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Climat : doit-on craindre un potentiel "super El Niño" dans les prochains mois ?

Le phénomène météorologique El Niño a débuté selon une agence de l'ONU. Il devrait avoir d'importantes conséquences sur le climat mondial. Et certains scientifiques redoutent qu'il se transforme en "super El Niño".
Article rédigé par Thomas Destelle
Radio France
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6min
En 2016, la Bolivie avait été touchée par une importante sécheresse. Photo d'illustration. (AIZAR RALDES / AR)

Sécheresses, inondations ou ouragans extrêmes… Les conséquences d'El Niño ne doivent apparaître qu'à partir de 2024, mais les Nations unies appellent déjà à anticiper le retour du phénomène météorologique. Après l'Agence américaine d'observation océanique et atmosphérique (NOAA) début juin, l'Organisation météorologique mondiale (OMM) a officialisé lundi 4 juillet "le début de l'épisode" El Niño et estime qu'il y a une probabilité de 90% pour qu'il se poursuive au second semestre.

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"Les prévisions, actuellement, montrent des chances assez importantes de développement d'El Niño, explique sur franceinfo lundi Jérôme Vialard, océanographe et climatologue, directeur de recherche à l’Institut de recherche pour le développement (IRD). Mais on reste un petit peu prudent parce que c'est encore une période un peu critique où on peut avoir des surprises."

Le phénomène météorologique El Niño se traduit par une hausse de la surface de l'eau dans l'est du Pacifique et survient de façon cyclique. Il est généralement associé à une hausse des températures mondiales et provoque des catastrophes climatiques, en particulier des vagues de sécheresse et des précipitations supérieures à la normale. "Le phénomène El Niño qui revient tous les tous les deux à sept ans", précise l'océanographe Jérôme Vialard. Certaines régions avaient déclaré un épisode d'El Niño en 2018-2019, mais l'OMM n’avait pas validé son apparition, car toutes les conditions n’avaient pas été remplies, souligne Ouest France.

Trois "super El Niño" en quarante ans

II n'est pas encore possible de prédire l'intensité ou la durée de l'actuel El Niño. Elle sera "au moins modérée" estime l'OMM. De son côté, la NOAA estime que les modèles de prévisions "plaident pour une transition vers un El Niño en juin, suivi d’un fort El Niño au cours de l’hiver 2023-2024". La possibilité d'un "super El Niño" n'est pas écartée par les scientifiques, rappelle le site TF1info, alors que les océans battent des records de température en ce début d'année 2023 et que le réchauffement climatique peut rendre les phénomènes climatiques plus extrêmes. Le Bureau australien de météorologie (BOM) estime que certains modèles de prévision suggèrent l'apparition possible d'un "super El Niño" pour cette année.

Un "super El Niño" se distingue d'un El Niño "classique" par l'ampleur de la hausse des eaux de surface du Pacifique : de +0,8°C par rapport à la moyenne, on passe à +2°C, voire au-delà. Le "super El Niño" n'est arrivé que trois fois en quarante ans : 1982-1983, 1997-1998 et 2015-2016. Durant la dernière période, le phénomène "était relativement fort", explique l'océanographe et directeur de recherche au CNRS Eric Guilyardi au journal Libération. L'anomalie de température à la surface de la mer – c’est comme ça qu’on mesure son intensité – dépassait de 3 à 4°C la normale."

L'effet d'El Niño sur les températures mondiales se manifeste généralement dans l'année qui suit son développement. Les conséquences seront donc probablement plus apparentes en 2024. Celles du "super El Niño" de 2015-2016, l'un des plus violents jamais observés, ont été désastreuses. En avril 2016, l'ONU estimait que plus de 60 millions de personnes dans 13 pays, en Afrique, en Asie-Pacifique, et en Amérique centrale et du sud ont été touchées par une sécheresse, des inondations ou des tempêtes.

Des conséquences désastreuses

La Californie avait connu au début de l'année 2016 une succession d'orages engendrant des inondations et des glissements de terrain. Des pluies diluviennes se sont aussi abattues en Amérique du Sud provoquant notamment des inondations au Pérou ou en Argentine, au Paraguay et au Brésil où quelque 170 000 personnes ont dû être évacuées à cause de violentes inondations et de glissements de terrain. À l'inverse, après des précipitations nettement inférieures à la normale, la Bolivie a dû faire face à la pire sécheresse enregistrée depuis 25 ans. Certaines régions d’Afrique de l’Est comme l'Ethiopie ou d'Asie du Sud-Est comme les Philippines ont, elles aussi, été confrontées à des graves déficits de pluie. Au-delà des catastrophes climatiques, le phénomène serait aussi responsable de la propagation de plusieurs épidémies dans le monde, selon une étude menée par des chercheurs de la NASA et publiée dans la revue Scientific Reports.

Les conséquences en France hexagonale du phénomène El Niño risque d'être moins importantes, rappelle L'Obs, mais il pourrait induire des températures plus élevées que la normale. Un record mondial de chaleur avait par ailleurs été battu en 2016. Ce record pourrait être à nouveau battu en 2024. L'OMM a prévu, en perspective du phénomène El Niño, qu'au moins l'une des cinq prochaines années sera la plus chaude jamais enregistrée, battant le record de 2016.

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