Haïti : à Port-au-Prince, après Matthew, "on n’a pas d’eau, pas de nourriture, pas de draps pour s’allonger, rien du tout"
Après avoir touché Haïti, dimanche 2 et lundi 3 octobre, le cyclone Matthew continue sa trajectoire dans les Caraïbes. La moitié sud du pays, la plus affectée, est désormais coupée du reste du pays. Reportage à Port-au-Prince et dans sa région.
La tempête tropicale Matthew poursuit sa course dans les Caraïbes, vers les côtes du golfe du Mexique. Dimanche 2 et lundi 3 octobre, Haïti a été balayé par des rafales de vents et des pluies torrentielles. L'île est très vulnérable aux aléas climatiques. La moitié sud du pays, la plus affectée, est désormais coupée du reste du pays.
Dans la capitale, Port-au-Prince, les habitants des bidonvilles du bord de mer ont été évacués à la dernière minute mais, dans les abris provisoires, leur situation est alarmante. Mercredi 5 octobre, dans la grande salle d’une école publique du quartier défavorisé de Martissant, plus de 130 familles attendent que la pluie cesse. Allongée à même le béton, Louisiana Dieule est plus qu’inquiète, pour elle et ses quatre enfants. "On nous a encouragés à quitter nos logements mais c’est grave parce qu’ils n’ont pas veillé sur nous : on n’a pas d’eau, pas de nourriture, pas de draps pour s’allonger, rien du tout."
Louisiana Dieule a évacué hier avec ses 4 enfants dans un abri sans électricité ni provisions. #Haiti #Matthew pic.twitter.com/dE7tZiqZxK
— Amélie Baron (@Ameliebaron) 4 octobre 2016
"La pluie tombe toujours, ajoute la mère de famille. Donc le choléra peut venir. Je suis obligée d’avoir peur ! Moi qui suis une adulte, je connais les précautions, mais les enfants ici, qui n’ont pas d’eau, ils vont boire l’eau qu’ils trouvent dans les trous de la cour… Les choses ne sont pas formidables, pour nous les pauvres !"
On a quitté nos maisons pour vivre mais on veut pas perdre nos enfants ici.
Louisiana ne sait pas combien de temps elle va devoir subir ces conditions, et face à la pluie qui continue, elle ne sait pas non plus si sa petite maison ne va pas être envahie par les eaux.
Les plantations détruites à 80% dans certaines zones du pays
A Gressier, à 30 kilomètres au sud-ouest de Port-au-Prince, où les intempéries ont été moins fortes, les dégâts sont déjà alarmants notamment dans les zones agricoles. Sous une pluie encore battante, Jean-Wilson Joseph arrive au centre de la protection civile de Gressier. Il revient de la section communale où il a été élu conseiller. Si dans le centre de la commune, on dénombre déjà des inondations et des maisons endommagées, les zones enclavées dans les hauteurs inquiètent les autorités locales. Jean-Wilson Joseph ne cache pas ses angoisses : "Je viens de faire 20 kilomètres à pied dans les mornes [les collines], parce qu’on devait commencer les constats. Dans les mornes, les plantations sont détruites à 80%."
C’est grâce à ces petits jardins que les gens de la zone survivent. "Les habitants des mornes vendent leurs produits dans la ville ou à Port-au-Prince, explique Jean-Wilson Joseph. Maintenant comment vont-ils réussir à vivre ? Ils n’auront plus rien à manger. Dans ces sections rurales, la plus grande activité, c’est le travail de la terre, donc il va y avoir une grosse crise au niveau de cette section communale."
L'anéantissement de l’économie rurale haïtienne est d’autant grave que la région du Grand sud, très agricole, a subi l’ouragan de plein fouet.
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