue de progresser : pour chaque patient traité, on compte deux personnes infectées. L'objectif, c'est trouver un moyen de casser cette dynamique. La prévention, les préservatifs, ça ne suffit pas. Il faut faire mieux, et plus. La possibilité d'avoir le Truvada en plus du préservatif est intéressante. D'autant que grâce à l'étude des Américains, on sait aujourd'hui qu'il réduit effectivement la transmission dans certains groupes à risques. Mais on ne peut pas en donner à la planète entière. On va donc devoir se poser la question des situations et des groupes prioritaires, dans une démarche de santé publique. Le problème, c'est que son coût reste élevé [11 000 euros par an et par patient].

Le Truvada a de grandes chances de pouvoir être utilisé en prévention aux Etats-Unis. Doit-on s'attendre à voir la même chose en France sous peu ?

En France, l'indication préventive du Truvada est testée dans le cadre d'Ipergay, une étude qui doit prendre fin vers 2015. Avec l'annonce américaine, peut-être que des groupes de pression essaieront de rendre le Truvada disponible plus rapidement, mais globalement, il n'a pas obtenu de consensus, que ce soit scientifique ou de la part des groupes à risques concernés. Après, si certains veulent acheter le Truvada sur internet sans ordonnance, on ne peut rien y faire.

Quelles sont les perspectives dans le traitement du VIH ? On a l'impression de voir pas mal d'avancées, mais à quand un vaccin ?

On voit régulièrement de nouveaux médicaments sortir sur le marché. Or, la plupart du temps, ce ne sont que des améliorations de médicaments déjà existants. Alors un vaccin antisida... Mais parfois, on a une nouveauté significative, comme avec les anti-intégrase en 2008 [des molécules qui perturbent la reproduction du virus dans l'organisme]. Aujourd'hui, les patients atteints du VIH n'ont que la trithérapie, et les améliorations attendues concernent notamment la tolérance et la diminution des complications métaboliques (diabète, cholestérol ou autres maladies pouvant entraîner une mortalité cardiovasculaire) liées à la prise de ce traitement.

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