Harkis : l'Assemblée nationale donne un premier feu vert au projet de loi de "réparation"
Le texte a été adopté en première lecture par les députés et doit passer au Sénat. Il prévoit une réparation forfaitaire en fonction du temps passé par les harkis dans des camps et autres "hameaux de forestage".
L'Assemblée nationale a donné un premier feu vert au projet de loi pour demander "pardon" et tenter de "réparer" les préjudices subis par les harkis et leurs familles, jeudi 18 novembre. Le texte, voté en première lecture par 46 voix (1 contre et 6 abstentions), est maintenant attendu au Sénat. Près de soixante ans après la guerre d'Algérie, il se veut la traduction législative d'un discours d'Emmanuel Macron, qui avait demandé "pardon" à ces Algériens ayant combattu aux côtés de l'armée française, mais qui furent "abandonnés" par la France.
Le projet de loi allie dimension mémorielle et indemnisation. Il reconnaît "les conditions indignes de l'accueil" réservé aux 90 000 harkis et à leurs familles qui ont fui l'Algérie après l'indépendance en 1962. Près de la moitié d'entre eux avaient été relégués dans des camps et des "hameaux de forestage". En conséquence, le projet de loi prévoit "réparation" du préjudice avec, à la clé, une somme forfaitaire tenant compte de la durée du séjour dans ces structures. Les débats se sont concentrés sur ce volet, car des familles de harkis et des associations réclamaient devant l'Assemblée une réparation élargie.
L'opposition a également réclamé une indemnisation pour les 90 000 harkis "y compris ceux qui ne sont pas passés par des camps de transit" mais ont été accueillis dans des "conditions indignes". Geneviève Darrieussecq, la ministre déléguée à la Mémoire et aux Anciens combattants, a insisté sur le "préjudice spécifique" des 50 000 harkis relégués dans "six camps", "soixante-neuf hameaux de forestage" et "quelques autres foyers" de "privation de liberté", une "chose unique, particulièrement contraire à nos principes républicains". Il y a des "zones grises, même 60 ans après", a-t-elle toutefois reconnu. Si des lieux supplémentaires sont identifiés, "bien entendu nous les intégrerons".
Une somme globale de 302 millions d'euros
Quelque 50 millions d'euros ont déjà été inscrits dans le projet de budget 2022 pour abonder le fonds d'indemnisation. La somme globale de 302 millions d'euros, pour plusieurs années, est mentionnée. Mais la réparation "ne peut pas tout, elle n'efface pas les souvenirs douloureux", a souligné Geneviève Darrieussecq, qui appelle à être au "rendez-vous de la vérité et de l'honneur" pour tourner une des "pages les plus sombres de l'histoire de France".
Avec ce projet de loi, le président Macron va plus loin que ses prédécesseurs, en reconnaissant une "dette" envers les harkis et leurs familles. Demander "pardon" est loin d'être anodin lorsqu'il est question du conflit algérien, un sujet toujours aussi brûlant des deux côtés de la Méditerranée. Jusqu'à 200 000 harkis avaient été recrutés comme auxiliaires de l'armée française pendant le conflit entre 1954 et 1962. Une journée d'hommage de la nation leur est consacrée chaque 25 septembre, depuis un décret de 2003. Symboliquement, les députés ont voté jeudi pour que cette date du 25 septembre soit explicitement "inscrite dans la loi".
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