Feux de forêts : l'Australie, pourtant habituée aux "phénomènes extrêmes", a "fait preuve d'impréparation", selon un chercheur
Des feux de forêts dévastent actuellement l'Australie où des milliers de personnes ont du être évacuées. "On n'est pas préparés et on ne prend pas suffisamment la mesure de la vitesse et de l'ampleur" du changement climatique, estime le chercheur Sébastien Treyer.
L'Australie, pourtant habituée aux "phénomènes extrêmes", a "fait preuve d'impréparation" face aux incendies qui ont déjà dévasté plus de six millions d'hectares de forêts, estime ce samedi 4 janvier, sur franceinfo, le chercheur Sébastien Treyer, directeur général de l'Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri). La preuve, selon lui, "qu'on n'est pas préparés et qu'on ne prend pas suffisamment la mesure de la vitesse et de l'ampleur" du changement climatique. Sébastien Treyer pointe également du doigt la politique énergétique de l'Australie, "premier exportateur mondial de charbon".
Le très contesté Premier ministre australien Scott Morrison a lui-même reconnu en décembre que "le changement climatique ainsi que d'autres facteurs" contribuaient à ces terribles incendies. Vous confirmez ?
Sébastien Treyer : Oui, tout à fait. Les scientifiques, aujourd'hui, n'hésitent plus à attribuer l'augmentation de la fréquence des événements extrêmes, incendies, sécheresse, augmentation des températures, cyclones, au changement climatique. Donc, aujourd'hui, on peut dire que ce qui se passe en Australie est une des conséquences de ce changement.
2019 est l'année la plus chaude jamais enregistrée dans le pays. La politique australienne et ses choix en matière d'environnement sont-ils également directement en cause ?
Je pense qu'il faut prendre un tout petit peu de recul et de prudence avant de dire cela. L'Australie a eu, de tout temps, une variabilité climatique parmi les plus importantes au monde. Normalement, ce pays devrait être préparé à des phénomènes extrêmes, parce que c'est quelque chose qui est habituel. Et ce qu'on voit, c'est que même un pays développé, aussi habitué à la variabilité, fait preuve d'impréparation par rapport à ces catastrophes. Donc, ce qu'on observe avec le changement climatique, et l'Australie est avant tout un exemple de ça, c'est qu'on n'est pas préparés et qu'on ne prend pas suffisamment la mesure de la vitesse et de l'ampleur de ce changement. Ensuite, effectivement, il faut souligner que l'Australie est le premier exportateur mondial de charbon et utilise cette énergie pour sa production d'électricité à hauteur de 60%. Tout cela montre bien que c'est un pays qui a choisi de ne pas sortir de cette énergie fossile et qui, en plus, la diffuse à travers la planète.
Mais comment expliquer que dans le contexte que nous connaissons, avec le succès de Greta Thunberg, avec des manifestations dans de nombreux pays, de fréquentes alertes au niveau international sur le réchauffement climatique, l'Australie n'ait pas réagi plus tôt ?
C'est difficile d'exprimer depuis Paris tout ce qui est dans la proposition politique du Premier ministre actuel. Mais je pense que c'est un Premier ministre qui dit : "Utilisons cette énergie parce que c'est une ressource que nous avons, parce que les marchés émergents, notamment l'Inde, la Chine, ont aujourd'hui encore besoin de charbon pour produire leur électricité". C'est donc une logique de cavalier seul, une logique individualiste, et non pas de coopération multilatérale.
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